Dans cet entretien accordé à L’Expression, l’ex-international algérien, Lakhdar Belloumi, qui n’est pas à présenter, lui qui a fait les beaux jours de l’Equipe nationale et de plusieurs clubs algériens dont le GS Mascara, le MC Oran et le MC Alger, revient sur la prochaine sortie des Fennecs.
Le Ballon d’or africain estime que les Verts se doivent de gagner ce match contre la République centrafricaine pour redonner un peu de crédit au football national. Belloumi a également donné son avis sur l’absence du «produit local» en Equipe nationale. Appréciez plutôt.
L’Expression: Comment voyez-vous cette dernière sortie des Verts dans ces éliminatoires de la CAN 2012?
Lakhdar Belloumi: Sans pression, les Verts se doivent de gagner ce match. Il y va de la crédibilité du football national. C’est vrai que pour la qualification à la phase finale de la Coupe d’Afrique 2012 les jeux sont faits et nous sommes éliminés. Et compte tenu du fait que les joueurs doivent une revanche aux Algériens, une victoire est donc impérative pour ne pas dire obligatoire. Car cela permettra non seulement de remonter le moral des troupes mais surtout ce sera pour eux l’occasion de montrer à Halilhodzic qu’il pourra bien compter sur eux à l’avenir. Ce match, qui coïncide avec le début de saison, est une très bonne opportunité pour l’entraîneur de l’Equipe nationale de tester les joueurs sur des matchs officiels pour mieux les connaître et surtout jauger leurs performances et leurs limites.
Que pensez-vous de l’adversaire des Verts?
A bien voir, cette équipe de la République centrafricaine, je dirais qu’elle n’est pas vraiment celle qui va remettre en question la valeur de l’Equipe nationale algérienne. C’est une équipe largement à la portée de nos joueurs. Cette formation a tout à gagner dans ce match puisqu’elle ne s’est jamais qualifiée à une phase finale de la CAN et si elle ne l’est pas une fois de plus, ce ne sera pas un drame pour elle. Par contre, la nôtre, je dirais que c’est grave alors qu’on constate qu’une sélection nationale mondialiste n’arrive même pas à se qualifier à une phase finale d’une Coupe d’Afrique.
De plus, même si les Centrafricains feront un bon résultat à Alger, ils doivent attendre celui de l’autre match entre le Maroc et la Tanzanie chez le premier nommé pour se fixer. Et je vois mal le Maroc perdre ce match de qualification face à la Tanzanie, chez lui en terre marocaine.
Pour revenir au match contre la République centrafricaine, j’espère que les joueurs algériens honoreront leur statut de Mondialistes et là, je demande au public de venir les soutenir comme il l’a toujours fait. C’est-à-dire qu’il soit fidèle à ses valeurs quand il s’agit des couleurs nationales.
Quel est votre avis sur la politique de rajeunissement que mène Halilhodzic chez les Verts?
Eh bien, je dirais que c’est ce qu’il fallait faire il y a longtemps. Les joueurs de l’Equipe nationale algérienne n’ont plus rien montré depuis la Coupe d’Afrique en Angola et le Mondial 2010. Il devrait y avoir des changements au fur et à mesure. Si cela s’était effectué, on n’en serait pas là. C’est une sorte de perte de temps. Le nouveau coach vient de prouver qu’il est là pour aider les joueurs et en particulier les locaux en leur donnant une chance en sélection nationale. C’est donc à ces jeunes de prouver au coach qu’il ne s’est pas trompé sur leur compte en montrant ce dont ils sont capables.
C’est donc aux joueurs de saisir cette opportunité pour gagner la confiance du coach national. Et là, je parle y compris des anciens joueurs et non pas seulement les nouveaux. Car Halilhodizic vient de montrer qu’il n’y a pas de joueur indispensable. Miser sur les jeunes est une priorité et c’est un gage de réussite future. Les anciens joueurs qui ne donnent plus le rendement escompté, se doivent de se remettre en cause d’une part et de se remettre au travail pour regagner leur place car rien n’est acquis d’avance en Equipe nationale à vrai dire.
Comment expliquez-vous la non-émergence des joueurs locaux comme ce fut le cas à votre époque?
C’est très simple, c’est le côté financier qui joue un rôle négatif pour l’émergence des joueurs locaux et surtout leur exportation. D’autre part, il faut savoir que les clubs ne programment plus la formation.
C’est le point le plus important qu’il faudra mettre en place. Il est temps de s’occuper très sérieusement de la formation dans notre pays et ne plus se contenter uniquement d’en parler. Il faut passer à l’acte. Et là, je ne parle pas uniquement de la FAF ou du ministère, mais de toutes les personnes concernées de près ou de loin par notre football. Les joueurs, les entraîneurs et les présidents de club n’ont d’autres soucis que de parler argent. Et le résultat est là!
Quand je vois une équipe comme la JSK se faire éliminer sans gloire dans une Coupe africaine avec 5 défaites, cela fait vraiment mal. Ça démontre que le processus de la professionnalisation du football algérien n’est pas encore sur de bons rails. Il va falloir se mettre au travail et penser d’abord formation» pour assurer l’avenir de notre football. C’est la jeunesse qui est le gage de cet avenir et de l’avenir de notre sport en général. Les joueurs algériens ne travaillent plus. Ils négocient pour l’argent et ne pensent qu’à ça. Ce qui explique qu’ils ne font point d’efforts pour assurer leur place dans leurs clubs respectifs puisqu’ils sont titulaires alors qu’ils ne remplissent pas le critère d’internationaux.
Un joueur doit travailler dans son club et s’il est en sélection nationale ce n’est pas pour apprendre justement, mais pour donner. Or, c’est presque le contraire qu’on constate. C’est la raison pour laquelle il faudrait nécessairement changer la manière de travailler et d’opérer le professionnalisme dans notre pays. La production au sein de l’Equipe nationale est donc tributaire du travail du joueur en club et pas l’inverse. Donc, tant que nos clubs ne reviennent pas à la formation des jeunes, on ne pourra parler d’avenir de notre football tout court.
On vous laisse le soin de conclure.
J’espère vraiment que l’Equipe nationale algérienne gagnera ce match contre la République centrafricaine avec l’art et la manière. D’autre part, je souhaite vivement que tout un chacun commence à travailler effectivement pour assurer une bonne formation à nos jeunes. C’est une condition nécessaire pour développer notre football et le remettre à la place qui lui sied.