Les avocats veulent immanquablement s’émanciper du joug que fait peser sur eux, telle une épée de Damoclès, le nouveau projet de loi régissant leur profession. Le nouveau texte en question fera l’objet d’une séance d’adoption, aujourd’hui, au sein de la chambre basse du Parlement.
Les robes noires désapprouvent le contenu de cette nouvelle loi, où ils décèlent des orientations à caractère liberticide obéissant à l’idée d’assujettir leur profession et minimiser leur rôle au sein des institutions judiciaires.
Poursuivant leur cycle de dénonciation de cette nouvelle loi, les avocats étaient nombreux à se rendre, dans la matinée d’hier, au siège de la cour d’Alger où il était prévu la tenue d’une énième action de protestation pour exprimer leur rejet quant au nouveau texte de loi.
Abdelmadjid Sellini, président du bâtonnat d’Alger, était parmi les présents. Ce dernier n’ira pas par quatre chemins pour dénoncer la nouvelle loi des avocats qui vise à mettre au pas ceux qui pratiquent cette profession : «A travers cette nouvelle loi, il est évident que le ministère de la Justice cherche à placer l’avocat sous sa tutelle, ce qui constitue une grossière atteinte au principe du droit de la défense.»
Samir Hadj Saïd, avocat au barreau d’Alger, estime, quant à lui, que la nouvelle loi est «une menace de voir les avocats placés en permanence sous contrôle judiciaire».
En s’exprimant de la sorte, notre interlocuteur réprouve le fait que la nouvelle loi se décline tel un mécanisme dont dispose la justice pour contrôler les avocats.
«Il est de l’intérêt non seulement des avocats mais aussi des justiciables et du fonctionnement de la justice, en général, que le vote de la nouvelle loi, prévu pour demain (ndlr, aujourd’hui), soit reporté et ce, dans le but de revoir les articles à caractère liberticide qu’elle contient», a encore ajouté notre interlocuteur.
Des propos que conforte Maître Fetta Sadat pour qui la nouvelle loi est à rejeter dans sa globalité, vu que «c’est la substance du texte qui est en porte-à-faux par rapport au principe du»droit de la»défense», a-t-elle martelé.
Si Bouteflika était en Algérie…
Abdelmadjid Sellini, président du bâtonnat d’Alger, nous a confirmé en outre que la nouvelle loi a été élaborée non pas depuis la nomination de Mohamed Charfi en qualité de ministre de la Justice, mais bel et bien à l’époque où Tayeb Belaïz était à la tête dudit département.
«Si» le contenu de cette loi a été décidé de concert avec l’actuel ministre de la Justice, qui est lui-même issu de la corporation, il n’aurait sans doute pas soulevé une telle réprobation de la part des concernés», dira Sellini.
Ce dernier s’interroge, par ailleurs, sur «l’acharnement délibéré pour adopter un texte de loi aussi récusé par les avocats au moment où le président de la République, premier magistrat du pays, n’est pas en Algérie.
«Bouteflika a toujours pris position en faveur de la promotion du droit de la défense. Sincèrement, je me pose la question de savoir si cet acharnement à faire passer le nouveau projet de loi à l’APN dans la présente conjoncture n’est pas fait exprès et n’obéit pas à l’idée de nous priver du soutien du chef de l’Etat», nous confie encore le président du bâtonnat d’Alger.
En tout état de cause, le sort de cette nouvelle loi sera connu, aujourd’hui, au terme de la séance plénière lors du vote des parlementaires. Affaire à suivre…
Karim Aoudia