Le gouvernement a les moyens de sa politique
Conforté par la faiblesse de ses interlocuteurs au patronat, fort du soutien de la Centrale syndicale, M.Sellal fera de cette tripartite une simple formalité.
Avec un matelas financier très confortable, face à un front social relativement apaisé et des organisations patronales disloquées, il faut dire que la tripartite, dont les travaux s’ouvrirent aujourd’hui au Palais des nations, ne sera qu’une simple formalité pour le gouvernement. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui ouvrira les travaux de cette tripartite, agira sans pression et s’adonnera avec joie au show médiatique qui accompagnera cet événement économique majeur. Grâce à la «baraka» du baril, le gouvernement est prêt à dégainer à tout moment avec son chéquier -gros comme ça- pour accorder d’autres largesses au front social. Les grèves de l’Etusa, de l’enseignement et les menaces d’Algérie Poste impriment au front social une légère vibration mais sans effets réels sur cette rencontre. Le gouvernement a les moyens de sa politique puisque pour cette année 2013, il attend un pactole d’exportation estimé à 70 milliards de dollars en 2013. Il n’y a pas d’inquiétude également du côté du patronat dont les demandes se limitent, globalement, à l’application des décisions prises précédemment du moment que le gouvernement a accédé à la plupart de leurs revendications dont, notamment les questions de fiscalité, du crédit bancaire et des échéanciers pour certaines dettes. La dislocation du patronat est un autre élément qui conforte le gouvernement qui fera face à un bloc uni, capable d’imposer et de défendre ses revendications. Il était attendu que le patronat se rende à cette tripartite fort d’une plate-forme de revendications étudiée et ficelée au terme d’une longue concertation. Or, coup de théâtre à la dernière minute. Miné de l’intérieur par des intérêts économiques, les appétits politiques, le choc des ego, et les démêlés personnels, le front patronal a volé en éclats. A l’isolement du FCE (Forum des chefs d’entreprise), le gouvernement trouve un nouvel interlocuteur dans la nouvelle coordination patronale créée par le puissant homme d’affaires, Abdelouahab Rahim, qui charrie dans son sillage pas moins de sept organisations patronales qui ont rejoint cette coordination. Ainsi, si l’on excepte l’Ugta qui a décidé de soutenir l’action de l’Exécutif, les partenaires traditionnels du gouvernement sont totalement affaiblis. Mais pour élargir sa base, le gouvernement a décidé d’associer d’autres organisations syndicales à cette tripartite. Il n’y a pas de cadeau à ce niveau de représentativité. Les nouveaux invités se doivent de soutenir les prochaines échéances électorales. C’est là peut-être qu’on peut trouver une explication politique à la déclaration faite par le Président Bouteflika qui a instruit le gouvernement de «la nécessité impérieuse, pour toutes les institutions de la République, notamment le gouvernement, d’être en permanence à l’écoute de la société et de développer les canaux appropriés de dialogue et de concertation avec l’ensemble de ses composantes». Le chef de l’Etat a souligné «l’importance de prendre, d’ores et déjà, toutes les mesures et dispositions nécessaires afin de permettre à notre pays d’aborder, dans les meilleures conditions, les prochaines échéances politiques». Le 2 octobre dernier, alors qu’il était en visite à Tébessa, le Premier ministre s’est cru obligé d’apporter une précision de taille: «Nous ne pensons ni à demain ni aux élections», a-t-il déclaré à partir de la tribune de l’Université de Tébessa devant les représentants de la société civile. On ne parle pas de la corde dans la maison d’un pendu. M. Sellal n’a-t-il pas délibérément poussé ces restructurations syndicales et patronales pour inscrire la tripartite dans la perspective de la présidentielle d’avril 2014? La question mérite d’être posée. Cela étant, la réunion d’aujourd’hui sera largement dominée par les questions économiques. L’agenda, surtout sur l’examen des moyens à même de consacrer le développement économique et de promouvoir les investissements en Algérie. Les représentants du gouvernement, de l’Ugta et les organisations patronales vont se pencher donc sur l’élaboration d’une charte contenant les grandes orientations de l’économie nationale. B. T.