L’Algérie s’inquiète des conséquences que pourrait avoir le débat sur l’identité nationale, chez elle. Le ministre de l’Intérieur Yazid Zerhouni estime que « certaines déclarations en Europe, notamment en France, tout comme l’interdiction des minarets en Suisse alimentent le terrorisme en Algérie ». « Il y a des dérapages dans ce débat risqué qui s’oriente vers la xénophobie à l’égard des Maghrébins », a-t-il déploré dans un entretien à la radio publique algérienne.
À propos de ces débats sur l’identité nationale qui fleurissent en Europe, le ministre a partagé ses craintes avec ses homologues des pays du groupe 5+5 (Algérie, Maroc, Mauritanie, Libye, Tunisie, France, Italie, Espagne, Portugal, Malte) lors d’une réunion fin novembre à Venise. M. Zerhouni soutient que « quand on se laisse aller à des commentaires encourageant l’islamophobie, on apporte de l’eau au moulin de ceux qui utilisent l’islam pour justifier des actions violentes, mais qui sont ourtant loin de représenter cette religion de tolérance ».
Alger redoute que les groupes armés, dont l’activité a nettement baissé depuis 2008, exploitent le sentiment anti-occidental provoqué par l’interdiction de minarets en Suisse afin de reconstituer leurs forces. Car les extrémistes algériens utilisent souvent les difficultés des musulmans en Europe pour recruter.
On se souvient que les groupes armés algériens affiliés à al-Qaida avaient ainsi réussi à mobiliser des centaines de jeunes après l’invasion de l’Irak par les États-Unis et ses alliés en 2003. Ces jeunes ont été ensuite utilisés dans des attentats kamikazes en Algérie, entre 2006 et 2007. La guerre en Afghanistan et le blocage du processus de paix en Palestine constituent aussi des facteurs permettant aux islamistes algériens de recruter facilement parmi la population.
Des partis politiques d’opposition, des patrons et des journaux algériens critiquent dans le même temps l’attitude des Européens uniquement intéressés « par les contrats économiques ». « C’est avec consternation que les citoyens algériens soucieux de démocratie et de respect des droits de l’homme constatent la démission des Européens en matière de défense des militants et des défenseurs des droits de l’homme par crainte des représailles d’un régime », a écrit le président du Front des forces socialistes (opposition) Hocine Ait Ahmed, dans une lettre adressée le 9 décembre à l’ONU.
Auteur : Ali Idir, à Alger