Gao et Tombouctou encore sous contrôle de l’armée risquent à tout moment d’être prises par la Rébellion islamiste. Son entrée triomphale à Kidal crée comme une sorte de phénomène d’entraînement d’autres villes insoumises à la junte actuellement au pouvoir. La présence d’Al-Qaïda sur des territoires riches en uranium fait craindre l’effet poudrière.
Les rebelles touareg, divisés entre le Mouvement national pour la libération de l’Azawad et le groupe «Ansar Eddine», dirigé par Iyad Ag Ghali, ont pris, vendredi, le contrôle de la ville stratégique de Kidal, dans le nord-est du Mali, poussant les auteurs du pronunciamiento à s’angoisser de cette situation «critique » et à appeler au soutien «extérieur » pour repousser cette avancée.
Selon des sources à Bamako, et après 48 heures de combats, le groupe armé islamiste «Ansar Eddine», appuyé par des éléments du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (Mnla), le plus important groupe rebelle touareg, a pris le contrôle de Kidal dans la matinée.
Le chef d’«Ansar Eddine», Iyad Ag Ghaly, natif de Kidal, a fait, peu après, une entrée triomphale dans la ville, où il est arrivé «à la tête d’un cortège de véhicule» sur lesquels flottait le drapeau noir frappé du sceau du prophète, habituel emblème des salafistes et des islamistes radicaux, selon des témoins. Selon des sites internet, à Bamaoko, un député et fils du chef traditionnel de Kidal, nommé Intallah, est un des dirigeants les plus en vue d’«Ansar Eddine», dont les éléments, dès leur entrée à Kidal, ont pillé puis incendié le camp de la Garde nationale, ainsi que les maisons d’officiers.
Des loyalistes, dont le gouverneur-adjoint de Kidalle Gouverneur général de la ville de Bamako, Kafougouna Koné, est en prison à Bamako, depuis le putsch militaire -et six autres officiels locaux, dont le commandant de zone de l’armée, le colonel des unités spéciales et le chef de la gendarmerie ont été mis «aux arrêts» et «en sécurité». Le nord du Mali subit, depuis la mi-janvier, une vaste offensive des rebelles touareg et de groupes islamistes.
Avec les localités d’Aguelhok, Tessalit, Tinzawaten et, aujourd’hui, Kidal, les rebelles contrôlent, désormais, la quasi-totalité du nord-est malien, considéré comme le berceau des Touareg. Gao et Tombouctou restent sous contrôle de l’armée, mais la rébellion cherche là aussi à les prendre, tant que la junte militaire reste paralysée à Bamako. Selon des témoins, des éléments d’Al-Qaïda au Maghreb islamique auraient pris part à l’attaque.
Un des chefs d’une katibate d’Aqmi est un notable touareg et participe, activement, avec la logistique d’Aqmi, à la prise de Kidal. Ce qui devrait donner à Al-Qaïda au Maghreb plus d’espace, plus d’alliances et plus de liberté de mouvement. À la base, c’est cet Iyad Ag Ghali qui fait peur, avec ses nouvelles tendances wahabites, puisées, lors de son séjour, en tant que diplomate du Mali à Riyad.
Porteur, certainement, d’un «ordre de mission» saoudien, il semble appliquer un «agenda » ou la percée wahabite est l’axe central. Depuis des années, l’«islamisme pétrolier», selon la formule chère à René Naba, est la politique que l’Arabie saoudite et le Qatar cherchent à exporter de force au Maghreb. Après avoir été mis en échec en Algérie, les deux puissances «islamo-pétrolières » ont trouvé leur homme, juste adossé aux flancs sud du pays, en Iyad Ag Ghali.
Fayçal Oukaci