La « feuille de route » de l’Union Africaine, prévoyant un cessez-le-feu, acceptée la veille par le colonel Maamar Kadhafi a été rejetée par la rébellion lundi à Benghazi où s’est rendue la délégation mandatée par l’Organisation panafricaine pour tenter de convaincre les chefs de la rébellion d’adhérer au processus de paix. L’UA proposait la cessation immédiate des hostilités, un acheminement de l’aide humanitaire et le lancement d’un dialogue en vue d’une transition, mais pas le départ immédiat du colonel au pouvoir depuis plus de 40 ans et confronté depuis mi-février à une rébellion.
Le nœud du problème reste le cas du guide de la Jamahiria. Le peuple réclame le départ de Mouammar Kadhafi et de ses fils », a déclaré le chef du Conseil national de transition (CNT), Moustapha Abdeljalil après une rencontre à Benghazi (est), fief des rebelles, avec la délégation de l’UA. Seif al-Islam, fils de Mouammar Kadhafi, a prévenu que « parler du départ » du dirigeant libyen était « vraiment ridicule » même s’il a concédé que le pays avait besoin de « sang neuf », lors d’une interview accordée ce week-end à la télévision BFM TV et diffusée lundi. »Il ne veut pas tout contrôler, il est à un âge avancé. Nous voulons porter sur le devant de la scène une nouvelle élite, une élite de jeunes qui gouvernent le pays, qui gèrent les affaires locales. Nous voulons du sang neuf, voilà ce que nous voulons pour l’avenir de la libye.
Mais parler du départ du guide, c’est vraiment ridicule », a déclaré Seif al-Islam. Depuis le début de l’insurrection sans précédent contre Mouammar Kadhafi mi-février, « tout a changé » dans le pays, a poursuivi le fils du dirigeant libyen qui a été présenté comme un successeur possible à son père âgé de 68 ans.«La Libye future sera complètement différente de la Libye que vous avez connue jusqu’à présent, avec le guide, avec Seif, avec le peuple, avec l’est, avec l’ouest, avec le sud de la Libye nous sommes tous une famille unie et nous construirons une Libye nouvelle», a-t-il ajouté.
Mise en garde contre « une nouvelle Somalie »
Au lendemain de son échec à Benghazi, l’UA a lancé un appel pressant au CNT à coopérer pleinement, dans l’intérêt supérieur de la Libye. C’est ce que pense aussi l’ancien chef de la diplomatie libyenne Moussa Koussa, réfugié en Grande-Bretagne, a fait une déclaration à la BBC lundi dans laquelle il demande à « toutes les parties d’éviter d’entraîner la Libye dans une guerre civile », mettant en garde contre « une nouvelle Somalie ». Moussa Koussa s’était toutefois abstenu dans sa déclaration de mentionner le colonel Kadhafi, dont le départ est jugé indispensable par les pays membres de la coalition engagée en Libye sous mandat onusien. Critiquée pour sa lenteur, son inefficacité chronique et son silence depuis le début du conflit, l’organisation a cette fois fait preuve d’un vrai, selon un politoloque, « sens du timing », estime-t-il. « Tout le monde constate un risque d’enlisement. Il est aujourd’hui temps d’arrêter les bombardements et d’entrer dans la phase politique. La coalition a sauvé Benghazi il y a trois semaines, et depuis, plus rien. Les bombardements ne pourront pas durer encore plusieurs semaines. L’UA a quelques chances d’accélérer le processus de réflexion menant vers un processus politique, même si on ne peut pas exclure que certains nourrissent l’espoir de sauver Kadhafi. » De son côté, le Groupe de contact sur la Libye, mis en place à Londres fin mars, s’est réuni, hier, à Doha. Il comprend des pays occidentaux comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ou la France, des pays arabes notamment le Qatar, la Jordanie et le Maroc et des organisations internationales dont l’ONU, la Ligue arabe et l’Otan.
Par : Sadek Belhocine