La programmation de la recherche nationale : Autopsie d’un échec annoncé

La programmation de la recherche nationale : Autopsie d’un échec annoncé
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La prise de conscience de cet aspect incontournable doit nous permettre de mieux comprendre comment se pose aujourd’hui le problème de la recherche scientifique et le développement technologique en Algérie et quelles solutions peuvent être envisagées dans le cadre de ses interactions avec les diverses activités économiques et sociales. La tâche est d’autant plus indispensable et urgente qu’elle intervient dans une conjoncture très particulière de notre histoire marquée par des opportunités exceptionnelles, une chance à saisir.

Cette contribution tentera de mettre en lumière la problématique de la programmation de la recherche comme un des principaux obstacles qui entrave notre système de recherche. D’abord, nous exposerons de manière non exhaustive l’intérêt de programmer les activités de recherche ainsi que le processus de programmation. Ensuite, nous ferons un examen critique de la nouvelle loi de programme pour la recherche. Nous terminerons enfin par une conclusion en y proposant une série de pistes d’action pour une revitalisation de notre système que nous croyons inévitable en ce moment privilégié de l’histoire, une chance à saisir.

Dans notre pays, la programmation des activités de la recherche relative à l’élaboration d’une politique nationale (policy-making) de la science et de la technologie (S&T) a été identifiée comme une des principales problématiques qui paralyse la contribution du potentiel humain et matériel au développement économique et social1. Car l’un des objectifs fondamentaux d’une politique scientifique et technologique nationale est de mettre les produits des activités de la R&D** et les activités des SST*** au service du développement national. Cependant, cet objectif ne peut être atteint que si les programmes et projets de la R&D sont inspirés et orientés selon les objectifs du plan de développement national ou d’une stratégie de développement, mais également que si l’ensemble de la démarche du processus d’innovation – c’est-à-dire la séquence Recherche-Développement-Production-Commercialisation – est vécue concrètement de bout en bout, au moins dans quelques domaines choisis pour l’impact qu’ils peuvent avoir sur la mutation à accomplir dans les structures économiques et sociales à travers l’émergence de technologies originales et adaptées; « une première étape dans cette voie est celle de la transformation des objectifs du développement national en termes de programmes scientifiques et technologiques à la fois précis et concrets à effectuer dans le pays »2. Cette question de management est donc primordiale et fondamentale. Il est par conséquent d’une importance capitale que tous les acteurs (politiques, chercheurs, universitaires, entreprises, syndicats, financiers, médias, etc.) prennent conscience de la complexité et de l’intérêt de la programmation de la recherche non seulement pour la vitalité économique et sociale, mais aussi pour la valorisation des ressources humaines et naturelles que recèle

notre pays. En effet, la mise en œuvre d’un tel processus est incontournable à la mise au point des outils de gestion de la R&D nationale au développement économique et social et à l’exploitation durable des ressources humaines et naturelles.

Il constitue en fait pour notre pays le chaînon manquant de l’approche intégrale, globale et équilibrée de la gestion efficace du mouvement des idées et celui des réalisations concrètes. Il se nourrit des techniques, mais les techniques sont inopérantes si on y recourt en dehors de lui. Par contre, si cette mise en œuvre inclut quelques défauts sur le plan de la disponibilité des hommes, sur le manque de confiance existants entre différents partenaires, sur l’absence de consultation des milieux concernés (milieu scientifique, milieu des décideurs, public au sens large), alors il y a toute chance qu’un échec vienne conclure les travaux de programmation, et ceci, quelque soit la technique utilisée3.

Il est donc indispensable de développer la coordination et la concertation à tous les niveaux du système de recherche à travers un processus participatif afin d’agir avec cohérence et intelligence et donner du sens à ladémarche pour répondre au mieux aux besoins et aux attentes de la société. Car la gestion du développement exige de ceux qui en sont responsables une vision aussi lucide que possible des éléments et interactions qui sont impliqués dans le processus complexe du développement.

La prise de conscience de cet aspect incontournable doit nous permettre de mieux comprendre comment se pose aujourd’hui le problème de la recherche scientifique et le développement technologique en Algérie et quelles solutions peuvent être envisagées dans le cadre de ses interactions avec les diverses activités économiques et sociales. La tâche est d’autant plus indispensable et urgente qu’elle intervient dans une conjoncture très particulière de notre histoire marquée par des opportuniL’analyse faite sur l’évolution des pays dits émergents dont la Chine, la Corée du Sud, Taiwan, on ne le répètera jamais assez, montre que leur succès résulte de l’habile agencement de la politique scientifique et technologique et la politique générale et ce, grâce à leur lucidité, leur ténacité, au progrès réalisé dans la S&T utilisée à bon escient, à l’attention accordée au processus de gestion de S&T et les liens à établir entre S&T et les objectifs sociaux et économiques. Décidément en Algérie, tous les gouvernements qui se sont succédés, ont adopté des politiques de colmatage, qui n’ont eu d’autres résultats que le maintien du statu quo plutôt qu’une transformation en profondeur qu’elles doivent enclencher sans plus tarder. Sinon, comment expliquer alors que l’Algérie ne soit pas parvenue aux résultats de ces pays, partis pourtant du même point et avec moins de ressources propres, dont ils ont atteint en l’espace de quarante ans seulement.

Et il est temps que les politiques s’imprègnent de cette évidence, et il y va de leur responsabilité, d’où la nécessité d’adopter une politique claire de planification et de programmation articulée autour de la S&T. C’est faire preuve de myopie politique à ne pas le comprendre !tés exceptionnelles, une chance à saisir. La planification, répétons-le, est de nature essentiellement politique et stratégique.

Et cela n’a rien à voir avec la planification centralisée de l’économie planifiée, telle qu’elle était pratiquée dans les années 1970 Ce sont des responsables de haut niveau dans le Gouvernement ou dans les sphères socio-économiques les plus élevées qui en définissent les contours, qui prononcent les premiers les termes qui seront retenus plus tard comme objectifs, qui suggèrent les ordres de grandeur financiers, les délais, les institutions éventuelles d’exécution. Bien entendu, ces personnalités n’inventent pas tout cela. Ils ne font que traduire des demandes collectives ou professionnelles.

Par Mohand Tahar Bel