Des marchés hebdomadaires non autorisés, des marchés couverts mal gérés, des marchés parisiens non adéquats et un marché national de gros dépassé…
Voilà quelques-unes des causes de l’instabilité des prix des fruits et des légumes à Oran. Faute d’emplacement, d’étude complète ou de méthode efficace pour assurer le succès du programme présidentiel, le programme des 100 locaux par commune reste bien loin de son but principal, qui est le développement du commerce artisanal et l’absorption du chômage.
Achevés, la plupart de ces locaux commerciaux restent, à ce jour, fermés pour différentes raisons. A Oued Tlélat, par exemple, tout comme à travers la majorité des communes de la wilaya d’Oran, il n’existe pas de postulants remplissant les critères pour bénéficier de ces locaux. A El-Karma, ces locaux sont mal situés puisque se trouvant à l’extérieur du tissu urbain. Ceci ne permet pas aux bénéficiaires artisans d’accomplir leurs activités.
Les locaux commerciaux de Gdyel et de Misserghin ont, certes, été attribués mais, faute de branchement au réseau électrique, ils n’ont pas été encore occupés. Cet état de fait pénalise les bénéficiaires contraints à entreprendre leurs activités pour pouvoir commencer à rembourser les crédits, qu’ils ont contractés auprès de l’ANSEJ et de l’ANGEM.
Selon des spécialistes du commerce au niveau du bureau de l’UGCAA, il faut penser à changer le type d’affectation de ces locaux pour pouvoir régler définitivement ce problème. Tout en proposant que l’octroi de ces sites ne soit pas exclusivement réservé aux artisans, ils proposent de l’étendre aux jeunes détenteurs de projets d’intérêt public et ceci, dans le but de diversifier les activités.
Ils ne manqueront pas, dans ce titre, de faire remarquer que «à titre d’exemple, les localités d’Oued Tlélat et de Mers El-Kébir ne disposent pas de marchés de fruits et de légumes. Pourquoi ne pas penser à transformer les locaux réalisés dans le cadre du programme présidentiel en marché de fruits et de légumes ?»
Des intermédiaires qui font la loi
La ville d’Oran, elle, dispose de 25 marchés couverts, dont le plus célèbre est celui de M’dina J’dida, le marché Ben Okba plus connu sous le nom de «Souk El-Hout». Sur les 36 locaux commerciaux se trouvant à l’intérieur de ce site, seule, une dizaine est en activité.
Les autres locaux, constamment fermés, servent de lieux de dépôt de produits destinés au commerce informel. Par contre, dans l’enceinte du marché, outre la vingtaine de tables autorisées à activer, on trouve une centaine d’autres implantées illégalement et qui commercialisent illicitement tous genres de produits.
Quant au respect du client, mieux vaut ne pas en parler. Idem au marché de la rue des Aurès (ex-la Bastille), où le même phénomène existe. Quelque cent tables seulement ont l’autorisation d’exposer leurs produits au milieu de la rue.
Or, en réalité, le nombre de tables est estimé à plus de 250. La diversité des marchandises et les prix abordables pratiqués dans ce marché attire de nombreux clients qui, d’habitude, s’approvisionnaient au marché Michelet, qui est en train de perdre progressivement sa clientèle et son statut de marché d’une certaine catégorie sociale.
La preuve, sur les 30 locaux qu’il compte, seuls, 4 sont ouverts pour la commercialisation des fruits et légumes. Il est donc temps de soulever le problème du marché informel, qui est la cause principale de la détérioration de l’économie locale.
Pour éradiquer ce phénomène, il faut d’abord, selon nos interlocuteurs, procéder à un contrôle rigoureux des marchés, ensuite créer un marché dans chaque cité ou bien louer les locaux commerciaux se trouvant aux rez-de-chaussée des immeubles au lieu de les vendre à des prix prohibitifs, qui ne sont nullement à la portée des jeunes.
