Le milieu de terrain du Racing Club de Santander, Mehdi Lacen, à qui nous avons rendu visite juste après son premier match avec les Verts, a bien voulu répondre à nos questions et éclaircir quelques sujets.
Sur son émotion de jouer pour la première fois pour l’Algérie et sur ce qu’il a vécu avec les Verts, sur son avenir et sa relation avec les joueurs, Lacen dit tout.
Voilà c’est fait, Lacen est venu en Algérie, il a répondu à l’appel de l’EN et a joué avec les Verts. Dites-nous comment avez-vous vécu tout cela ?
Comme je l’ai toujours dit, je suis très content d’avoir été en Algérie, je suis fier d’avoir découvert le pays d’où est originaire mon père. De pouvoir jouer pour mon pays et dans un stade aussi magnifique. Tout simplement, je suis fier d’avoir vécu tout cela. J’espère qu’il y aura une suite à l’avenir.
Parlez-nous de ce sentiment à l’instant où on vous a offert le maillot de l’équipe nationale pour le porter officiellement et jouer avec ?
Il y avait de la fierté. C’est vraiment une fierté de porter les couleurs de l’équipe nationale. C’était quelque chose de spécial, il s’agissait de défendre les couleurs de mon pays. Ce furent des moments importants pour moi.
Vous avez mis les pieds pour la première fois en Algérie, mais c’était un séjour très court…
Oui, c’était vraiment court. Surtout que je suis arrivé au stage en retard par rapport au groupe à cause du match que j’avais joué le dimanche précédant mon arrivée. Pour mes premiers pas, ça m’a permis de connaître tout le monde dans l’équipe nationale, même si je les connaissais avant, mais être tout près, c’est important et quelque chose de bien. Cela m’a permis aussi de connaître l’ambiance dans le groupe, on m’en a parlé, la vivre, c’était une découverte pour moi. C’était une belle surprise de savoir qu’il y a vraiment une belle ambiance dans l’équipe nationale. J’ai eu l’occasion de le vérifier, ça s’est passé super bien.
Votre venue en équipe nationale avait fait tellement de bruit qu’on a senti tout le contraire lorsque ça a été fait, c’était aussi simple qu’on l’imaginait, est-ce votre sentiment aussi ?
Moi, ce que j’ai toujours dit, ce n’était pas un événement pour moi personnellement, pour la simple raison que je connaissais pratiquement tous les joueurs bien avant. J’ai vu pratiquement tous les matchs de l’Algérie, j’ai eu l’occasion aussi de voir les joueurs évoluer dans leurs clubs respectifs, que ce soit en Allemagne, en Angleterre ou ailleurs. Contrairement à eux qui ne me connaissaient pas ou alors ne m’ont pas vu jouer, parce que cela fait un bon moment que je suis en Espagne. Ce que j’ai toujours dit, j’ai essayé d’intégrer le plus normalement du monde le groupe, je pense que ça s’est plutôt bien passé. Je me suis bien entendu avec tous mes coéquipiers, j’ai eu l’occasion de parler avec tout le monde. Franchement, je suis content même si cela devait s’arrêter là ou qu’il n’y aurait pas de suite. Au moins, j’ai retenu quelque chose de bien.
Plus exactement, quand est-ce que ça a été décidé pour vous de venir en EN ?
Pour moi, c’était clair depuis un bon moment déjà. Si j’ai fait les démarches pour avoir mon passeport, c’est bien pour quelque chose, puis après, j’en ai parlé aussi avec Yazid Mansouri. Ça aurait été peut-être plus facile pour moi et pour l’équipe d’arrêter de parler de moi ou d’avoir été à la CAN. Mais ce que j’avais dit, il fallait que je reste, il y avait ma femme qui allait accoucher, ce n’était pas facile pour moi. Mais est-ce que ça aurait été plus facile pour moi d’intégrer le groupe à ce moment-là ? Je ne sais pas, ça s’est passé ainsi. J’espère que j’aurai la chance de retourner en sélection pour continuer à m’intégrer le mieux possible.
Le fait d’avoir raté la Coupe d’Afrique vous donne quelques regrets, selon ce que vous dites…
J’aurais aimé participer à la Coupe d’Afrique, mais c’était à cause des raisons que je viens d’évoquer. Surtout pour l’intégration dans le groupe, c’est vrai que ça aurait été plus facile pour moi de me sentir plus dans le groupe, parce que dernièrement ça a été très rapide, tout s’est passé vite, deux jours avec la sélection, c’est rien. Si j’avais fait un mois avec la sélection, ça aurait été mieux pour moi, j’aurais connu beaucoup mieux tous les joueurs.
Justement, y aura-t-il une suite à tout cela et est-ce qu’on reverra encore Lacen avec les Verts, d’autant que vous évoquez le doute ?
