Les tensions commerciales vont peser sur la croissance mondiale et » risquent d’éroder les avancées considérables d’intégration de l’économie mondiale » réalisées sur plusieurs années, a déclaré samedi à Bali, le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Loukal.
Intervenant devant le Comité monétaire et financier international (CMFI), M. Loukal a relevé que les risques sur la croissance anticipée au mois d’avril, durant la réunion des institutions de Bretton Woods, se sont intensifiés et certains se sont matérialisés.
« La fenêtre d’opportunités offerte par la reprise économique semble, ainsi, se dissiper à un moment où les risques qui pèsent sur les perspectives s’accentuent « , a indiqué le patron de la BA qui s’exprimait au nom de sept pays à savoir l’Afghanistan, l’Algérie, le Ghana, l’Iran, le Maroc, le Pakistan et la Tunisie.
Le gouverneur a précisé que ces tensions commerciales se reflètent déjà dans la révision à la baisse des perspectives de croissance mondiale.
Le resserrement des conditions financières, la tendance haussière des coûts de l’emprunt, ainsi que l’accentuation des tensions géopolitiques sont autant de facteurs qui posent davantage de risques sur les perspectives économiques mondiales, a-t-il expliqué.
S’y ajoute, la migration forcée pour raisons politiques et économiques qui a créé des défis économiques et sociaux aussi bien aux pays d’origine qu’aux pays récipients et ceux de transit.
Selon les prévisions présentées par le gouverneur, la reprise dans les économies avancées, à l’exception des Etats-Unis, a gagné en maturité et la croissance devrait, en 2019, atteindre son potentiel, alors la croissance globale dans les économies émergentes et les pays en développement devrait rester solide et continuer à soutenir la croissance mondiale malgré le ralentissement attendu en Chine.
==Pressions sur les flux des capitaux==
Pour autant, le gouverneur a estimé que les vulnérabilités croissantes ainsi que la persistance de legs de la crise économique et financière mondiale peuvent intensifier brutalement les risques pesant sur la stabilité financière mondiale.
Ainsi, les pressions sur les flux de capitaux vers les pays émergents et en développement devraient s’accroître avec l’accélération de la normalisation de la politique monétaire aux Etats-Unis. » Cela pourrait impacter fortement les marchés financiers « , a-t-il anticipé.
Abordant, à ce titre, l’Agenda global de politiques (AGP) de la directrice générale du FMI, M. Loukal a souligné que son plan d’actions pour assister les pays membres, à travers des conseils bien calibrés afin d’ancrer une croissance plus forte, plus inclusive et plus riche en emplois, en contexte de stabilité macroéconomique, était bienvenu.
Le gouverneur a salué le renforcement du soutien du FMI aux pays fragiles et ceux affectés par les conflits ainsi que la reconnaissance de la nécessité d’aider les pays en développement à atteindre les Objectifs de développement durable.
Il a fait remarquer qu’a cette fin, le soutien de la communauté internationale est crucial car les besoins de financement des pays en développement à faible revenu pour atteindre ces objectifs sont substantiels et bien au-delà de tout effort raisonnable de mobilisation de ressources internes.
==Les exportateurs de pétrole s’attèlent à diversifier leurs économies==
Abordant les défis auxquels font face les pays émergents et en développement, le gouverneur de la BA a indiqué que « les plus immédiats consistent à se préserver de tout revirement des flux de capitaux et de se protéger des effets de contagion ».
Il s’agit de renforcer, à ce propos, les coussins de sécurité budgétaires et externes, à travers une combinaison équilibrée de politiques macroéconomiques et macro-prudentielles, incluant le recours temporaire à des mesures de gestion des flux de capitaux, en tant que de besoin.
Aussi, le renforcement du potentiel de croissance et de l’emploi dans les pays émergents et en développement passe par la rationalisation des règlementations, l’amélioration de la compétitivité et l’accroissement de l’investissement dans l’infrastructure et le capital humain, a-t-il indiqué.
Soutenus par le raffermissement des prix du pétrole, les pays exportateurs de pétrole dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord s’attellent à diversifier leurs économies, reconstruire leurs coussins de sécurité et créer des emplois, notamment pour les jeunes, à travers des réformes du marché du travail, a relevé M. Loukal.
« Cependant, beaucoup reste à faire » reconnaît-il.
Pour leur part, les pays importateurs de pétrole dans la région orientent leurs efforts vers le maintien d’un rythme de croissance satisfaisant, en tenant compte de l’impact de la reprise des prix du pétrole.
Le patron de la BA a appelé, le FMI et la communauté internationale à redoubler d’efforts pour aider les pays en développement à faible revenu à atteindre leurs objectifs, à travers des politiques adaptées à leurs spécificités et des financements concessionnels.
Au nom des sept pays, M. Loukal a salué les efforts de l’institution en vue d’introduire davantage de flexibilité dans la mise en œuvre du Cadre révisé de soutenabilité de la dette.
Le gouverneur a, par ailleurs, appelé à davantage d’efforts pour l’achèvement, à temps pour les assemblées annuelles de 2019, de la quinzième revue générale des quotes-parts, incluant un accord sur une nouvelle formule de calcul des quotes-parts, avec l’objectif de maintenir les ressources totales du Fonds autour de leur niveau actuel.
» Nous soulignons, de nouveau, la nécessité, à travers le réalignement des quotes-parts, d’assurer une augmentation substantielle de celles des pays émergents et en développement dynamiques – sans que cela se fasse aux dépens des autres pays émergents et en développement « , a-t-il relevé.
Le réalignement doit aussi protéger les voix et la représentativité des pays éligibles au Fonds Fiduciaire pour la Réduction de la Pauvreté et pour la Croissance, ainsi que celles des petits pays en développement, a conclu le gouverneur.