L’existence d’un ou d’une amie pour un célibataire est plus un phénomène urbain (40%) que rural (18%). Les ruraux ayant légèrement plus tendance à se fiancer (16% en milieu rural contre 13% en milieu urbain), mais sans que la différence ne soit très marquée. Une différence importante existe entre la proportion d’hommes célibataires affirmant avoir une amie et celle des femmes célibataires affirmant avoir un ami.
Ce déséquilibre n’est compensé qu’en partie par le fait que le nombre de femmes célibataires affirmant qu’elles ont un fiancé est supérieur au nombre d’hommes célibataires affirmant avoir une fiancée. Une proportion relativement importante d’hommes semble donc soit sublimer
une relation avec une femme sans que cela ne soit partagé ou bien aurait une relation avec une personne non célibataire (veuve, divorcée ou séparée). Au total, 38% des hommes célibataires affirment avoir une amie contre 27% des femmes et 12% des hommes célibataires affirment être fiancés alors que les femmes sont 16%.
La décomposition par niveau d’instruction montre qu’avoir un ou une amie est beaucoup plus fréquent chez les personnes les plus instruites, ceci chez les hommes. Chez les femmes, ceci n’apparaît pas de manière nette.
Si on fait abstraction des analphabètes, on observe, en ce qui concerne les fiancé(e)s, aussi bien chez les hommes, un phénomène inverse du précédent.
C’est-à-dire que les fiancé(e)s semblent moins fréquents avec l’élévation du niveau d’instruction, faisant apparaître la présence d’un(e) ami(e) comme un substitut aux fiançailles.
A ceux qui ont un(e) ami(e) ou un(e) fiancé(e), nous avons posé la question s’ils ont des relations sexuelles ensemble (qu’ils se limitent à des baisers ou des attouchements ou que ces relations soient plus poussées). Pour 35% d’entre eux c’est le cas effectivement.
Ceci est valable que ce soit en milieu urbain ou en milieu rural et quelle que soit la tranche d’âge. On peut observer par contre que la tendance à avoir des relations sexuelles s’élève avec le niveau d’instruction.
On voit donc que le recul de l’âge au mariage s’est accompagné d’une relative libéralisation des relations hommes-femmes, d’une part à travers de simples relations d’ami ou d’amie, mais qui peuvent donner lieu à des rapports sexuels. C’est le cas aussi dans les relations entre fiancés.
Toutefois la manière dont sont vécus ces rapports sexuels dans une relation amicale ou en étant fiancés pose problème, dans la mesure où l’écrasante majorité des Algériens serait pour des rapports sexuels uniquement dans le cadre du mariage et pensent que la virginité avant le mariage est absolument indispensable.
La satisfaction sexuelle au sein du couple : les seuls insatisfaits se retrouveraient chez les plus jeunes et les plus instruits
A ceux qui sont mariés, nous avons posé la question s’ils sont satisfaits de leurs relations sexuelles au sein du couple. Il faut remarquer que la notion de satisfaction sexuelle n’a pas nécessairement de sens pour une partie de notre population.
En effet, la sexualité traditionnelle est en priorité dirigée vers la reproduction et de ce fait laisse le plaisir tiré de la sexualité dans le non-dit et même le non-nommé. C’est encore plus le cas pour la femme qui doit être soumise à son mari et dont la satisfaction sexuelle propre n’est pour ainsi dire pas envisageable, parce que potentiellement perturbatrice.
C’est à la lumière de ces remarques qu’il faut interpréter les résultats ci-dessous. 90% des personnes qui sont mariées actuellement affirment qu’elles sont satisfaites de leur vie sexuelle dans le mariage. La proportion est la même en milieu urbain et en milieu rural.
Par contre une première différence apparaît entre les hommes et les femmes : 94% des hommes interrogés disent qu’ils sont satisfaits contre 85% des femmes. La tranche d’âge des 18-24 ans se différencie très fortement des autres. Dans cette tranche «seuls» 68% des personnes interrogées disent qu’elles sont satisfaites contre 90% ou plus dans les autres tranches.
