En moins de 24 heures, le paysage politique tunisien a connu une nouvelle configuration.
Les événements se sont accélérés en Tunisie au point qu’ils ont pris de court tout le monde. En moins de 24 heures, la scène politique tunisien a connu un véritable rebondissement. Le pouvoir en place a été déchu.
Le président Ben Ali a quitté le pays. Mohamed Ghannouchi, Premier ministre sortant, a été nommé vendredi président par intérim. Un choix rejeté par les Tunisiens. Ces derniers ne se sont pas contentés du départ de Zine El Abidine Ben Ali. Le changement revendiqué a touché même son Premier ministre. Des manifestations et des marches avaient débuté dans des villes de province pour réclamer le départ de M.Ghannouchi. L’opposition a jugé la nomination de ce dernier président par intérim comme étant une violation de la Constitution. Car, la nomination de M.Ghannouchi, en vertu de l’article 56, laissait la porte ouverte à un retour au pouvoir de M.Ben Ali.
C’est une situation contestée aussitôt par des juristes et l’opposition. Des milliers de personnes sont sorties dans les rues pour demander son remplacement par le président du Parlement, et ce, conformément à la Constitution. Une revendication validée rapidement par le Conseil constitutionnel. Celui-ci a proclamé coup sur coup «la vacance définitive du pouvoir». De ce fait, c’est Foued Mebazaa, président de la Chambre des députés, qui a été nommé président par intérim.
S’appuyant sur les textes de la Loi fondamentale, dans son article 57 notamment, M.Mebazaa devrait annoncer la tenue des élections présidentielle et législatives dans un délai ne dépassant pas les 60 jours. Dans sa première intervention en tant que président de la République par intérim, Foued Mebazaa a affirmé que «tous les Tunisien, sans exception et sans exclusive seraient associés au processus politique». Il a promis de consacrer le pluralisme et la démocratie et de respecter à la lettre la Constitution. Outre la tenue des élections, les concertations se sont poursuivies dans la soirée d’hier dans l’espoir d’aboutir à un terrain d’entente en vue de la formation d’un gouvernement d’union nationale.
Des élections dans un délai de 60 jours
Le Conseil constitutionnel tunisien a proclamé «la vacance définitive du pouvoir» et la nomination de Foued Mebazaa, président du Parlement, au poste de président de la République par intérim. Ce dernier a ensuite prêté serment. Ce nouveau retournement de situation, fondé sur l’article 57 de la Constitution, est intervenu à la demande de Mohammed Ghannouchi, Premier ministre sortant, nommé vendredi président par intérim après la fuite de M.Ben Ali et qui ne sera resté que vingt-quatre heures à ce poste. L’article 57 fixe de manière précise la transition à la tête de l’Etat. Il prévoit des élections présidentielle et législatives dans un délai de 60 jours au maximum.
Selon les propos de M.Mebazaa, c’est le Premier ministre sortant, Mohamed Ghannouchi, qui est toujours chargé de former un nouveau gouvernement. Et d’ajouter que «l’intérêt supérieur du pays nécessite un gouvernement d’union nationale». Devant une vision politique ambiguë, les islamistes ne veulent pas laisser l’occasion leur filer entre les doigts.
Les dirigeants des partis politiques islamistes se disent prêts à reprendre leur activisme en Tunisie. C’est le cas de Rached Ghannouchi. Ce chef du parti islamiste tunisien Ennahdha, a affirmé, dans une déclaration à l’AFP, qu’il «prépare» son retour dans son pays. Il ne s’agit pas d’un retour pour marquer sa présence, mais pour négocier sa part du gâteau dans la formation d’un gouvernement d’union nationale. Cette annonce intervient au lendemain de l’annonce faite par Mohamed Ghannouchi qui avait déclaré que les opposants et exilés tunisiens étaient libres de rentrer au pays. Loin du climat électoral et du milieu politique, les nouveaux dirigeants tunisiens sont appelés à rétablir l’ordre dans la maison. L’urgence est de reprendre le contrôle de la situation dans le pays. Pour la simple raison que la Tunisie se trouve à un pas du chaos.
Les choses ont mal tourné. Elles ont pris une autre tournure. Selon les échos qui parviennent de Tunis, les manifestations ont provoqué dans la journée d’hier, d’énormes dégâts. La lutte sur le terrain est relancée entre les opposants et les partisans de l’ex-président Ben Ali. C’est ce qui a poussé l’armée tunisienne à recourir au contrôle aérien par hélicoptères.
La police a pour mission, de surveiler la capitale dans le but d’empêcher d’autres rassemblements de manifestants et d’éviter d’autres dérives. Les manifestants, selon les agences de presse, ont pris pour cible tous les biens qui appartiennent à la famille Ben Ali. Les destructions et les pillages survenus dans la capitale tunisienne et sa banlieue ont provoqué une situation d’angoisse au sein de la population locale. Afin de rétablir le calme, la police et l’armée s’en sont pris aux personnes encagoulées qui étaient derrière cette terreur.
Des militaires et des forces de sécurité ont arrêté dans la matinée des dizaines de présumés pilleurs et les ont embaqués dans des camions. Ces manifestations se sont déroulées en dépit de l’état d’urgence décrété dans des villes comme Sidi Bouzid, Kasserine, Gafsa et Regueb dans le sud et le centre ouest. A l’heure où nous mettons sous presse, les événements s’accélèrent. On ne sait pas de quoi sera fait demain…
Tahar FATTANI