La situation sécuritaire instable de la Tunisie depuis la révolution du Jasmin a durement impacté le secteur du tourisme, principale source de devise du pays et qui représente environ 7% du produit intérieur brut (PIB).
Selon le ministère du Tourisme tunisien, la baisse de l’activité touristique est de 26 %. Quant aux données publiées par l’Office de l’aviation civile et des aéroports (Oaca), elles révèlent que le trafic aérien des voyageurs dans les aéroports tunisiens a reculé de 21,5% pour s’établir à 3.768.000 voyageurs, contre 4.798.000 voyageurs au cours de la même période de 2014. Tunis est triste pour ses touristes. Mais elle ne veut pas s’avouer vaincue. Comme alternative, elle propose le tourisme médical. Elle a des atouts à faire valoir dans ce domaine. Les Tunisiens parlent d’une médecine qui est réputée pour sa qualité et son accessibilité. Des plateaux médicaux à la technique de pointe permettent aux praticiens d’assurer des soins performants dans des conditions optimales de sécurité et d’hygiène et avec un taux de réussite très élevé dans les interventions. Ces atouts ont fait mouche d’autant que le pays dispose d’environ 40.000 sites touristiques éparpillés sur tout le territoire.
L’objectif…
« Nous avons des équipes de médecins et de cadres qui se déplacent à l’étranger pour signer des conventions et faire des propositions concernant à la fois les programme de soins et le tourisme, notamment pour les gens qui ne connaissent pas la Tunisie », précise Bilel Zakhama. Pour lui, cette démarche vise un double objectif : promouvoir le système de santé tunisien et, par ricochet, le tourisme. Une combinaison qu’il juge très importante pour son établissement. Même topo à la clinique El Yosr, dont la directrice administrative et financière, Rym Banni, indique que l’établissement propose un package spécial aux patients qui comprend les frais des soins et ceux post-opératoires en leur assurant des prestations hôtelières confortables grâce à des conventions avec des hôtels pour pouvoir bénéficier de tarifs préférentiels. « Nous veillerons à ce que le séjour des patients soit confortable pour lui permettre de passer dans la sérénité le moment de son hospitalisation », souligne la directrice administrative. La clinique El Yosr est située au cœur de Sousse. L’établissement regroupe plusieurs spécialités, entre autres, la chirurgie plastique et esthétique, la chirurgie générale et digestive, la chirurgie de l’obésité, l’ophtalmologie et la neurochirurgie.
« Pas très sérieux comme concept ! »
En revanche, certaines cliniques ne pratiquent pas le tourisme médical. C’est le cas de Soukra, spécialisée dans la neurologie, la médecine physique et rééducation et réadaptation fonctionnelle. Son président du conseil d’administration, Rachid Manai, estime que le tourisme médical est un concept « pas très sérieux ». Même s’il trouve l’idée ingénieuse, M. Manai observe que les patients veulent avant tout se soigner. Pour lui, le travail le plus réfléchi à faire serait d’« encadrer » et d’« organiser » ce domaine.
200 millions de centimes
La visite des cliniques privées au pays du Jasmin permet de constater leur développement incontesté sur le double plan sanitaire et infrastructurel. Ces établissements disposent de plateaux techniques à la pointe de la qualité et de la modernité. Mais cela sera-t-il suffisant pour séduire les patients étrangers ? Le pari n’est pas gagné d’avance.
Rencontré lors d’un point de presse organisé par la ministre tunisienne du Tourisme, un journaliste burkinabé a fait savoir que seuls les soins intéressent ses compatriotes. « Les Tunisiens ont des infrastructures de santé très pointues que nous n’avons pas chez nous. Ils ont un savoir-faire reconnu. Si les Burkinabè viennent ici, c’est pour se faire soigner et non pour faire du tourisme », souligne-t-il. Et puis, il y a la volonté et l’engagement des établissements de santé pour ce type de prestation. Le tourisme médical n’est pas pratiqué au niveau de certaines entités et est timide au niveau des autres. Les tarifs des soins risquent eux aussi de dissuader les patients avant même de penser à faire du tourisme. Témoignage : « Les prix sont inaccessibles pour les simples citoyens. J’ai déboursé la somme de 200 millions de centimes pour pouvoir me soigner ici », indique un Algérien natif de Bordj Bou Arréridj.