Je pense que cette question ne m’est pas destinée. Ce n’est pas à moi de décider si je reviens ou pas, je pense que la réponse est chez le sélectionneur national, c’est à lui de voir si je reviendrai ou non. En ce qui me concerne, il m’a appelé pour cette rencontre contre la Serbie, j’ai joué titulaire. J’ai essayé de faire mon match. Après, on a lourdement perdu. Moi, j’ai essayé de faire ce que je pouvais, maintenant c’est au coach et au staff technique de voir si je peux apporter quelque chose pour l’équipe nationale ou non. En tous les cas, s’il a besoin de moi, je suis disponible.
Souhaitez-vous revenir ou non ?
Evidemment, je ne peux pas dire que mon souhait est de ne pas revenir. Maintenant que je suis en sélection, je ne peux pas dire que je veux partir, ce n’est pas logique. Tout ce je peux dire, c’est que je reste sélectionnable.
Le fait d’être avec la sélection vous donne-t-il plus d’envie et plus de curiosité pour mieux connaître et intégrer le groupe ?
Oui, j’aimerais bien, j’aurais même souhaité que le stage qu’on a fait continue. J’ai passé de bons moments en équipe nationale. A mon avis, les choses vont évoluer, c’est ce qui s’est passé lorsque j’ai intégré le Racing Club de Santander. Je ne connaissais personne au début, mais après les choses ont changé et je me suis bien senti dedans. On ne peut pas connaître des gens sans passer du temps avec eux.
Parlons du match que vous avez joué contre la Serbie, vous attendiez-vous à ce que vous soyez titulaire ?
Je ne vous le cache pas, je ne m’attendais pas à jouer titulaire. Je pensais que le coach me mettrait remplaçant et me ferait rentrer en cours de jeu. Il m’a titularisé, c’était une belle surprise pour moi.
C’était justement la première fois où l’entraîneur Saâdane incorpore 3 milieux récupérateurs à la fois. A la surprise générale, personne ne s’attendait à vous voir, vous, Mansouri et Yebda en même temps…
Ça, je ne le sais pas si c’est une surprise ou non. Je ne peux pas le dire. En tant que joueur, j’applique les directives de mon coach et la tactique qu’il nous demande de suivre.
Mais à un moment donné, vous ne vous êtes pas senti encombré par ce nombre de joueurs au milieu du terrain ?
Non, ce n’est pas le cas. A mon avis, l’équipe a un style de jeu particulier. Elle aime bien garder le ballon et le faire tourner. Avec trois joueurs au milieu, cela donne plus de solutions pour conserver le ballon. Le seul souci qu’on avait est qu’on avait laissé un seul joueur en avant. Après quand on attaque, si le milieu ne monte pas pour aider l’attaquant, ça laisse des lacunes derrière. Mais il faut dire que le coach a essayé quelque chose. C’est bien, ça ne veut pas dire qu’il gardera cela ou alors qu’il changera. Cela fait partie des prérogatives du coach.
Techniquement parlant, comment avez-vous senti le jeu avec ce système?
C’est un système comme un autre. C’était Yazid et moi comme récupérateurs et Yebda en numéro 10. Dans un match, ça peut tourner, ça peut aussi évoluer. Comme Nadir Belhadj aime bien monter, donc, il faut une couverture derrière. Par rapport à moi, c’était trop court de jouer, de faire monter une tactique. Je pense qu’il faut des stages plus longs, parce que ce qui s’est passé avec la Serbie, c’était : on est arrivés, on a joué le match et on est repartis.
Même si le résultat de la rencontre est aussi décevant, vous avez dit que c’était un match de préparation et qu’il y avait des choses plus importantes à voir…
Il faut dire que là, dans le match lui-même, la Serbie était plus forte. C’est une très belle équipe et ce n’est pas pour rien qu’elle a fini devant la France dans leur groupe de qualification au Mondial. Je dirai même que les Serbes peuvent créer la surprise en Coupe du monde s’ils arrivent à avoir tous leurs joueurs avec la forme qu’il faut. Je dirai que c’était malheureux pour nous de perdre par 3 à 0 devant notre public qui est venu nombreux nous encourager. Après tout, ce n’est pas ce qui est le plus important, même si on aurait préféré gagner.
Vous sentiez vraiment que vous étiez inférieurs à la Serbie ?
On ne peut pas comparer parce qu’il leur manquait des joueurs, nous aussi, l’état de la pelouse aussi ne nous a pas facilité la tâche.
Il y avait des joueurs importants qui manquaient dans l’effectif des Verts, c’est peut-être cela qui a faussé un peu vos calculs ?
Là n’est pas la question. Il manquait des joueurs, ça arrive, il ne faut pas se cacher derrière non plus. On a essayé, par contre, de faire du mieux ce qu’on pouvait, mais la défaite contre la Serbie n’est pas là pour remettre en doute le niveau de l’Algérie. Il ne faut pas oublier que cette équipe s’est classée 4e en Coupe d’Afrique des nations, chose qui n’est pas mal du tout, plus une qualification au Mondial. A mon avis, même si on a perdu par 3 à 0, ce n’est pas ce qu’il y a de plus grave.
