L’État hébreu, qui n’a pas caché sa désapprobation au lendemain de l’élection du frère musulman Mohamed Morsi à la tête de l’Égypte, affiche désormais son inquiétude sur l’avenir des relations avec Le Caire au lendemain de la purge au sein de l’armée égyptienne, d’autant plus qu’aucun contact n’a été établi jusque-là avec l’administration du nouveau “raïs”.
L’inquiétude est réelle en Israël. Les décisions du président égyptien de limoger de hauts responsables militaires, dont notamment le maréchal Tantaoui, ont suscité lundi l’inquiétude au sein des responsables politiques israéliens, ainsi que des éditorialistes de la presse, lesquels craignent les conséquences militaires et politiques de ce “séisme”.
Un responsable du gouvernement de Benjamin Netanyahu, a déclaré à l’AFP sous couvert de l’anonymat, qu’il “est prématuré de faire des évaluations car tout est en devenir en Égypte, mais nous suivons de très près et avec quelque inquiétude ce qui s’y passe”.
La même source a également souligné que “la coopération militaire est plus nécessaire que jamais pour rétablir l’ordre à la frontière et dans le Sinaï. La nouvelle hiérarchie militaire égyptienne le sait mais la question est de savoir ce que veulent les dirigeants égyptiens”.
Il a aussi mis l’accent sur le fait qu’il n’y ait eu aucun contact jusque-là entre Israël et l’Égypte à haut niveau depuis que Mohamed Morsi a pris le pouvoir, en ajoutant : “Cette question est sans réponse, car le nouveau gouvernement égyptien refuse tout contact avec Israël. C’est inquiétant car l’absence de canaux de discussions pourrait avoir un impact très négatif dans le volet palestinien, où l’Égypte a toujours joué un rôle primordial”.
Shaoul Mofaz, chef de l’opposition et dirigeant du parti centriste Kadima, a estimé à la radio militaire que “l’intérêt d’Israël, en cette période de changements en Égypte, est de préserver le traité de paix (de 1979) et de déployer des efforts énormes pour coopérer avec ce pays dans les domaines de l’économie, de la sécurité et du renseignement”. “Le président Morsi est un homme rationnel et il sait qu’Israël et l’Égypte ont intérêt à coopérer dans le Sinaï (…) Israël peut aider l’armée égyptienne”, a-t-il ajouté.
À la même radio, Shimon Shamir, ex-ambassadeur israélien au Caire, a jugé que M. Morsi “est issu des Frères musulmans et, foncièrement, il ne peut pas admettre la légitimité d’Israël, même si pragmatiquement il doit s’en accommoder”.
Du côté de la presse israélienne, c’est également la stupeur, comme le montre ce commentaire d’Alex Fishman, expert des questions de défense du quotidien Yédiot Aharonot à gros tirage. Pour lui, la nouvelle donne en Égypte est “un séisme dangereux pour Israël”.
Quant au quotidien populaire Maariv, il y voit “une purge qui n’est pas de bon augure pour Israël”. Pour apaiser les esprits, le même journal souligne que le nouveau ministre égyptien de la Défense, Abdel Fattah el-Sissi, “est très familier des responsables israéliens de la sécurité”, notamment de son homologue Ehud Barak et de Yitzhak Molcho, émissaire spécial du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Il n’en demeure pas moins que pour ces mêmes commentateurs, Abdel Fattah Sissi était considéré par ses interlocuteurs israéliens comme “très critique et froid envers Israël”.
Enfin, Oded Granot, un expert des questions arabes de Maariv, estime que “le problème principal dans les relations israélo-égyptiennes à l’ère Morsi demeure le refus de l’Égypte de nouer des liens politiques avec Israël, hormis dans le domaine de la coopération militaire”.
M T