Enfin le niveau d’instruction semble ne jouer que faiblement, il faut signaler toutefois le cas du supérieur où le pourcentage d’hommes satisfaits est de 100% alors que la proportion de femmes de niveau supérieur satisfaites est de seulement… 58%.
Derrière la quasi-unanimité qui apparaît en premier apparaissent donc plusieurs dissonances : des jeunes d’abord, des femmes, des plus instruits.
La question de l’avortement : la très grande majorité est contre l’IVG élargie à tous les cas où la grossesse n’est pas désirée par la femme
Dans une vision moderne des rapports sexuels, la question de l’avortement est primordiale car la légalisation non conditionnée de l’IVG (interruption volontaire de grossesse) est une condition nécessaire pour que la femme puisse éviter toute grossesse non désirée.
L’opinion des Algériens sur l’avortement renseigne donc, elle aussi, sur leur modèle sexuel. La question posée était libellée ainsi : «Actuellement la loi permet l’avortement pour raison médicale ou en cas de viol. Pensez-vous qu’on devrait permettre l’avortement dans tous les cas où la femme ne voudrait pas d’une grossesse ?.»
Seuls 14% répondent, ici, par l’affirmative. Cette opinion apparaissant ainsi très largement minoritaire. Il y a une différence significative mais pas très importante entre le milieu rural et le milieu urbain : 17% acceptent la proposition en milieu urbain, contre 10% seulement en milieu rural. Mais l’écart le plus important se trouve entre les hommes et les femmes : ces dernières sont pour l’IVG sans condition à 25%, tandis que les hommes ne sont que 5% à être dans ce cas.
La position favorable à l’IVG sans condition ne semble pas dépendre de l’âge. Jusqu’à 54 ans la proportion est en effet d’environ 15%. Ce n’est que dans la tranche des 55 et plus que la proportion baisse assez fortement pour s’établir à 10%.
Pour le niveau d’instruction, on constate bien une évolution en passant du niveau d’instruction le plus faible au plus élevé, mais les écarts demeurent relativement peu importants : 13% des analphabètes acceptent la proposition contre 19% chez les personnes du supérieur.
Dans les cas les plus favorables, on atteint des proportions importantes d’individus voulant la légalisation non conditionnée de l’IVG. Ainsi en milieu urbain, la proportion de femmes atteint 28%. Chez les femmes de niveau supérieur elle atteint 32%.
La majorité pense que les jeunes Algériens sont frustrés sexuellement… mais seule une minorité pense que cela handicape l’épanouissement de la personne
Le recul de l’âge au mariage a pour effet de retarder l’âge de la première expérience sexuelle pour les personnes jeunes. Comme on l’a vu, 63% des jeunes de 18 à 24 ans n’ont jamais eu d’expérience sexuelle avec une autre personne.
Plus du tiers des 25-34 ans est dans le même cas. Cette situation est tout à fait nouvelle dans la société algérienne. Ainsi, chez les 55 ans et plus 75% des hommes et 90% des femmes ont eu leur première expérience sexuelle avant 24 ans. Point n’est donc besoin de relever le caractère anormal de la situation sexuelle des jeunes Algériens.
La forte proportion des jeunes de moins de 24 ans qui ont une expérience sexuelle en dehors du mariage ou la proportion de ceux qui ont un(e) ami(e) avec qui ils (elles) ont des relations sexuelles est indicative du fait que des changements s’opèrent dans la société pour répondre à cette situation.
Toutefois le fait que la majorité des jeunes pense que les relations sexuelles doivent se dérouler dans le cadre du mariage montre que ces changements ne se déroulent pas sans conflit et sans tension chez l’individu. Les jeunes qui ont des relations sexuelles lorsqu’ils ont un(e) amie(e) ou un(e) fiancé(e) constituent une minorité (environ 800 000 jeunes entre garçons et filles sur plus de 10 millions de célibataires).
Une meilleure prise en charge sociale de ce problème, commence par la reconnaissance par la société du caractère anormal de cette situation. C’est dans cet axe que nous avons posé la question: «Pensez-vous que les jeunes Algériens célibataires arrivent dans leur grande majorité à vivre une sexualité normale ou sont plutôt frustrés sexuellement ?»