Cette rencontre n’était-elle pas particulière pour vous, du fait que vous étiez l’élément nouveau de l’effectif et que vous étiez sous les feux de la rampe…
Je l’ai toujours dit, il ne faut pas s’attendre à ce que je sois un Zidane sur le terrain. Je l’ai dit au premier jour où on m’avait demandé de jouer et je le redis pour 10 ans encore. Je suis un milieu récupérateur.
Ça veut dire que je ne vais pas faire 10 passements de jambes, des petit-ponts ou des roulettes ou alors mettre des buts dans la lucarne. Donc, moi, si j’apporte quelque chose à l’équipe, ça sera dans la récupération des ballons, le placement, le pressing, ressortir des ballons proprement, voici mon rôle. Je le répète, je ne suis pas Zidane, peut-être que les gens attendaient plus, je ne sais pas. Une chose est sûre, je ne me soucie pas parce que j’ai essayé de faire mon match.
Quels échos vous avez eus après le match de mercredi dernier ?
Je ne suis pas du genre qui cherche à savoir ce qu’on dit après les matchs, je n’ai même pas vu la presse du lendemain. Ce n’est pas mon souci.
Ça vous étonnerait si on vous disait que la majorité du public qu’il y avait contre la Serbie était curieuse de vous découvrir ?
C’est une fois sur le terrain que je me suis rendu compte des objectifs des appareils photos, les cameras qui étaient braqués sur moi et le public qui scandait mon nom. Mais après, je n’ai pas senti de pression, au contraire, j’ai tâché surtout d’accomplir mon devoir sur le terrain convenablement.
Avec l’équipe nationale pour la première fois, vous avez certainement discuté et papoté avec vos coéquipiers, qu’est-ce qui a attisé le plus votre curiosité ?
Non, rien de particulier pour moi. Ça s’est passé le plus normalement du monde, c’est comme dans un groupe, j’ai parlé avec certains joueurs de certaines choses, avec d’autres, d’autres choses, mais sans particularité ou curiosité aucune. Je ne suis pas venu avec un questionnaire et commencer à poser des questions, non, c’était au feeling.
Depuis que votre nom est évoqué avec les Verts, on n’arrête pas de poser la question de la concurrence entre vous et Mansouri.
Maintenant que vous êtes dedans, parlez-nous de cela ?
Franchement, ce qui se dit à ce propos c’est du n’importe quoi. Tout ce qui se dit, c’est de la connerie. En plus, je ne sais même pas pourquoi, parce que cela fait mal à l’équipe. Avec Yazid Mansouri, j’ai parlé de ça, il m’a dit que tout ce qui se dit est faux. Je le crois, parce qu’il m’a bien accueilli. Il a tout fait pour que je me sente bien et que je ne manque de rien avec la sélection. Il est venu me voir avant de partir, c’était toujours le premier qui me demandait : est-ce que ça allait bien. Donc, je ne vois pas où ce trouve cette rivalité entre Yazid et moi et dont les gens parlent.
C’est bien de l’expliquer, alors…
Moi, ce que les gens pensent je le respecte. Ceux qui m’ont mis en concurrence avec Yazid n’ont pas aussi tort, parce qu’on joue au même poste. Mais pas dans le sens où je viens en équipe nationale et que je dise : je veux jouer titulaire ou je veux la place de Mansouri. Moi, si la situation voudrait que je parte en Coupe du monde et que je joue 0 minute, je l’accepterai. Je n’ai aucun statut pour revendiquer quoi que ce soit.
Tenez-vous à participer à cette Coupe du monde…
Comme je vous l’ai expliqué, si dans deux mois l’entraîneur décide de ne pas m’appeler, je ne vais y participer de force. Et s’il jugera que je serai utile, je serai alors présent, c’est aussi simple que ça.
Vous n’avez pas parlé avec Saâdane d’une éventuelle prochaine sélection ?
Non, pas du tout.
Vous avez contracté une blessure avec l’EN, qu’en est-il au juste ?
On m’a écrasé le pied au point de soupçonner une fracture au niveau de l’orteil, mais finalement ce n’est pas le cas. Ça me fait un peu mal, mais je vais essayer de faire avec, parce qu’on a un match de championnat à jouer. J’espère que d’ici là ça ira mieux.
Comment ça a été l’accueil pour vous ici à Santander après votre retour de sélection ?
On parlait un peu avec mes coéquipiers, qui m’ont demandé comment ça s’est passé pour moi, mais sans plus. Je veux dire qu’il n’y avait pas un tapage médiatique autour de cela. Ici, la vie du club continue.
On a parlé avec votre entraîneur, il était content pour vous…
Sincèrement avec mon coach, je n’ai pas encore parlé, mais puisque vous le dites, je dirai que c’est gentil de sa part et surtout très encourageant.
A. I.