L’Algérie en marge du marché gazier

L’Algérie en marge du marché gazier

La Libye s’enlise dans la guerre civile. Le guide libyen, au pouvoir depuis plus de 40 ans, tient à son trône au prix du sang.

Si en occident les massacres perpétrés à l’encontre des populations civiles ne suscitent que de timides condamnations, les marchés ont été saisis d’une fébrilité induite par l’intolérance des marchés financiers à l’instabilité dans le monde arabe, région considérée comme le principal producteur et exportateur de pétrole et de gaz.



La situation en Libye, devenue incontrôlable, a vite induit un ralentissement de la production d’hydrocarbures dans le pays, affectant les places financières et pétrolières, qui n’obéissent désormais plus aux fondamentaux.

Tokyo et Hong Kong ont chuté respectivement de -1,78% et – 2,11% en clôture et Paris, Londres et Francfort baissaient sensiblement en fin de matinée respectivement de -1,54%, – 1,11% et -0,50%. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord s’échangeait à 106,80 dollars peu avant 11h00 GMT, après avoir atteint 108,57 dollars dans la matinée, un plus haut depuis septembre 2008. Plusieurs compagnies pétrolières ont commencé a évacuer leurs personnels.

Du côté de la Sonatrach, on ne semble pas s’inquiéter, d’autant plus que les investissements de Sonatrach en Libye sont situés à proximité de la frontière algérienne, loin des zones touchées par les violentes manifestations qui secouent la Libye depuis plus d’une semaine. Néanmoins, les perturbations de l’industrie pétrolière et gazière libyenne pousse à nous interroger sur l’impact que cette situation pourrait avoir sur l’approvisionnement de l’Europe en hydrocarbures et sur l’Algérie.

Dans ce sens, l’économiste et expert Abderrahmane Mebtoul a estimé que la Libye est loin de constituer un acteur de poids sur le marché pétrolier et gazier. Il ne participe que de manière marginale dans les fournitures de gaz de quelques pays européens comme l’Espagne, l’Allemagne et la France, si ce n’est l’Italie à qui il fournit près de 40% de ses besoins en gaz.

Pour ce qui est du pétrole, M. Mebtoul indiquera qu’avec une production journalière de 1,8 million de baril la Libye est loin des poids lourds de l’Opep, Cartel qui ne fournit que 40 % de la production mondiale de pétrole. L’expert a ainsi expliqué que la situation en Libye n’impacte pas directement les marchés pétroliers, mais la situation qui prévaut actuellement dans l’ensemble du monde arabe suscite l’inquiétude des investisseurs et traders.

Ces derniers craignent la contagion du Bahrein vers le Qatar, ce qui n’est pas évident, et surtout l’explosion de la situation au Yémen, pays proche de la corne de l’Afrique, débouchant sur le Golfe d’Aden en mer rouge et qui pourrait fermer la route au canal du Suez lequel, comme tout le monde le sait, constitue l’une des routes pétrolières les plus importantes au monde. La crainte concerne aussi et surtout un risque de contagion en Arabie saoudite, le plus grand producteur de pétrole au sein de l’Opep.

Pour ce qui est du gaz et à la question de savoir si cette situation pourrait profiter même conjoncturellement à l’Algérie, du fait de sa proximité du marché européen, M. Mebtoul a estimé qu’au-delà du fait que la Libye est loin de poser un réel problème d’approvisionnement énergétique à l’Europe, l’Algérie n’a pas les capacités nécessaires pour profiter de l’occasion et prendre des parts de marché.

Se faisant plus précis, il dira que la seule chance pour que l’Algérie puisse profiter d’un quelconque renversement du marché gazier est que l’instabilité politique atteigne l’Iran ou le Qatar, ce qui est loin d’être évident.

Encore faut-il pouvoir répondre à la demande. Ainsi, l’expert a rappelé que l’Algérie a enregistré une baisse de ses exportations en gaz et a perdu des parts de marché. Aussi, les prix actuels du gaz qui varient entre 4 et 5 dollars/ MBTU sont loin d’assurer une rentabilité pour les projets gaziers algériens. Pour M. Mebtoul les gazoducs Galsi et Medgaz, ce dernier devant prochainement entrer en service, ont besoin d’un prix moyen variant entre 8 et 9 dollars /MBTU.

Quant aux projets de GNL, ces derniers exigent un prix moyen de 14 dollars/MBTU pour être rentables. Aussi, la question des réserves en gaz se pose avec acuité, selon M. Mebtoul qui préconise l’ouverture d’un débat national, lequel se pencherait non seulement sur l’état de nos réserves en hydrocarbures et les coûts d’exploitation mais aussi sur le modèle de consommation énergétique.

Samira G