Alors que l’Afrique entre dans une décennie charnière, la courbe de sa consommation de pétrole suit une pente ascendante sans précédent. Derrière ce mouvement, deux moteurs structurels.
Une population qui atteindra 1,32 milliard d’habitants et un produit intérieur brut en croissance moyenne de 3,8 % par an entre 2025 et 2030.
Ainsi, le continent pourrait consommer jusqu’à 5,4 millions de barils par jour d’ici 2030, contre 4,6 millions actuellement. Ce chiffre, révélé par la Energy Research Unit de Washington, ne traduit pas un simple emballement conjoncturel, mais bien une reconfiguration durable des besoins énergétiques africains.
Dans un contexte mondial de transition, cette croissance soulève des questions majeures, notamment pour les pays producteurs eux-mêmes, à commencer par l’Algérie. Entre ambitions d’industrialisation, dépendance aux exportations et besoins internes grandissants, Alger se retrouve face à un dilemme énergétique structurant.

Une progression régulière de la consommation africaine de pétrole jusqu’en 2030
À contre-courant des projections globales de ralentissement de la demande, le continent africain trace sa propre trajectoire. Stabilisée à 4,6 millions de barils par jour en 2023. La demande devrait suivre un rythme de croissance annuel moyen de 2,9 % pour atteindre :
- 4,8 millions de barils en 2025
- 4,9 millions en 2026
- 5 millions en 2027
- 5,2 millions en 2028
- 5,3 millions en 2029
- 5,4 millions en 2030
Les moteurs de cette dynamique sont multiples. D’un côté, l’urbanisation rapide et l’amélioration progressive du niveau de vie. De l’autre, un tissu économique en transformation, dopé par les infrastructures et l’industrialisation croissante.
L’Égypte, locomotive africaine de la demande en pétrole
Parmi les pays qui tirent la demande continentale vers le haut, l’Égypte occupe une place centrale. Avec une projection de 1,2 million de barils consommés quotidiennement à l’horizon 2030, le pays des pharaons représentera à lui seul plus de 20 % de la consommation africaine.
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Ce bond est accentué par des circonstances géopolitiques récentes. Le Caire a été contraint de réorienter sa production énergétique. Misant davantage sur le fioul et le diesel pour alimenter ses centrales électriques.
L’Algérie, le Nigeria et l’Afrique du Sud : des poids lourds en consolidation
Trois autres nations confirment leur rôle moteur dans cette dynamique. L’Algérie, le Nigeria et l’Afrique du Sud ! Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie, la demande dans chacun de ces pays pourrait avoisiner les 600 000 barils par jour en 2030.
Cette montée en puissance s’explique par une combinaison de facteurs. Développement urbain rapide, croissance du parc automobile et renforcement des capacités industrielles.
Un essor différencié selon les types de carburants
Si l’ensemble des produits pétroliers voit sa demande croître, certains carburants se démarquent particulièrement :
- Gaz de pétrole liquéfié (GPL) et éthane : croissance annuelle estimée à 5,1 % jusqu’en 2030, malgré une stagnation temporaire autour de 700 000 barils/jour jusqu’en 2025. Ce niveau grimperait à 900 000 barils d’ici la fin de la décennie.
- Essence : hausse attendue de 2,6 % par an pour atteindre 1,4 million de barils par jour en 2030.
- Diesel : croissance moyenne de 2,8 % par an, avec un pic de 2,1 millions de barils quotidiens visé pour la même échéance.
- Kérosène/Carburéacteur : la progression reste timide, avec une consommation estimée à 270 000 barils/jour en 2030. En cause, « le coût élevé des voyages aériens et l’accessibilité limitée de ce mode de transport pour une grande partie des habitants », soulignent les analystes.
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Alors que l’Agence internationale de l’énergie révise à la baisse ses projections mondiales de croissance de la demande pétrolière pour 2025 et 2026, l’Afrique suit une trajectoire singulière. Le continent, porté son urbanisation et son besoin croissant en énergie, pourrait bien devenir un centre de gravité stratégique sur l’échiquier énergétique mondial.