«L’Amérique d’abord n’est pas l’Amérique seule» : Trump s’emploie à séduire Davos

«L’Amérique d’abord n’est pas l’Amérique seule» : Trump s’emploie à séduire Davos

«L’Amérique d’abord n’est pas l’Amérique seule»: Donald Trump a livré, vendredi à Davos, un discours tout entier destiné à rassurer les partenaires diplomatiques et commerciaux des Etats-Unis, ébranlés par ses dérapages passés.

Le président américain, accueilli sur scène par une fanfare, n’a pu toutefois s’empêcher de glisser une critique contre la «méchante» presse, s’attirant des huées dans la salle de 1.500 places, remplie de grands responsables économiques et politiques ainsi que de journalistes. Avant ces propos tenus lors d’un court échange informel avec l’organisateur du Forum économique mondial, Klaus Schwab, il s’en était tenu à un discours écrit sur mesure pour ce grand raout du libéralisme. «Je ferai toujours passer l’Amérique d’abord, tout comme les dirigeants d’autres pays devraient le faire aussi. Mais l’Amérique d’abord ne signifie pas l’Amérique seule», a-t-il déclaré en référence à son célèbre slogan. L’ancien magnat de l’immobilier a tenu à «affirmer l’amitié et la coopération des Etats-Unis pour construire un monde meilleur». «C’est un discours mesuré, plat, rationnel, pas du tout ce que l’on pouvait attendre de Donald Trump», a commenté Kishore Mahbubani, ancien ambassadeur de Singapour auprès de l’ONU devenu conseiller de l’université nationale de Singapour. «Nous sommes en faveur du libre-échange, mais il doit être juste, et il doit être réciproque», a encore dit le président américain, faisant écho aux discours prononcés pendant le reste de la semaine par le président français Emmanuel Macron, par la chancelière allemande Angela Merkel ou par le Premier ministre indien Narendra Modi. «C’était positif au sens où il n’a pas déclaré de guerre commerciale, ou de guerre tout court», a réagi le vice-président de la Commission européenne Jyrki Katainen.

«Méchante» presse

Le chef d’État de 71 ans, qui se voulait aussi le «VRP» des Etats-Unis dans la station de ski huppée, a tout fait pour convaincre les maîtres de la finance et les PDG que «l’Amérique est l’endroit où faire des affaires». Donald Trump a vanté sa baisse des impôts sur les sociétés, ainsi que la dérégulation en cours dans le pays, pour le plus grand plaisir des patrons américains présents. «Il a fait du bon boulot pour représenter son administration et son pays», a par exemple estimé Marc Benioff, PDG de l’entreprise californienne Salesforce. Pendant les quinze minutes qu’a duré son discours, débité ménaniquement et applaudi poliment – là où la salle enthousiaste s’était levée pour Emmanuel Macron – Donald Trump est resté rivé à ses deux prompteurs. Mais c’est sans note qu’il s’est lancé dans une de ses critiques récurrentes de la presse. Evoquant son parcours d’homme d’affaires, Donald Trump a dit: «Ce n’est qu’en devenant un homme politique que j’ai réalisé à quel point la presse peut être méchante» et «fausse». Des huées ont alors retenti. La retranscription officielle par la Maison Blanche fait elle mention de «rires» dans le public. Dans la matinée, le président avait balayé d’un «fake news» les informations du New York Times, selon lesquelles il aurait été tenté en juin 2017 de renvoyer le procureur spécial enquêtant sur les soupçons de collusion entre son équipe de campagne et Moscou. D’autres sujets désagréables ont rattrapé Donald Trump, qui a tenté à Davos de faire oublier des dérapages passés. Ainsi en priant le chef d’Etat rwandais Paul Kagame de transmettre «ses sentiments chaleureux» aux chefs d’État de l’Union africaine, qui avait vivement critiqué les propos sur les «pays de merde» attribués au président américain. Ou encore en s’excusant, dans un rare acte de contrition, d’avoir retweeté des vidéos islamophobes relayées par un groupe d’extrême-droite britannique. Donald Trump, qui est reparti pour les Etats-Unis dans la foulée de son discours, a enfin rassuré les partenaires commerciaux des Etats-Unis en disant dans une interview son attachement à un «dollar fort», apaisant des craintes nées dans la semaine d’une guerre des monnaies. «Lui qui d’habitude adore provoquer, adore jouer le rôle du méchant, du brigand, il a essayé de se mettre un petit vêtement de mouton» a commenté Claude Béglé, chef d’entreprise et homme politique suisse, après avoir entendu le discours. «Ceci dit, je pense que sur le fond, rien n’a changé».