La marche du 19 février de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (Cncd) a été brutalement réprimée par les forces de l’ordre. Il faut dire qu’avant même le jour de cette manifestation pour le changement, la Cncd avait déjà les ailles coupées. Et pour cause, plusieurs manifestants ont été empêchés d’accéder à la Capitale. La procédure était simple : Les bus en provenance des autres wilayas interdits de rentrer sur Alger. Des points de contrôle se sont multipliés, en cette occasion, sur toutes les autoroutes menant vers la Capitale.
Le transport ferroviaire était à l’arrêt. Il est presque 9h00. La place « bleue » plutôt du 1er-Mai a été prise d’assaut par un imposant dispositif sécuritaire. Les organisateurs parlaient de 40 000 policiers déployés. Trique en bois, gilet par-balles, bouclier antiémeute, les «hommes bleus » y étaient partout. L’endroit a été quadrillé. Toutes les artères ont été bouclées.
Des blindés antiémeute ont barré les principaux accès à la Place de la Concorde civile (point de départ de la marche vers la Place des Martyrs). Un hélicoptère ne cessait de tournoyer dans le ciel. En une seule expression : les autorités n’ont rien laissé au hasard. Elles n’ont pas, aussi, lésiné sur les moyens. L’objectif était clair : réprimer la marche. Et pour y arriver, tous les moyens sont bons. Le parfum du scénario du 12 flotte dans l’air. Le temps passe, la tension se lit sur la rue Mohamed-Belouizdad. En dépit du déploiement impressionnant des policiers, une foule s’y est constituée. Celle-ci scandait des slogans hostile au pouvoir : «Libérez les libertés !», «Y en a marre de ce pouvoir !», «Le peuple veut la chute du régime !», «Marche pacifique !», «À bas la dictature! ». Les manifestants ont, à moult reprises, tenté de briser « le mur bleu » mais en vain. À forces inégales, les policiers ont eu le dernier mot. Ces derniers ont pu contenir les protestataires dans leur espace. C’est le pot de terre contre le pot de fer. Résultats : des manifestants brutalisés, malmenés et même tabassés. Certains d’entres eux ont été blessés. Les femmes, même les femmes n’ont pas été épargnées par ce traitement on ne peut plus désolant des éléments des forces de l’ordre. Ces derniers ont réussi à disperser, par la violence, les manifestants. Mais ce n’est qu’une partie remise. L’heure affichait, alors, 10h30. Me Ali Yahia Abdennour, l’infatigable président d’honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (Laddh) arrivait sur les lieux. Il a été sauvagement bousculé par les policiers. Du haut des ses 90 ans, celui-ci n’a pas fléchi. Au contraire : « l’Algérie appartient aux jeunes », s’est- il adressé à la foule. Quelques minutes après, c’est au tour du Me Mustapha Bouchachi, l’actuel président de la Laddh d’y faire son apparition. Le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie était absent. Cependant, de nombreuses personnalités politiques nationales ont répondu à l’appel de la coordination. Et la marche de reprendre son cours de plus belle.
«ECHAÂB YOURID ISQAT ENNIDHAM!» « Le peuple veut faire tomber le régime! », lance, encore la foule transcendée. La police fond sur elle et arrache les pancartes des mains des manifestants. Un fait à révéler : un groupe de jeunes, comme c’est le cas pour la marche du 12 février, ont tenté de décrédibiliser les manifestants en lançant des slogans en faveur du président Bouteflika et son Premier ministre Ahmed Ouyahia. Remarque : ils circulaient en toute liberté, sous la bonne grâce des policiers. Ils sont aussitôt qualifiés de « baltaguïa », de voyous à la solde du pouvoir pour casser a dynamique de la marche. Les organisateurs accusaient les forces de sécurité d’inciter ces jeunes à la violence. Le jeu est dangereux. Mais grâce à la maturité des manifestants qui n’ont pas repandu aux provocations, le pire a été évité, au grand dam des manipulateurs.
Le piège de voir les deux parties s’affronter a été déjoué. Un manifestant s’est montré navré par rapport aux pratiques à la fois dangereuses et caduques du pouvoir dans sa manièr de réprimer la marche et d’un ton amèr indiquera: « l’intervalle entre les espérances du peuple et le pouvoir en place est cruel. On se demande pourquoi tout cet arsenal policer pour empêcher une action pacifique », et ce dernier d’ajouter : Si pour le moment le pouvoir arrive, tant bien que mal, à appréhender les manifestants, il n’en demeure pas moins que l’étincelle est déjà là.