La micro-importation, dite « commerce du cabas », sort enfin de l’ombre en Algérie. Longtemps pratiquée dans la discrétion, parfois à la limite de la légalité, cette activité se voit consacrée par un cadre réglementaire précis. Le gouvernement a publié au Journal officiel du 29 juin 2025, un décret exécutif qui fixe les conditions et modalités d’exercice de la micro-importation par les auto-entrepreneurs.
Ce texte, signé par le Premier ministre Mohamed Ennadir Larbaoui, s’inscrit dans la politique de promotion de l’auto-entrepreneuriat et de diversification économique. Une étape qui pourrait bousculer l’univers du petit commerce, mais qui s’accompagne d’un arsenal de règles strictes pour éviter les dérives.
Cela dit, derrière les promesses d’opportunités économiques, le commerce du « cabas » reste un terrain où l’État entend garder un contrôle étroit. Un subtil équilibre entre liberté d’entreprendre et impératifs de sécurité économique et nationale.
Commerce du « cabas » en Algérie : un plafond fixé à 1,8 million de dinars et deux voyages mensuels autorisés
Au cœur du dispositif, la micro-importation est désormais clairement définie. Elle consiste en l’importation, à titre individuel, de quantités limitées de biens destinés à la vente en l’état. Ces opérations doivent impérativement se dérouler lors des déplacements personnels à l’étranger et dans le respect d’un plafond rigoureux :
- La valeur des biens importés ne peut dépasser 1.800.000 DA par voyage.
- L’auto-entrepreneur ne peut effectuer que deux voyages par mois pour ses opérations de micro-importation.
- L’allocation touristique annuelle est exclue du calcul de la valeur des marchandises importées.
Cette limitation vise à différencier clairement la micro-importation du commerce classique et à éviter tout contournement des règles fiscales ou douanières.
Des avantages substantiels pour les micro-importateurs, mais des conditions strictes à respecter
Le décret n° 25-170 réserve la micro-importation exclusivement aux personnes physiques disposant du statut d’auto-entrepreneur. Pour prétendre à cette activité, plusieurs conditions cumulatives s’imposent :
- Être âgé au moins de l’âge légal du travail.
- Être de nationalité algérienne et résider en Algérie.
- Ne pas exercer d’autre activité rémunérée, salariée, commerciale ou libérale.
- Être affilié à la Caisse nationale de Sécurité sociale des non-salariés.
- Détenir un compte bancaire en devises ouvert auprès de la Banque extérieure d’Algérie.
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En contrepartie, l’État accorde plusieurs facilités. Il dispense le commerçant du « cabas » d’une inscription au registre du commerce. De plus, il supprime aussi l’obligation d’obtenir des autorisations d’importation préalables. Sauf pour une autorisation générale spécifique. Il impose également une comptabilité simplifiée. Tenue sur un registre coté et paraphé par les impôts. Enfin, il applique un droit de douane réduit à 5 %, avec un régime fiscal particulier.
Autorisation générale et plate-forme numérique au cœur du dispositif
L’exercice effectif de la micro-importation ne peut débuter sans l’obtention d’une autorisation générale délivrée par le ministère chargé du commerce extérieur. Délivrée dans un délai de cinq jours ouvrables, cette autorisation est valable une année et strictement personnelle.
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Une autre innovation majeure consiste à la mise en place d’une plate-forme numérique, gérée par le ministère chargé des start-up. Avant chaque opération d’importation, le micro-importateur doit y déclarer les marchandises qu’il compte introduire sur le territoire. Cette plateforme est interconnectée avec les douanes et les autres administrations concernées, garantissant ainsi un contrôle renforcé.
Interdits sévères et radiation du registre en cas d’infractions
La micro-importation ne signifie pas totale liberté. Le décret écarte catégoriquement certains produits et impose des règles de sécurité et de traçabilité strictes :
- Interdiction d’importer des marchandises prohibées, des produits sensibles, des équipements réglementés, des produits pharmaceutiques ou des marchandises soumises à autorisations spéciales.
- Obligation d’étiquetage précis sur chaque marchandise importée : nom du micro-importateur, désignation du produit, pays d’origine ou de provenance, ainsi que mentions sur le bon de livraison (quantité, poids, volume).
- Interdiction formelle de dépasser le contingent fixé à 1,8 million de dinars par déplacement.
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Tout manquement entraîne des sanctions sévères, jusqu’à la radiation pure et simple du registre national de l’auto-entrepreneur. Parmi les fautes passibles de cette mesure, fausses déclarations, détournement de la carte d’auto-entrepreneur à d’autres fins, ou violation des règles liées à la protection du consommateur et à la sécurité nationale.