La Ligue arabe suspend Damas de ses instances, Vers la légitimation de l’ingérence étrangère en Syrie

La Ligue arabe suspend Damas de ses instances, Vers la légitimation de l’ingérence étrangère en Syrie
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La Syrie est-elle sur les traces de la Libye ? La réunion d’urgence, hier, des ministres arabes des Affaires étrangères a débouché sur un durcissement de ton envers Damas.

La Ligue arabe a, semble-t-il, cédé aux pressions des pays du Golfe, qui ont décidé d’ostraciser au maximum le gouvernement syrien.

La quasi-majorité des pays arabes (18 Etats) ont voté pour une résolution très dure qui prévoit la suspension de la Syrie des instances panarabes à partir du 16 novembre, dans le cas où Damas refuserait d’appliquer le plan arabe de sortie de crise adopté le 2 novembre dernier.

Deux pays arabes en plus de la Syrie ont refusé de voter pour cette résolution, le Liban et le Yémen, tandis que l’Irak s’est abstenu. Les 18 autres pays ont tous voté pour les sanctions contre Damas. Ainsi, l’organisation panarabe réédite, à un degré moindre, le scénario libyen qui a commencé avec l’exclusion de la Libye de la Ligue arabe, avant de porter l’affaire devant le Conseil de sécurité, qui a mandaté l’Otan pour renverser le gouvernement légitime libyen.

Damas marchera-t-elle sur les traces de Tripoli ? Un regard nuancé s’impose ! D’abord, la Ligue arabe n’exclut pas la Syrie de ses instances, mais suspend sa participation. Les délégations syriennes ne sont donc plus admises à participer aux travaux des organisations subsidiaires panarabes. Les pays arabes sont également invités à rappeler leurs ambassadeurs en poste à Damas. Une stratégie d’isolement est ainsi mise sur pied.

De même, les membres de la Ligue ont appelé l’armée syrienne à «arrêter la répression des manifestations», une forme inédite d’ingérence dans les affaires intérieures syriennes. En décrypté, l’armée syrienne ne doit plus obéir au gouvernement légitime, les militaires sont invités très officiellement à déserter les rangs. Une première dans les annales diplomatiques arabes !

Aussi, l’organisation panarabe menace Damas de recourir aux organisations internationales des droits de l’Homme, après le recours aux organisations arabes spécialisées, afin d’étudier les moyens à même d’arrêter «l’effusion de sang». D’autres menaces de sanctions politiques et économiques ont également été brandies.

DÉLÉGITIMER LE GOUVERNEMENT D’AL-ASSAD

Autre forme de pression sur le gouvernement syrien, l’appel lancé à tous les courants de l’opposition syrienne à «se mettre d’accord sur un projet unique pour la gestion de la transition prochaine». Les opposants sont conviés le 15 novembre au Caire «pour convenir d’un projet de transition».

Selon l’analyste libanais Anis Nakkache, cette démarche vise ni plus ni moins à «transférer la légitimité du gouvernement syrien au Conseil national syrien, à l’instar de ce qui s’est passé avec le CNT libyen». L’analyse d’Anis Nakkache va plus loin en insistant sur l’implication des Etats-Unis dans «le complot contre la Syrie qui est une partie de son complot contre les pays de la région, qui vise à reconfigurer la situation dans le monde arabe».

La décision arabe a été annoncée par le ministre des Affaires étrangères et Premier ministre du Qatar, Hamad ben Jassem al-Thani, dans une conférence de presse au siège de la Ligue. Cette séance restera dans l’histoire de la Ligue comme une conférence de presse où les journalistes arabes, majoritairement égyptiens, ont applaudi les décisions comme s’ils étaient partie prenante d’un conflit les opposant au gouvernement syrien.

Lors de ce moment mémorable, la nature houleuse des débats entre les chefs de la diplomatie arabe a été perceptible à travers la mine défaite du secrétaire général de la Ligue, Nabil Al-Arabi, et de la gêne manifeste du chef de la diplomatie du Qatar, qui a lu de façon expéditive la résolution adoptée peu auparavant. Ce dernier a annoncé que les sanctions prendront effet le 16 novembre, si le gouvernement syrien refuse d’appliquer le plan arabe de sortie de crise adopté le 2 novembre. Les ministres arabes statueront mercredi prochain à l’occasion d’une réunion à Rabat entre les chefs de la diplomatie arabes et leur homologue turc.

La réaction syrienne ne s’est pas fait attendre. L’ambassadeur syrien auprès de la Ligue arabe, Youssef Ahmed, a déclaré que cette décision est «illégale et contraire à la charte et au statut de la Ligue» car la suspension d’un Etat de la Ligue doit résulter d’un vote à l’unanimité et non pas à la majorité.

LE QATAR HUMILIE L’ALGÉRIE ?

Le diplomate syrien a révélé que le président de la séance, le Premier ministre du Qatar, a levé la séance en adoptant la résolution tandis que le ministre algérien des Affaires étrangères, Mourad Medelci, soulevait la question de la validité juridique de la démarche panarabe. Un affront à la diplomatie algérienne !

Plus tôt dans la matinée, l’ambassadeur Ahmad a affirmé que la Syrie s’engageait à l’exécution des articles du plan de travail arabe sur la conjoncture dans ce pays et qu’elle avait réalisé un grand parcours dans la mise en vigueur de ce plan «en dépit des tentatives des parties armées à l’intérieur, soutenues par l’extérieur, de mettre fin au plan depuis le premier de son adoption», a rapporté l’agence officielle syrienne Sana.

«Dix jours après l’adoption par le conseil de la Ligue arabe du plan de travail sur la conjoncture en Syrie, les climats passifs et agressifs, l’incitation politique flagrante et l’intensification de la campagne médiatique, lancée par nombre de pays et parties extérieures depuis l’adoption du plan se poursuivent toujours pour aggraver la situation dans le pays», fait savoir l’ambassadeur.

Hier, la Ligue arabe a entériné le processus de destitution du président Bachar Al-Assad en assurant la couverture régionale à une opération de déstabilisation généralisée de la Syrie. Avec les menaces d’agression américano-israélienne sur l’Iran, le décor d’un nouveau Moyen- Orient est planté. Le GMO, version smart power à la Barack Obam, a est en passe de naitre.

M’hamed Khodja