Déjà fortement enlisé dans une inextricable crise, avec une autorité de transition affaiblie et une vaste partie du territoire livrée aux terroristes et aux narcotrafiquants, le Mali est soumis, depuis hier mardi, à une supplémentaire épreuve. La déposition du Premier ministre par l’omnipotent capitaine putschiste Amadou Haya Sanogo est venue, en effet, compliquer davantage la situation dans le pays.
Les Maliens, qui ne savent plus quelle solution à la crise qui secoue leur pays depuis plusieurs mois allait prévaloir, se sont réveillés ce mardi matin sur une mauvaise nouvelle : l’arrestation et le placement en résidence surveillée à son domicile à Bamako du Premier ministre Cheikh Modibo Diarra. La déposition qui dit bien son nom est l’œuvre du capitaine Amadou Haya Sanogo qui n’a plus besoin de breveter son diplôme de putschiste, puisqu’il a eu à opérer et réussir un coup d’Etat militaire en mars dernier contre le président Amadou Toumani Touré. Arrêté, le Premier ministre a été forcé d’annoncer sa démission ainsi que celle de son gouvernement. Chaud partisan d’une intervention militaire étrangère dans le Nord- Mali, Cheikh Modibo Diarra semble avoir fait les frais de cet engagement, le capitaine Sanogo compte, lui, parmi les ardents défenseurs d’une solution politique négociée.
La contrainte à la démission du Premier ministre malien est intervenue d’ailleurs à un moment de confluent politique, puisque la veille, le Conseil de sécurité de l’ONU, réuni au niveau ministériel, a préconisé la mise en pratique d’une approche globale, telle que formulée par l’ONU, dans la recherche de la solution au Mali. Mardi devait également se tenir la conférence nationale du dialogue intermalien pour définir les termes du processus de la négociation politique. La conférence est décalée.
Et cette nouvelle crise ouverte risque fort bien de la renvoyer à des dates plus ultérieures. Le renversement du gouvernement malien est survenu également le lendemain de la décision de l’Union européenne d’envoyer, début 2013, une équipée de 400 militaires pour aider à la formation de l’armée malienne déroutée et considérablement démoralisée après avoir été vaincue par les rebelles du Nord.
Cette formation que l’Union européenne s’est proposé de dispenser aux militaires maliens se veut être un prélude à l’intervention de la force africaine pour la reconquête des territoires du Nord. La démission sous la contrainte du gouvernement risque de chambouler l’équation à paramètres multiples déjà difficile à résoudre. Du moins, elle complique davantage la problématique dans un pays au bord du gouffre.
Ce qui est étonnant dans ce qui vient de survenir au Mali, c’est le silence bien gardé de la présidence, alors que la communauté internationale a réagi de manière prompte, à l’exemple de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton qui a souhaité la nomination rapide d’un nouveau Premier ministre consensuel. Elle a aussi appelé l’armée à cesser d’interférer dans la vie politique. Une dénonciation très diplomatique du putsch du capitaine Sanogo.
S. A. I.