Cette question bien des Algériens vont se la poser en prenant connaissance des déclarations de la Haut commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Mme Navanethem Pillay.
Cette dernière, en visite en Algérie avait affirmé lundi en présence de Mourad Medelci la chose suivante: « Je suis particulièrement ravie de vous annoncer qu’un groupe de travail (de l’ONU) sera reçu prochainement à Alger pour évoquer la question des personnes disparues, durant la décennie noire qu’avait connue le pays dans les années 1990 ».
Elle a aussi ajouté qu’elle est venue pour vérifier si l’Algérie est en conformité avec les droits de l’homme par rapport à ce qui se passe dans le monde, ajoutant qu’elle s’enquerra sur les questions de liberté d’expression et d’association, de lutte antiterroriste et des personnes disparues.
Les propos de Mme Navanethem sont pour le moins surprenants, car pour les autorités algériennes, la question des personnes disparues pendant la décennie noire, tout comme celle des victimes du terrorisme sont définitivement tranchées par la charte pour la réconciliation nationale. Cette charte pour rappel est adoptée en février 2006 par référendum par une majorité d’Algériens, dont le vote exprimait alors un désir de tourner définitivement la page du terrorisme.

C’est ce que maître Farouk Ksentini a rappelé mardi dans une déclaration au journal Liberté. « Pour la Commission, le dossier des disparus est définitivement clos, ils font partie des victimes de la tragédie nationale. Leurs familles ont été indemnisées et puis il y a eu un référendum (février 2006) sur la charte pour la réconciliation nationale et ses dispositions ont force de loi qu’on doit appliquer », a-t-il précisé.
Tout en rappelant cette position de principe, le premier responsable de la commission de protection et de promotion des droits de l’homme s’est montré ouvert pour d’éventuelles discussions avec des organisations des droits de l’homme.
«Nous sommes obligés de discuter avec nos partenaires onusiens ; nous allons leur expliquer ce qu’on a fait par rapport à la question des disparus, ce qu’on peut encore faire et ce qu’on ne peut pas faire ». Et tout en considérant le dossier des disparus «définitivement clos», le président de la commission nationale des droits de l’homme est « favorable à la réhabilitation de la mémoire des disparus pour ne pas les confondre avec les terroristes».
Maitre Ksentini est également pour l’utilisation de l’ADN pour « l’identification des victimes enterrées sous X (plus de 3.000, selon lui) pour permettre à leurs familles de faire le travail de deuil».
Si la position de Ksentini, en affichant à la fois fermeté et souplesse, est compréhensible, celle des autorités algériennes l’est moins. Car jusque-là, aussi bien au niveau des organisations internationales qu’en Algérie, à l’occasion de visites des responsables étrangers, l’Algérie s’est toujours montrée ferme sur cette question qui fait partie des plaies encore ouvertes de la tragédie nationale.
Qu’est ce qui a changé entre temps pour qu’aujourd’hui le ministre des affaires étrangères annonce à Mme Navanethem Pillay que l’Algérie acceptait ce groupe de travail ? Est-ce la perspective des discussions à Genève sur la situation des droits de l’homme dans le monde et donc en Algérie ? Ou alors d’un recul de l’Algérie face à la pression des organisations internationales ?