L’ambassadeur d’Égypte à Alger, Omar A. Abou Eich, à “Liberté” “Le Qatar est la source de tous les maux du monde arabe !”

L’ambassadeur d’Égypte à Alger, Omar A. Abou Eich, à “Liberté”  “Le Qatar est la source de tous les maux du monde arabe !”
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Déterminé à donner aux relations algéro-égyptiennes une dimension à la mesure de la riche histoire commune des deux pays, le chef de la mission diplomatique égyptienne en Algérie s’attelle à raffermir les rapports bilatéraux dans tous les domaines, y compris sportif.  

Liberté : L’Algérie et l’Égypte sont des pays limitrophes de la Libye qui vit une crise multidimensionnelle. Après le massacre de 21 coptes par la branche Daech en Libye, Alger et Le Caire avaient divergé sur la solution, dialogue ou intervention militaire. Une convergence de vue se serait dégagée ces derniers temps entre les deux parties, qui coordonnent mieux leurs actions pour  aider ce pays frère. Qu’en est-il  au juste ?

Omar A. Abou Eich : Premièrement, il n’y a jamais eu de divergences entre Alger et Le Caire sur la question libyenne. L’accord sur le dialogue entre toutes les factions libyennes excluant les groupes terroristes existait depuis longtemps entre l’Égypte et l’Algérie. La Libye a surtout besoin d’un gouvernement de technocrates capables d’assumer ses responsabilités durant cette période difficile que traverse le pays. Il était important de faire pression sur le gouvernement de Tobrouk, reconnu internationalement, afin qu’il s’engage de manière efficace pour une Libye unifiée. L’Égypte est contre l’éclatement de ce pays, et entend l’aider pour combattre le terrorisme, sinon il n’y aura plus de Libye. On doit lui apporter l’aide logistique pour qu’elle vienne à bout du terrorisme. Une chose est sûre, Alger et Le Caire partagent le même point de vue sur le combat contre le terrorisme qu’il faut éradiquer.

La menace terroriste Daech est réelle pour l’Égypte, car émanant de la branche de cette mouvance en Libye et également celle se trouvant dans le nord du Sinaï…

LG Algérie

Daech ne représente pas une menace pour l’Égypte seulement, mais pour tous les pays de la région occidentale de l’Afrique du Nord, dont l’Algérie et la Tunisie. C’est pour cela qu’il faut accorder une grande attention à ce qui se passe en Libye et apporter au gouvernement légitime de Tobrouk, qui a pour mission de sauver la Libye, l’aide logistique nécessaire afin qu’il réussisse dans sa mission, qui est capitale pour l’avenir du pays. Par ailleurs, il est facile de contrôler comment sera utilisée l’aide militaire sur le terrain. Un échec en Libye pourrait donner lieu à une répétition de l’histoire et revivre ce qui s’est passé en Irak et en Syrie.

La Ligue arabe est une organisation qui ne fédère pas les Arabes, au contraire, ses sommets sont des occasions où sont étalées les divergences entre les différents dirigeants. Ne faut-il pas la réformer en profondeur pour qu’elle constitue désormais une instance utile à tous, au lieu d’une caisse à résonance dont les résolutions demeurent sans lendemain ?

À mon avis, c’est le rôle des dirigeants arabes qui est le problème et non pas la Ligue arabe elle-même. Certes, l’administration de la Ligue arabe doit être réformée pour être plus utile et efficace, et surtout, mieux fédérer les pays arabes, mais il faudrait d’abord que les pays qui créent ces problèmes cessent de le faire à l’image du Qatar. Le Qatar est la source de tous les maux du monde arabe, par ses positions dans les conflits. Il constitue toujours une partie du problème et non pas une solution dans les conflits qui secouent le monde arabe.

Excellence, les relations algéro-égyptiennes enregistrent ces derniers temps une nette amélioration. Comment s’est opéré ce réchauffement après la crise qui a suivi le match de football dans le cadre des éliminatoires du Mondial-2010 ?

Ce problème, qui n’en est pas un à vrai dire, est un produit des médias des deux pays, par leurs positions irresponsables. Il y a eu des dépassements inadmissibles dans les médias des deux pays, mais la volonté politique de calmer la situation eu égard aux relations historiques entre les deux parties a prévalu. Juste après ce triste épisode, qui est une parenthèse regrettable à fermer rapidement, Hosni Moubarak est venu à Alger présenter au président Abdelaziz Bouteflika ses condoléances suite au décès de son frère. Il faut souligner que la première visite officielle à l’étranger du président Abdelfattah al-Sissi a été en Algérie. C’est dire la solidité des liens existant entre les deux pays frères. Je tiens à rappeler l’hommage que rendait régulièrement le président Anouar El-Sadate au président Houari Boumediene, sans lequel lui et le roi Fayçal d’Arabie saoudite, l’Égypte n’aurait jamais remporté la victoire de 1973 contre

Israël.

Les relations économiques entre nos deux pays sont limitées au strict minimum pratiquement. Existe-t-il des projets communs pour leur donner une plus grande dimension ?

Non, je ne suis pas d’accord ; les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 1,2 milliard de dollars US et devraient arriver à 2 milliards pour cette année 2015, surtout avec l’accroissement des importations de gaz algérien par l’Égypte. Il faut relever que les investissements égyptiens en Algérie avoisinent les 2,5 milliards de dollars et ceux de l’Algérie en Égypte sont de l’ordre de 900 millions de dollars. Il est prévu la création d’une société mixte entre Sonatrach et Petrojet, qui est au stade de la préparation. Des investissements, qui sont plus importants que les échanges commerciaux, sont appelés à augmenter particulièrement de la part des hommes d’affaires algériens privés. D’ailleurs, la présence d’Ali Haddad au Forum d’investissement de Charm al-Cheikh a été très remarquée. À signaler aussi que des produits égyptiens, placés sur des listes non éligibles, sont à revoir, car ils reviennent moins chers que ceux importés d’Europe. Il est question de la création d’un forum d’hommes d’affaires algéro-égyptien pour établir une feuille de route car le cadre juridique existe déjà.

La récente conférence sur l’investissement en Égypte a eu un succès éclatant avec la signature de plus de 30 milliards de dollars US de contrats. Comment cela est-il perçu au Caire ?

Trente-huit milliards de dollars US d’accords ont été conclus, comme investissements directs, alors que le montant global est de 130 milliards de dollars pour les cinq années à venir. C’est un résultat extraordinaire qui constitue un soutien politique important à l’Égypte, notamment avec le changement de position de la part de certains pays vis-à-vis de notre pays, à l’image de l’Allemagne. Cette dernière, qui avait une position hostile envers l’Égypte après l’arrivée du président Abdelfattah al-Sissi au pouvoir, a participé au forum et annonce des investissements d’envergure.

Enfin, où en est l’idée d’organiser un match de football amical entre les deux sélections nationales pour décrisper davantage l’atmosphère entre les deux pays, d’autant plus que le récent déplacement à Alger du Ahly du Caire dans le cadre de la Supercoupe de la CAF s’est bien déroulé ?

Il s’agit d’un moyen de rapprochement entre nos deux peuples frères après la triste parenthèse des matches des éliminatoires du Mondial-2010 de football. J’en ai parlé à Mustapha Berraf, le président du Comité olympique algérien, et au professeur Mohamed Tahmi, le ministre des Sports, et le projet est en bonne voie.

Le match devrait avoir lieu à l’occasion de l’inauguration d’un nouveau stade en Algérie ou lors de la réouverture du stade du 5-Juillet.

M. T.