En 2024, l’Algérie s’est hissée parmi les plus importants partenaires africains du géant pétrolier italien Eni, recevant 1,2 milliard de dollars dans le cadre des activités d’exploration et de production d’hydrocarbures sur son territoire. Ce chiffre, colossal, place le pays au deuxième rang des bénéficiaires africains, juste derrière la Libye (2,1 milliards) et devant l’Égypte (826 millions).
L’information a été révélée par le rapport annuel d’Eni, publié conformément à la directive européenne sur la transparence des entreprises extractives, et relayée par l’agence Ecofin.
Cette directive impose aux compagnies cotées dans l’Union européenne la publication détaillée de tous les flux financiers significatifs vers les États dans lesquels elles opèrent.
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L’Afrique, centre de gravité du modèle Eni
D’après le rapport, 61 % des paiements mondiaux d’Eni en 2024 ont été dirigés vers des pays africains, soit 5,7 milliards de dollars sur un total de 9,1 milliards.
C’est une confirmation claire du rôle stratégique du continent africain dans l’architecture économique d’Eni.
À titre de comparaison, le total des versements mondiaux en 2023 atteignait 9,7 milliards, marquant une baisse de 6,5 %.
Eni a effectué des paiements dans neuf pays africains, avec une concentration marquée dans le Maghreb.
Algérie, Libye et Égypte cumulent à elles seules près de la moitié des paiements mondiaux du groupe.
Ces flux comprennent impôts sur les bénéfices, redevances, primes de signature et de production, mais aussi des paiements en nature convertis en valeur monétaire.
En 2024, 61 % des paiements d’Eni sont allés à des Etats africains | https://t.co/A4PdI38wtq pic.twitter.com/oydz2Z9s3B
— Agence Ecofin (@agenceecofin) June 5, 2025
Des actifs matures et un partenariat solide avec Sonatrach
En Algérie, ces paiements sont liés à des gisements matures, notamment dans le sud-est saharien, disposant déjà d’infrastructures opérationnelles.
Le groupe italien y opère dans le cadre de contrats de partage de production avec Sonatrach, un modèle courant dans la région qui implique une fiscalité plus directe et plus élevée que dans d’autres zones du monde.
Parmi les actifs clés : la dorsale Berkine-In Amenas et le gazoduc TransMed, capable d’acheminer jusqu’à 30 milliards de m³ de gaz par an vers l’Italie.
En 2024, les exportations algériennes ont atteint 28 milliards de m³, confortant l’Algérie dans son rôle de premier fournisseur gazier de l’Italie.
Cette relation étroite s’inscrit également dans le cadre du Plan Mattei, une stratégie italienne de reconquête économique en Afrique.
En avril 2025, Claudio Descalzi, PDG d’Eni, a annoncé 24 milliards d’euros d’investissements sur 4 ans pour la Libye, l’Égypte et l’Algérie – soit 8 milliards chacun.
Un engagement justifié par une croissance interne de la demande estimée à 7–8 % par an dans ces pays.
Un avenir à l’ombre du carbone ?
Malgré ses engagements en faveur de la transition énergétique, Eni reste structurellement dépendante des recettes fossiles africaines.
Un paradoxe souligné par la publication de ces chiffres : la rentabilité actuelle est assurée par des actifs carbonés, alors même que le continent africain subit déjà les premiers chocs climatiques.
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Pour pallier cette tension, Eni développe plusieurs projets solaires en Algérie, notamment à Bir Rebaa North, et envisage un projet pilote dans l’hydrogène vert, en lien avec les autorités algériennes.