Ils sont 65% environ des Algériens à répondre que les jeunes célibataires sont plutôt frustrés sexuellement dans leur grande majorité. Nous avons à peu près les mêmes proportions en milieu urbain et en milieu rural. Par contre il y a une différence significative entre les réponses des hommes et celles des femmes. 69% des hommes pensent que les jeunes célibataires sont sexuellement frustrés contre 61% des femmes.
Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, il n’y a pas de différence notable dans les tranches d’âge : l’opinion émise sur l’existence ou non d’une frustration sexuelle chez les célibataires ne dépend pas de l’âge. Enfin les personnes qui ont un niveau supérieur ont une propension plus importante que les autres à penser qu’il existe une frustration sexuelle chez la majorité des célibataires.
On a posé ensuite, pour ceux qui pensent qu’il existe une frustration, de dire leur opinion sur ses conséquences en choisissant entre deux avis : cela handicape l’épanouissement de la personne et c’est une situation frustrante que le jeune doit supporter jusqu’au mariage.
On trouve ainsi que parmi ceux qui pensent que les célibataires sont dans leur majorité frustrés sexuellement, seuls 30% pensent que cela handicape l’épanouissement de la personne. Il existe une différence, mais assez peu importante entre l’urbain et le rural à ce sujet, les urbains ayant plus tendance à considérer que cela handicape l’épanouissement de la personne.
La grosse différence est entre les hommes et les femmes : 36% des hommes considèrent que cela handicape l’épanouissement de la personne contre seulement 23% des femmes. L’âge, lui, n’est pas déterminant ici non plus, sauf au-delà de 55 ans.
Ces personnes ayant moins tendance à considérer que cela handicape l’épanouissement de la personne. Mais la variable explicative la plus significative est sans doute le niveau d’instruction. On constate, ici, 16% des analphabètes qui répondent que cela handicape l’épanouissement de la personne contre plus de 40% des individus qui ont le niveau supérieur.
Toujours dans le même registre, mais cette fois-ci en posant la question à tous, on a voulu savoir ce que les Algériens pensent de l’ouverture des maisons de tolérance (bordels) encadrés et contrôlés, comme une solution pour régler les problèmes sexuels des jeunes hommes célibataires.
Cette proposition ne semble pas recueillir l’assentiment d’une grande majorité. Moins de 10% de la population l’approuverait. Il y a très peu de différence entre l’urbain et le rural, suivant le sexe, l’âge ou le niveau d’instruction.
L’homosexualité : la majorité des Algériens pense qu’elle doit être punie ou tout au moins réprouvée
L’homosexualité, qu’elle soit féminine ou masculine, est généralement réprouvée. A un tel point que 73% des personnes interrogées pensent que l’homosexualité masculine doit être punie. Pour l’homosexualité féminine, le score atteint 71,4%. Pour le restant de la population, l’homosexualité doit être moralement réprouvée (24,2% sont dans ce cas pour l’homosexualité masculine et 25,3% pour l’homosexualité féminine).
Seule une infime partie (2,6% pour l’homosexualité masculine et 3,3% pour l’homosexualité féminine) considère que cela relève de la vie privée des gens.
Les tendances pour la répression sont plus fortes en milieu rural. 78% des ruraux pensent que l’homosexualité masculine doit être punie, contre «seulement» 71% des urbains.
Les femmes semblent aussi plus tolérantes : elles sont «seulement» 60% à penser que l’homosexualité masculine doit être punie, alors que ce sont 86% des hommes qui le pensent. Enfin il y a des évolutions avec l’âge et le niveau d’instruction même si elles sont de faible ampleur.
Plus on est jeune et plus on serait «tolérant» avec l’homosexualité masculine : «seuls» 69% des 18-24 ans pensent que les homosexuels masculins doivent être punis, contre 78% chez les 55 ans et plus. De la même manière pour le niveau d’instruction, 76% des analphabètes pensent que les homosexuels masculins doivent être punis, contre 67% du supérieur. Les tendances sont pratiquement identiques en ce qui concerne l’homosexualité féminine.