La Cour suprême doit en principe statuer sur la criminalisation ou non de cette affaire dont l’examen peut être reporté à une date ultérieure, en raison de sa programmation avant la nomination, dimanche dernier, du nouveau premier président de cette instance, Slimane Boudi.
Il faut savoir que même dans le cas où la Cour suprême annulerait le verdict de la chambre d’accusation, le dossier ne fera pas l’objet d’une nouvelle enquête et retournera directement à ce niveau. La chambre d’accusation avait, rappelons-le, décidé de transmettre ce dossier au tribunal criminel.
Des prévenus, dont quatre en détention préventive depuis fin 2009, ont contesté l’arrêt rendu en novembre 2012 par celle-ci et introduit des pourvois en cassation auprès de la Cour suprême. Le juge avait criminalisé les faits retenus contre, notamment, les hommes d’affaires Mejdoub Chani et Addou Tadj, l’ancien directeur des nouveaux projets de l’Agence nationale des autoroutes, Mohamed Khelladi, et le directeur des nouveaux projets au ministère des Transports, Salim Hamdane, contre lesquels les délits d’“association de malfaiteurs”, “trafic d’influence”, “abus d’autorité”, “corruption” et “blanchiment d’argent” ont été retenus. Les cadres de l’État, eux, sont accusés de “corruption, trafic d’influence, perception d’indus cadeaux” et, pour certains, “d’abus d’autorité”.
Il s’agit, en l’occurrence, de l’ex-secrétaire général du ministère des Travaux publics, du chef de cabinet du ministre des Travaux publics, du DG de l’Algérienne de gestion des autoroutes et de l’ancien conseiller de l’ex-ministre de la Justice. Le responsable de la société chinoise, Citic-CRCC est aussi inculpé pour “trafic d’influence”, “corruption” et “participation à dilapidation de deniers publics”.
Quant à la société japonaise Cojaal, il n’a retenu contre elle que la “complicité dans la dilapidation de deniers publics” et “remise d’indus cadeaux”. La défense s’étonne de voir l’instruction s’achever avec la criminalisation de ce dossier et, pour la première fois, l’inculpation pour corruption de l’ensemble des sociétés étrangères — deux agissant dans la réalisation de l’autoroute et quatre autres dans le domaine du transport public — en tant que personnalité morale, sans que le juge procède à l’audition de certaines hautes personnalités citées dans cette affaire, en l’occurrence Pierre Falcone, le trafiquant d’armes, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, et le Franco-Algérien nommé Sacha qui aurait joué le rôle d’intermédiaire dans l’obtention de certains marchés.
Pierre Falcon, ce Franco-Angolais-Brésilien, est pourtant présenté par l’enquête de la Police judiciaire comme étant celui qui a introduit les Chinois en Algérie en usant de ses relations avec les dirigeants algériens, notamment des ministres, dont Mohamed Bedjaoui, auquel il aurait rendu visite lorsqu’il était en poste à l’Unesco, en France.
Selon, les déclarations de Madjdoub Chani, Falcon assumait le rôle d’intermédiaire entre la chinoise Citic-Crcc et les autorités algériennes. Le premier arrêt ordonnait aussi au juge d’instruction de procéder à une enquête complémentaire pour la vérification des mouvements des fonds de comptes de l’homme d’affaire algéro-luxembourgeois, Chani Mejdoub, en Autriche, et de contrôler la gestion administrative et financière de sa société de cosmétiques domiciliée à Alger.
Ce qui aurait constitué un précieux complément d’information judiciaire. Il faut savoir aussi que ce dossier repose sur la seule plainte de l’ex-ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, contre l’ancien directeur des nouveaux projets de l’Agence nationale des autoroute Mohamed Bouchama qui a fait éclater ce scandale. Amar Ghoul ne s’est pas constitué partie civile et la justice n’a pas jugé utile d’ordonner une expertise sur le préjudice causé à l’État. Décidément, plusieurs années après son éclatement, l’affaire de l’autoroute Est-Ouest laisse beaucoup de zones d’ombre.
N. H