De qui a peur l’héritier de Hassan II?
Le souverain marocain a tenu vendredi dernier des propos particulièrement belliqueux qui visaient l’Algérie sans jamais la citer.
Mohammed VI veut-il éviter d’envenimer des relations algéro-marocaines déjà assez malmenées et compliquées ou a-t-il tenu compte de la sortie médiatique du nouveau patron de la diplomatie algérienne qui a appelé le Maroc à la retenue? «Il est possible d’améliorer ces relations et pour ce faire, il faut de la retenue et de la sagesse», avait conseillé Ramtane Lamamra, le 8 octobre, sur les ondes de la Radio nationale, Chaîne III.
Dans le discours qu’il a tenu vendredi dernier, le souverain marocain a utilisé des propos particulièrement belliqueux qui visaient l’Algérie sans jamais la citer. Il ne faut pas être grand clerc pour le deviner. L’Algérie qui soutient le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui dans le cadre des résolutions votées et adoptées par les Nations unies et de la légalité internationale est classée comme un ennemi par le pouvoir marocain.
«Nous relevons… que la dernière résolution du Conseil de sécurité… met particulièrement l’accent sur la dimension régionale de ce différend et souligne la responsabilité de l’Algérie, en tant que partie concernée par ce litige, tant au niveau politique que sur le plan juridico-humanitaire touchant à la situation dégradante qui prévaut dans les camps de Tindouf» avait déclaré, le 30 juillet, le monarque alaouite à l’occasion du 14e anniversaire de son accession au trône.
L’attaque n’est pas aussi frontale cette fois. Elle a pris un chemin tortueux qui n’est pourtant pas difficile à emprunter. Suivons-le…pas à pas. Rappels. La proposition américaine qui avait pour objectif de doter la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental d’un mécanisme de surveillance des droits de l’homme a traumatisé le pouvoir marocain.
Le Maroc avait fait des pieds et des mains pour lui faire barrage. Un projet inabouti qui reviendra dans six mois lorsqu’il sera question pour le Conseil de sécurité de prolonger le mandat de la Minurso et de voter une nouvelle résolution. Les Etats-Unis avaient fini par faire machine arrière. Un recul interprété, et encore vécu aujourd’hui, comme un «succès» diplomatique de premier plan par Rabat qui avait estimé avoir remporté une bataille majeure. Mohammed VI le rappelle: «La question du Sahara s’est trouvée cette année en butte à des défis majeurs que nous avons pu relever grâce à la force de notre position et à la légitimité de notre cause», a-t-il déclaré le 11 octobre dans un discours tenu à l’occasion de l’ouverture de la session d’automne du Parlement marocain.
Il demeure cependant sur le qui-vive sachant que ce n’est que partie remise car ce projet inabouti fera de nouveau l’actualité dans six mois lorsqu’il sera question pour le Conseil de sécurité de prolonger le mandat de la Minurso et de voter une nouvelle résolution.
«On ne devrait pas se satisfaire de remporter cette bataille, ni céder à un optimisme béat. Nous avons, en effet, constaté quelques défaillances dans la manière d’aborder notre cause nationale…» souligne-t-il, septique, tout en mettant en garde contre de potentiels adversaires qu’il évite de mentionner.
De qui a peur l’héritier de Hassan II? Il ne les nommera pas, mais il dramatise: «La situation est difficile. Rien n’est encore tranché. Les manoeuvres des adversaires de notre intégrité territoriale ne vont pas s’arrêter, ce qui pourrait placer notre cause devant des développements décisifs», prévient-il et conseille: «Au lieu d’attendre les attaques de nos adversaires pour y riposter, il faut plutôt les acculer à la défensive, en prenant les devants, en anticipant les événements et en y répondant de manière positive.»
Des propos sans conteste belliqueux et guerriers qui dénotent une certaine paranoïa. «Je vous exhorte tous, encore une fois, à une forte mobilisation, une vigilance de tous les instants, et des initiatives efficaces aux niveaux interne et externe pour contrecarrer les ennemis de la nation où qu’ils se trouvent…» a intimé, à ses parlementaires, Mohammed VI qui a donné des signes évidents de fébrilité en ce qui concerne le dossier sahraoui.
Le nouveau ton pris par la diplomatie algérienne semble avoir secoué le trône marocain.