La société civile s’organise autour de nouveaux projets fédérateurs,Exit les partis, bonjour le mouvement associatif

La société civile s’organise autour de nouveaux projets fédérateurs,Exit les partis, bonjour le mouvement associatif
la-societe-civile-sorganise-autour-de-nouveaux-projets-federateursexit-les-partis-bonjour-le-mouvement-associatif.jpg

Les partis sont-ils arrivés au terme de leur mission et leur impact sur la société s’est-il étiolé par la faute d’une pratique politique qui n’a pas réussi à gagner l’adhésion de larges couches de la société ?

Plusieurs observateurs de la scène politique et sociale algérienne sont unanimes à reconnaître que des mutations s’y opèrent. «L’heure de gloire a sonné pour le mouvement associatif qui doit jouer son rôle de fédérateur et surtout de moteur pour les prochains changements que connaîtra le pays», affirme un sociologue, enseignant à l’université d’Oran.

Un des animateurs du forum des associations d’Oran ne manquera pas pour sa part de rappeler, «que les associations qu’on avait confinées dans un rôle réducteur sont en train de s’affranchir pour devenir les véritables porte-parole d’une société en pleine mutation».

Pour lui, les changements qu’ont connus certains pays arabes et d’Europe sont le résultat d’un profond malaise social auquel les partis politiques n’ont pas réussi à répondre ni à trouver la panacée.

«La multiplication des réseaux sociaux et l’émergence de leaders de la contestation, inconnus, cooptés par les manifestants, sont un signe fort aux partis politiques sommés de quitter la scène. Cette mutation est mondiale et l’Algérie ne pourra pas y échapper,

les jours des partis politiques sont comptés. Il devient aujourd’hui nécessaire de refonder la loi sur les associations à caractère politique car sous sa forme actuelle, elle a donné naissance à des sigles rébarbatifs, des sectes et des groupes d’intérêt trop étroits», fera-t-il remarquer.

Pour lui, la commission Bensalah a reçu des associations et des organisations sociales. Au-delà de la volonté des décideurs à élargir le champ des consultations, cette façon de faire traduit une réalité devenue incontournable : la société civile s’apprête à s’organiser autour de nouveaux axes et de nouvelles idées. Fini le clivage gauche-droite né à la faveur des luttes ouvrières et de classes qui avait marqué le monde à la fin de la guerre froide. «Aujourd’hui, la mondialisation a généré de nouveaux concepts.

Depuis la ‘’trahison’’ de Daniel Cohn Bendit, issu des rangs des manifestants de mai 1968 en France, mais qui a tourné casaque pour épouser les idées des écologistes, les masses ont tourné le dos aux partis politiques. Solidarnosc qui est un syndicat ouvrier a offert Lech Valeza au soulèvement du peuple polonais. Après son accession à la tête de la présidence, il a perdu toute son aura.

C’est dire que les masses aujourd’hui veulent trouver un nouveau ciment et surtout de nouvelles idées et c’est ce qui explique l’émergence d’une foule d’associations aussi bien en Algérie qu’à travers le monde. Fini le rêve pour un monde utopique, les aspirations sont très terre à terre. Les partis politiques promettent le bonheur mais les associations le créent», fera remarquer notre interlocuteur.

Les associations, de porte-voix à porte-étendard

Le premier salon national des associations, organisé le 5 juillet dernier à Oran par l’association d’insertion et de promotion de la chanson oranaise, a montré la soif de la société civile de se doter de nouveaux canaux d’expression.

«Les partis politiques sont arrivés en fin de parcours et ils doivent muer sous peine de quitter la scène politique. Une association à caractère social ou caritatif mobilise plus qu’une formation politique. Lors des dernières élections communales, les candidats présentés, notamment par le FLN, issus des rangs des comités de quartiers ont remporté aisément les suffrages.

Il faut se rendre à l’évidence, la mondialisation a induit non seulement de nouveaux mais aussi de nouvelles formes d’organisation», dira M. Naceredine Touil, le président de l’association organisatrice. Les associations, aujourd’hui, ont commencé à quitter la sphère sociale pour devenir les véritables porte-parole et défenseurs des valeurs de la société.

«Le monde a changé et avec lui ont changé les aspirations qui ne peuvent plus être véhiculées par les partis politiques. Les peuples ont gravi de nouveaux échelons dans leurs aspirations qui sont souvent en totale contradiction avec les programmes défendus par les partis politiques.

Il reste comme unique alternative au soulèvement violent qui génère le chaos, le travail de sensibilisation des associations», fera remarquer le président d’une association. Dans ce contexte, le président de l’association de défense des droits des consommateurs à Oran estime que le travail de sensibilisation que mène son organisation est un combat politique.

«En sensibilisant les consommateurs sur les risques des intoxications, on leur apprend à bien consommer, à lutter contre la contrefaçon et à s’interdire les produits acquis auprès du marché informel. C’est une lutte qui aurait pu coûter trop cher et avec des résultats mitigés si elle était menée par un parti politique.

Notre action qui est sous sa forme apparente apolitique est politique de par son essence, car elle appelle à la moralisation du champ économique qui peut se faire sans une moralisation des capitaux investis et un assainissement des sphères de production, de distribution et de commercialisation», fera remarquer le président de cette association.

Elles sont budgétivores et ont un impact limité sur la société

Un responsable du bureau des associations d’une wilaya de l’ouest du pays avouera qu’en 1996, ses services comptaient pas moins de 1500 associations à caractère social culturel et sportif agréées. «Aujourd’hui et malgré la promulgation au début des années 2000 d’une loi de mise en conformité, leur nombre n’a pas diminué. Elles étaient toutes soutenues par des subventions issues du Fonds de wilaya.

Elles s’arrangeaient toutes pour présenter des bilans d’activité qui sont en réalité un tissu de mensonge. Seules quelques unes sont réellement présentes sur le terrain, les autres sont des regroupements d’amis qui profitent d’une manne tombée du ciel», dira notre interlocuteur. Pour lui, les pouvoirs publics mènent actuellement une véritable guerre contre les «associations alibis».

«Nous avons érigé des barrières pour exclure ceux qui profitent de la situation de confusion qui a régné jusque-là. La société civile veut choisir de nouvelles formes d’organisation.

C’est son droit le plus absolu et c’est un droit reconnu par le président de la République qui a initié les concertations pour engager une dynamique de changement. Le monde est en pleine mutation et les prochaines élections électorales sonneront la fin de la récréation pour les partis politiques, qui doivent changer sinon disparaître», précisera-t-il.

Par F. Ben