Les services israéliens confirment l’attaque à l’arme chimique dans la province d’Alep sans dire, cependant, qui en sont les auteurs. Les autorités de Damas et l’opposition armée s’accusent mutuellement de cet acte qui constitue, assurément, une aggravation du conflit entré dans sa troisième année.
Cette attaque chimique qui a fait 25 morts, majoritairement des militaires, dit Damas, et 86 blessés graves, pourrait servir de justification à une intervention militaire de l’Otan, si l’utilisation de cette arme redoutable interdite par les traités internationaux, notamment le CIAC (Convention sur l’interdiction des armes chimiques) en vigueur depuis 1997, était attribuée au régime de Bachar el Assad.
Par la voix du porte-parole de la Maison Blanche dont le chef est, depuis hier, en Israël, les Etats-Unis affirment ne disposer qu’aucune preuve impliquant l’opposition syrienne dans « une éventuelle utilisation de l’arme chimique », disant que le gouvernement américain étudiait « attentivement les accusations portées [contre l’opposition] ».
Depuis plusieurs mois déjà, les Etats-Unis accuse Damas de vouloir militariser une partie de « son arsenal chimique » afin de l’utiliser contre son opposition. Le mensonge américain sur la présence d’armes de destruction massive en Irak pour motiver son agression en 2003 contre ce pays est encore dans toutes les mémoires, y compris dans celles des alliés occidentaux des Etats-Unis, pour donner, sans preuve, crédit aux allégations de Washington.
Jusqu’ici, la France et l’Allemagne, notamment, soupçonnaient Barack Obama de vouloir les entraîner dans une intervention en Syrie sous le prétexte de sécuriser les armes chimiques que Bachar el Assad avait menacé d’utiliser en cas d’intervention militaire occidentale. L’utilisation des armes chimiques a été fixée comme « une ligne rouge » par les autorités occidentales pour, s’agissant de certaines d’entre elles, reconsidérer leur position de ne pas envoyer des troupes en Syrie.
Le secrétaire général de l’Otan affirmait, de son côté, que « l’utilisation éventuelle de [ces armes] entraînerait une réaction immédiate ». Seule raison, pour l’Alliance atlantique, d’intervenir. Le 18 mars dernier, Anders Fogh Rasmussen déclarait que son organisation ne se mêlerait pas des livraisons d’armes à l’opposition et que celle-ci n’était pas « concernée par la levée de l’embargo sur les armes » que la France et le Royaume ont posée au sein de l’Union européenne.
Devant le Sénat américain qui l’auditionnait, le commandant suprême des forces de l’Otan, le général américain James Stavridis, affirmait, avant l’attaque chimique à Alep, que l’Otan n’envisageait pas d’agir militaire « sans une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu, le soutien des pays de la région et d’un accord des 28 pays membres de l’Alliance atlantique. » Pour lui, il n’y avait, jusque là, aucune raison pour que l’Alliance atlantique déroge à la position qui fut la sienne en Libye, à savoir qu’il faut que la « communauté internationale » le lui demande.
La Russie dont la flotte en Méditerranée a été renforcée ces dernières semaines, a toujours exprimé son « impression que les Etats-Unis cherchaient tout simplement un prétexte pour intervenir militairement » en Syrie. Selon Vitali Tchourkine, le représentant de la Fédération russe aux Nations Unies, Moscou était très préoccupée par la permanence de l’exploitation par Washington du « thème de l’arme chimique syrienne », affirmant que son pays avait longuement abordé « plus d’une fois [cette question] avec le gouvernement syrien » qui lui aurait assuré que « même s’il y avait des armes chimiques en Syrie, jamais il ne les utiliserait ».
Damas qui accuse l’opposition de les avoir utilisées, rend la Turquie et le Qatar ainsi que les pays qui approvisionnent les opposants en armes, visant les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, pleinement responsables dans cet usage à Khan al Assal, à Alep.
Paris et Londres n’ont pas, jusqu’à maintenant, réussi à convaincre les autres membres de l’Union européenne de lever l’embargo sur les armes à destination de l’opposition combattante syrienne. Une réunion des 27 ministres des Affaires étrangères de l’UE est prévue demain et après-demain à Dublin pour étudier, de nouveau, cette question faute de consensus.
La chancelière allemande, Angela Merkel, s’est montrée très hostile à cette perspective lors du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement européen du 15 mars dernier à Bruxelles, déclarant, avec vigueur, qu’il « ne [suffisait] pas que deux pays aient changé d’avis pour que les 25 autres doivent suivre. »
Par Brahim Younessi