La marche sur Alger n’a pas eu lieu

La marche sur Alger n’a pas eu lieu
la-marche-sur-alger-na-pas-eu-lieu.jpg

La marche d’Alger du 12 février 2011, comme la précédente du 22 janvier 2011, n’a finalement pas eu lieu, les forces de police ayant quadrillé la ville et ses environs depuis la veille.

Le rassemblement de la place du 1er mai ne pouvait donc se tenir dans de telles conditions. Mais indépendamment de la répression, il faut avouer que les organisateurs n’ont pas réussi à drainer les foules. Les Algérois, les jeunes en particulier, ont vaqué à leurs occupations.

Les forces de police ont quadrillé la ville et ses environs(photo facebook DR)

ALGÉRIE. Ils étaient des centaines (250 selon la police et plusieurs milliers selon les organisateurs) à braver l’interdiction de marcher. Les organisateurs – la Coordination nationale pour le changement démocratique – initiatrice de la marche n’a pu rassembler ses troupes.

Il est évident que la présence policière a empêché les manifestants de former des rangs car il y avait autant de policiers en civil que de manifestants et un nombre impressionnant de forces anti-émeute.

Mais au-delà de la répression, d’autres causes peuvent expliquer cet échec : le défaitisme ambiant, le manque de confiance dans les partis, la non représentativité de certains, l’absence de communications entre la population des quartiers populaires et les « forces organisées », dix ans de guerre fratricide dont les meurtrissures ne sont pas encore guéries…

La liste est longue, aussi longue que les raisons du malaise social qui pourrait exploser au grand jour à tout moment.

L’échec de la marche sera certainement considéré comme une victoire par le pouvoir, mais la poudrière sociale n’est pas pour autant à conjuguer au passé.

Des arrestations et des blessés

Il est évident que la population, les jeunes en général et ceux qui s’étaient soulevés au début du mois de janvier 2011 en particulier, n’était pas au rendez-vous.

Les initiateurs ont surtout scandé des slogans politiques, mais il n’y avait pas ou très peu de slogans sociaux. En face, des contre-marcheurs scandaient des slogans pro-Bouteflika. La marche était programmée à 11 heures locale (GMT+1), mais bien avant midi les organisateurs appelèrent à la dispersion et partirent en laissant les manifestants derrière eux.

Un autre rassemblement se tint juste après avec des slogans pour l’emploi, contre le chômage, contre le premier ministre Ouyahia …

Vers 14 heures les forces anti émeutes chargèrent, officiellement après avoir reçu des jets de pierres. Bilan : 28 blessés légers (12 manifestants et 16 policiers). Les dizaines de manifestants arrêtés à Alger et les universitaires et syndicalistes arrêtés dans les autres villes du pays ont été majoritairement relâchés.

Tirer les leçons de l’échec

En marge de la manifestation, des personnes « venues observer la marche » – intellectuels et autres – profitèrent du moment pour discuter. Nombre d’entre eux regretteront la manière dont l’initiative avait été organisée

La nécessité d’entamer une réflexion sur l’apparent désintérêt de la population fut évoquée. La nécessité d’apprécier correctement ses forces avant de se lancer dans des actions sera également abordée par certains.

De nombreux passants interrogés affirmaient en effet ne pas comprendre le pourquoi de cette marche quand d’autres ignoraient jusqu’à son existence. Nombre de magasins sont par ailleurs restés ouverts.

La question de la mobilisation risque de devenir le cauchemar de tous ceux qui voudront organiser quelque chose. Communiquer avec la population « d’en bas » reste, selon certains observateurs, la seule alternative pour avancer.

Le rassemblement du 12 février 2011 a démontré l’ampleur de la fracture qu’il y a entre le peuple et une partie de son « élite ».

Sauf événement imprévu, qui pourrait tout à fait se produire, la « révolution » annoncée n’est visiblement pas encore arrivée à maturité en Algérie.