L’Algérie, est-il un pays ouvert ?

L’Algérie, est-il un pays ouvert ?

L’Algérie ferme la marche d’un classement américain, «Best Countries 2018», sur les 80 meilleurs pays au monde. S’il y a pire qu’elle, l’Algérie figure à la dernière place de ce classement des meilleurs 80 pays au monde. Un classement réalisé par l’US News and World Report, en collaboration avec le cabinet BAV Consulting et la célèbre Wharton School de l’Université de Pennsylvanie.

Il y a environ une année, deux journalistes de l’agence Reuters venus en Algérie pour assurer une formation à l’Ecole supérieure de journalisme ont profité de leur séjour pour déambuler dans les rues d’Alger. « C’est bizarre, je n’ai pas croisé un seul étranger » s’étonnait un des journalistes devant ses collègues algériens, lors d’un dîner au restaurant « Le Caracoia », une table très tendance.

Ce journaliste ne croit pas si bien dire, car il venait de mettre les mots sur un des maux chroniques de l’Algérie : l’absence manifeste de ressortissants étrangers et encore moins de touristes. Nous ne parlons pas ici des chinois qui viennent travailler, des syriens refugiés et des subsahariens qui fuient la misère.

Aujourd’hui, l’Algérie est un des pays les plus fermés du bassin méditerranéen avec la Libye, bien sûr. Le Maroc, la Tunisie, l’Egypte, la Syrie (avant le funeste « Printemps arabe »), le Liban, Malte, les pays de l’ex Yougoslavie, l’Italie, la France, l’Espagne, la Grèce, Chypre, sont parmi les destinations touristiques les plus prisées dans le monde.

Le tourisme pour ces pays est un segment stratégique dans les modèles de croissance avec un apport considérable à leur PIB. Quid de l’Algérie ? Zéro pointé ! Au contraire, ce sont des millions d’Algériens qui partent chaque année en villégiature vers de nouveaux horizons géographiques, et même des destinations extrêmes pour respirer, décompresser, voir d’autres paysages, d’autres visages…

La Tunisie reste en tête des destinations à cause du rapport Proximité/Qualité/Prix. Pourtant une bonne partie de ces algériens qui vont flamber leurs économies ailleurs auraient certainement voulu rester en Algérie. Mais avec des chambres d’hôtel hors de prix, des prestations où la qualité est grande absente sur la carte menu, c’est un pari juste impossible. C’est que les responsables algériens, dans leur ‘’simplicité’’, imaginent qu’il suffit d’avoir des Hilton, Sheraton, Mariot, Mercure et autres enseignes étoilées pour faire du tourisme !

Le tourisme, c’est une culture, c’est un savoir-faire que l’Algérie a laissé se perdre au fil des années. Au point d’être actuellement un des pays les plus fermés du monde avec notre voisin libyen et la Corée du Nord. Même Cuba, coupé du monde pendant les décennies du castrisme « révolutionnaire » ouvre portes et fenêtres pour faire valoir les infinies richesses artistiques, balnéaires, culinaires de l’île sur laquelle souffle une brise de fraicheur et  de liberté.

Et dire que dans les années qui ont suivi l’indépendance et jusqu’au début des années 80 l’Algérie était « la Mecque des révolutionnaires », mais surtout un pays où il faisait bon vivre avec un haut niveau de tolérance, de convivialité. « Comment voulez-vous qu’un étranger puisse venir en Algérie, alors qu’il n’a pas la possibilité de prendre une bière en terrasse, de se promener sans risque de se faire agresser, surtout si c’est une femme avec une tenue d’été ? », se plaignait le patron d’un restaurant à Alger qui vient de rendre sa franchise à une enseigne internationale célèbre, faute de clientèle.

Le mot qui sied le plus à l’Algérie, s’agissant du tourisme, c’est la faillite et un degré moindre le gâchis, tant nos potentialités naturelles n’ont rien à envier à celles de nos voisins. Mais pas leur savoir-faire, leur culture, le profond respect qu’il voue au touriste qui est roi.

Il est vrai qu’en Algérie, la « malédiction du pétrole » fait que le tourisme a toujours été la dernière roue du carrosse. Le choix des ministres qui sont désignés à la tête de ce secteur sont très significatifs, à ce sujet. « La tragédie nationale, c’est Bengrina, (ministre MSP)  à la tête du tourisme », s’est gaussé un cadre de ce secteur aujourd’hui à la retraite.

Et quand on entend aujourd’hui des responsables s’enflammer en promettant de faire du tourisme la « locomotive » du nouveau modèle économique algérien, on est juste pris d’un sourire dubitatif. C’est qu’on ne s’improvise pas par décret destination touristique.

Le défi est d’autant plus impossible que la société algérienne est soumise aux assauts du souffle du wahabisme qui est en train de s’insinuer sournoisement dans le comportement des algériens qui basculent dans l’intolérance, la haine et le rejet de l’Autre, trois conditions nécessaires et suffisantes pour faire fuir les touristes.

Une des destinations les plus fermées aux touristes

On se demande comment rendre le tourisme à la portée de tous, quels que soient leurs handicaps, en Algérie, le constat est toujours amer. Le pays reste difficilement accessible aux touristes étrangers et l’Algérien, déjà pénalisé par une allocation touristique parmi les plus maigres au monde, n’a pas beaucoup de choix pour accéder à ce nouveau besoin qu’est le voyage hors frontières.

La communauté internationale célèbre, cette année, la Journée mondiale du tourisme sous le thème “Tourisme pour tous”, une invitation aux nations pour mettre l’accent sur des politiques facilitant l’accès au tourisme à des catégories de personnes pénalisées par aussi bien leurs handicaps physiques et mentaux que par le déficit en outils d’aménagement adaptés à leurs besoins.

Pour les Algériens, nous sommes encore loin de cette démarche car le pays, après avoir perdu le peu de capital construit durant les deux décennies 1970-1980, est encore à la recherche de réponses à des questions plus simples mais fondamentales. En ce 27 septembre 2016, la destination Algérie est-elle plus facilement accessible aux touristes qu’il y a 30 ans de cela ? Au même moment, faire du tourisme en choisissant sa destination est-il encore possible pour un Algérien ?