L’exécutif communal d’Oran s’intéresse, sérieusement, ces temps-ci, à l’équilibre financier de sa collectivité et à sa santé financière. En priorité, des mesures, mais aussi des demi-mesures, dans la foulée, sont prises pour améliorer le taux de recouvrement des créances, que personne n’est en mesure d’en évaluer le montant exact, mais que tout le monde est d’accord pour qualifier de « sacrée ardoise ».
Or, cette question ne concerne pas seulement les élus, mais elle présente la préoccupation de l’Etat, qui subventionne plusieurs activités locales. Ainsi, management public local, fiscalité locale, santé financière, performance publique locale, indicateurs financiers, régulation, stratégie financière de la commune, sont-ils les mots-clés d’assises ou de workshops’ qui devront regrouper, autour de la table : Exécutif communal, Wilaya, Administration fiscale, Domaines, direction du Logement, OPGI, Commerce… sans exclusion d’aucun acteur direct ou indirect, dans cette thématique. Une des idées force : la fiscalité locale, constituant le gros des recettes de la commune d’Oran, à l’instar de toutes les collectivités locales du pays, de ce fait, et en admettant que la commune se dote de la personnalité morale et de l’autonomie financière, elle doit trouver et développer de nouvelles sources de financement, hors fiscalité. Le Code algérien, en vigueur, renforce cette réalité et stipule que « la commune est responsable de la gestion des ressources financières qui lui sont propres. Elle est également, responsable de la mobilisation de ses ressources».
La santé financière communale : pas une affaire de l’APC seulement
Il convient de rappeler, dans ce contexte, que le Code communal délimite les sources de financement de la municipalité, tout en invitant l’APC à développer ses ressources budgétaires, lesquelles sont constituées du produit de la fiscalité, les revenus de son patrimoine, les revenus des biens communaux, les subventions et dotations, le produit des dons et legs, les emprunts, les produits en rémunération de prestations spécifiques des services, réalisés par la commune, le produit de concession des espaces publics, y compris les espaces publicitaires, le produit perçu en contrepartie des prestations diverses. Or, tout le problème est là : comment passer de la (belle) théorie à la pratique (sur le terrain boueux et miné) ?. Le premier magistrat de la ville le reconnaît, sans ambages : « On navigue à vue. On ne sait plus qui fait quoi. S’ils se disent qu’il ne nous reste que deux ans pour remettre les clés, qu’ils se détrempent ! Celui qui doit un sou à la commune, va, tout de suite, à la caisse ». C’est là où gît le lièvre. L’ardoise est tellement embrouillée, l’état comptable et le sommier de consistance si obsolètes qu’on ne sait plus, du moins avec exactitude, qui doit combien à la commune. L’actualisation des bases de données patrimoniales et comptables est, donc, le premier acte pour l’assainissement du passif et la mise en place d’un système de recouvrement efficace. La révision du tarif de location, qui date des années 80, s’impose aussi, tout autant que la révision des contrats de concession qui devront contenir une clause d’indexation automatique du montant du loyer.
De la rhétorique à la pratique
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres, tant le chemin est long entre ce projet et son aboutissement. Le maire y croit, en tout cas. Certains membres de son staff, un peu moins. Qu’importe, la machine a été mise en branle et chacun, qu’il y croit ou pas, aura à rendre des comptes, devant l’Assemblée. C’est la mise en garde, au ton policé, adressée par M. Boukhatem, à toute l’équipe, dans un contexte où le budget communal (500 milliards), au taux de fonctionnement exorbitant (81%), ne répond plus, aux besoins d’une ville, en plein processus de métropolisation’. C’est que la collectivité, en panne d’imagination et par manque de volonté, parfois, ne fait pas fructifier toutes ses ressources financières. Ce n’est pas de la rhétorique. Des décisions sont déjà prises. Certaines ont pris effet. D’autres, toutes fraîches, seront mises en exécution à brève échéance. C’est le cas de « la non-reconduction des contrats de concession (via adjudication) des gares de Yaghmouracen et d’El-Hamri, mais, également, ceux ayant trait à la Pub’ sur voie publique », a annoncé le maire.
Le souk de la friperie, jouxtant le Parc d’attractions, sera démantelé et définitivement fermé. Non seulement, pour défaut de recettes, mais également, voire d’abord, pour raison de santé, hygiène publique et d’environnement urbain, a-t-il fait savoir, également. La gestion des abattoirs municipaux sera, également, revue de fond en comble. Une feuille de route conjointe APC-Administration-Trésorerie, afin d’atteindre l’objectif d’encaissement, sera, par ailleurs, élaborée.
Emplois fictifs : une des faces cachées du dossier «masse salariale»
On révèle, par ailleurs, qu’une enquête diligentée, dans la haute discrétion, a mis à nu plusieurs dizaines de cas d’emplois fictifs : des faux-vrais noms d’agents qui n’existaient que sur des registres et qui percevaient des salaires, sur le dos de la princesse. L’affaire n’a pas encore révélé tous ses secrets. Mais cela demande une explication. Alors que les revenus en termes de taxe d’abattage demeurent invariables (900 millions; plutôt dérisoire par rapport à ce que ce créneau peut et doit produire), et que ceux liés à la taxe de séjour passent de 3 à 9,8 milliards (mais toujours loin de l’objectif, compte tenu, du parc hôtelier actuel et du taux de remplissage), et que la recette générée par le Patrimoine communal saute de 13,9 à 30 milliards, on enregistre, en revanche, une reculade de 16,8 milliards due aux 40% de la subvention, pour faire face à l’augmentation des salaires et un autre manque, plus énorme de 77 milliards, lié aux 50% de la moins-value 2015 (inscription par anticipation).
Les recettes du Patrimoine communal, au titre du BP 2016, même s’ils ont plus que doublé, par rapport à 2015, restent cependant, à mille lieues du potentiel de la ville d’Oran.
55 milliards de recettes : objectif du BP 2017
A la lecture du tableau, pas besoin de sortir de Saint Cyr pour détecter un sous-recouvrement conjugué, il est vrai, à une sous-tarification des loyers. Voici quelques chiffres pour s’en rendre compte : pour le chapitre 712 qui englobe la voie publique, les terrasses, les kiosques, les toilettes publiques, les deux gares routières, les locaux DAE et les taxes sur le permis de construire, la commune n’a ramassé, en tout et pour tout, que 8,6 milliards. Soit à peu près ce que lui doit le concessionnaire des deux agences des Castors et d’El-Hamri. Les droits de voiries DVC et SU : 900 millions (seulement). La billetterie générée par la location et l’abonnement des stades et autres salles de sports, elle aussi, est un pactole quasi délaissé : 400 millions. Les autres sources, au gré des chapitres, ne sont pas en reste : Conservatoire municipal (8 millions), Centres culturels (1 milliard), la fourrière communale auto et DHA (800 millions), logements loués par le DRG (800 millions)… sachant que la commune d’Oran dispose d’un riche patrimoine immobilier constitué essentiellement de 1.434 logements, particulièrement à Haï El Othmania, Haï Dhaya, Haï Es-Salam, 127 locaux commerciaux, notamment, à M’dina J’dida, 21 garderies d’enfants, 12 stades, 2 fourrières canines, 1 marché de gros de fruits et légumes, 1 marché à bestiaux, 32 marchés de détail, 1 abattoir, 19 salles de cinéma, 1 centre équestre, 10 salles de fêtes, 2 grands parkings, 2 hôtels, 2 centres de vacances, entre autres.