La traite d’humains touche plusieurs pays africains

La traite d’humains touche plusieurs pays africains

Ce n’est pas uniquement en Libye que des migrants ont été vendus comme esclaves, mais également dans d’autres pays de l’Afrique de l’Ouest, principalement cinq, où une opération d’Interpol a permis de secourir pas moins de 500 personnes.

Menée par des policiers, l’opération Épervier, menée simultanément au Tchad, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Sénégal entre le 6 et le 10 novembre, a permis de porter secours à 500 personnes, dont près de la moitié sont des mineurs.

Cette vaste opération, révélée jeudi par Interpol, a notamment permis d’arrêter 40 trafiquants présumés, qui seront poursuivis pour “traite d’êtres humains”, “travail forcé” et exploitation d’enfants”.

Selon cette source, une Nigériane de 16 ans, qui s’était vu promettre un travail au Mali pour pouvoir envoyer de l’argent à sa famille, a été forcée à se prostituer par son “parrain” pour rembourser ses frais de voyage. L’autre exemple cité par Interpol est celui d’un jeune de 15 ans destiné au travail forcé qui était sur le point d’être vendu par des trafiquants mais qui “a pu être intercepté avant la fin de la transaction”.

Selon Interpol, qui n’a pas expliqué si la majorité des victimes était destinée à rester sur le sol africain ou à partir en Europe, les trafiquants arrêtés sont accusés d’avoir forcé les victimes à s’adonner à des activités allant de la mendicité à la prostitution. Conduite dans le cadre du projet Sahel, l’opération Épervier est une initiative financée par le ministère allemand des Affaires étrangères contre les réseaux de crime organisé impliqués dans la traite des êtres humains.

Elle a été coordonnée au niveau régional par des officiers d’Interpol à travers toute l’Afrique de l’Ouest, à partir du Cameroun et du siège de l’organisation internationale de police à Lyon (France).

Yoro Traoré, un inspecteur d’Interpol basé à Bamako, a affirmé qu’ “en plus des arrestations, cette opération a permis d’ouvrir un certain nombre d’enquêtes afin de perturber encore davantage les réseaux criminels impliqués dans la traite des êtres humains (…) ». Selon les experts, la lutte contre la traite des êtres humains ces dernières années s’est surtout focalisée sur les Africains de l’Ouest, la plupart des migrants sans papiers, qui tentaient d’atteindre l’Europe en traversant la Méditerranée. Mais les organisations criminelles organisent également des trafics d’êtres humains au sein du continent africain, profitant de la pauvreté généralisée et de la facilité à voyager grâce aux frontières poreuses et à l’existence d’un passeport commun de la communauté régionale ouest-africaine Cédéao.

Par ailleurs, les viols, les tortures et l’esclavage de milliers de migrants africains en Libye, dénoncés aujourd’hui à hauts cris par les dirigeants occidentaux et africains, étaient pourtant connus de longue date, ont souligné jeudi ONG et analystes, qui ont affirmé avoir tiré la sonnette d’alarme depuis des mois. “Hypocrisie”, car “à part le citoyen lambda, tout le monde savait, les gouvernants, les organisations internationales, les leaders politiques”, assène le Sénégalais Hamidou Anne, analyste du think tank L’Afrique des Idées. “Les prises d’otages, les violences, la torture, les viols, sont monnaie courante en Libye, et l’esclavage, on en parle depuis longtemps”, renchérit Alioune Tine, directeur Afrique de l’Ouest et du centre d’Amnesty international basé à Dakar. “En Libye, les Noirs n’ont aucun droit”, avait confié en septembre, à l’agence AFP, Karamo Keita, un jeune Gambien de 27 ans, rapatrié dans son pays.

Merzak Tigrine