Il est nécessaire également de veiller à l’application de la loi et à respecter les voies de commercialisation, qui doivent avoir comme vecteurs : l’agriculteur/producteur, le mandataire et enfin le détaillant. Ainsi, on pourra barrer la route aux intermédiaires.
Ces «courtiers», qu’on nomme également des «parasites», sont devenus, avec le temps, «des professionnels» dans le domaine. Cette voie légale n’est malheureusement pas du tout respectée car presque la moitié (40 %) de la marchandise, devant transiter par le marché de gros, est distribuée directement aux détaillants qui, à leur tour, fixent les prix selon leur convenance quand ils n’alimentent pas le marché informel.
Le marché de gros n’ouvrira pas en mars
Pire encore, selon ces spécialistes, l’approvisionnement de la marchandise venue des wilayas limitrophes se fait à l’aide de fausses cartes de fellah. En effet, pour transporter les produits de la terre (fruits et légumes) au mandataire, il faut être titulaire de la carte de fellah ou d’un registre de commerce pour ne pas être exposé à la saisie de la marchandise, lors du contrôle des services de sécurité.
Les bénéficiaires des tables, au niveau de quelques marchés parisiens, qui ont été ouverts, dénoncent le manque flagrant de certaines commodités, dont l’absence des sanitaires et des canalisations pour l’évacuation des eaux usées. Ils dénoncent également l’insécurité, qui règne dans les lieux. «Nous sommes obligés, tous les soirs, de transporter notre marchandise vers un dépôt.
C’est vraiment fatigant. Alors, pourquoi ne pas prévoir des locaux pour le stockage au niveau du marché ?» a confié un commerçant activant au marché de l’USTO. Par ailleurs, les marchés hebdomadaires manquent à Oran. Les Oranais ne bénéficient actuellement que du marché hebdomadaire, qui se tient à Maraval, tous les mercredis.
A une certaine époque, ce type de marché était organisé 4 jours sur 7, permettant aux citoyens de s’approvisionner quantitativement et qualitativement et à des prix abordables. Ces raisons incitent nos interlocuteurs à proposer à l’APC la réorganisation des marchés hebdomadaires de manière réglementée.
Chaque commerçant aura sa propre carte, portant le numéro de la place, qu’il aura à occuper. Il sera aussi tenu à assurer le nettoyage complet des lieux à la fin de la journée. Autre défaillance : Oran, capitale de l’Ouest et deuxième ville d’Algérie, connue par sa richesse halieutique, ne possède pas un marché dédié au poisson et produit de la mer, comme c’est le cas des villes littorales du Maroc ou de Tunisie.
Avoir un tel marché bien régulé, très proche des Oranais, est vraiment une nécessité pour contrôler le prix du poisson, qui ne cesse de flamber.
Pour les spécialistes, pour développer le secteur des marchés, il faudrait commencer par installer un gestionnaire privé dans les marchés couverts, qui sera contrôlé par la commune, selon un cahier des charges pré-établi. Quant à l’UGCAA, on a appris qu’elle prévoit prochainement l’installation de sections au niveau des 25 marchés de la commune.
Attendu depuis très longtemps par les mandataires et les vendeurs de fruits et de légumes au niveau de la wilaya, de la région et même à l’échelle nationale, le marché de gros d’El-Karma, à vocation nationale, n’ouvrira pas ses portes comme il était prévu au mois de mars prochain.
En effet, en attendant son extension, la Fédération de mandataires dénonce l’absence de plusieurs équipements nécessaires pour un meilleur exercice de l’activité, à savoir une salle pour la prière, un restaurant, une cafétéria, une placette pour les stationnements et les déplacements des charrettes et un guichet bancaire pour d’éventuels transferts d’argent.
Ce n’est pas le cas du marché de la wilaya de Mascara, nouvellement réalisé. Il comporte toutes les commodités, selon les aveux de nos interlocuteurs, qui profitent de l’occasion pour demander aux services de la wilaya de penser à mettre en place les équipements nécessaires et d’attribuer la gestion du marché à une EPIC.
Reportage réalisé par Souad Berkèche