La LFC 2011 passe au Sénat: Les frontières rouvertes à la friperie

La LFC 2011 passe au Sénat: Les frontières rouvertes à la friperie

Le passage de la loi de finances complémentaire (LFC) est en général une formalité, la « vocation » de la chambre haute n’étant pas de censurer des textes qui viennent du gouvernement.

La LFC 2011 n’a pas dérogé à la règle. Pourtant, certains membres du Conseil de la Nation avaient donné l’impression que la chambre « haute » allait censurer la chambre « basse » qui avait décidé, au grand dam du syndicat des travailleurs du textile, d’autoriser à nouveau l’importation de la friperie.

Les députés avaient justifié l’introduction de cette mesure – non prévue par le texte soumis par le gouvernement – par le fait que l’interdiction n’a pas mis fin à l’importation de la friperie et qu’elle n’a fait que le faire basculer dans l’informel.

Pour les députés, il vaut mieux que la friperie passe par les circuits légaux (les ports) avec des contrôles en bonne et due forme et paiement de taxes que de laisser faire l’informel. L’argument avait laissé de marbre le syndicat des travailleurs du textile. Au-delà de la relative modestie des importations en friperies (13 millions de dollars), le syndicat a vu dans l’amendement un mauvais signal et une brèche dans laquelle d’autres segments du textile pourraient s’engouffrer.

Le secrétaire général de la Fédération des travailleurs du textile Amar Takdjout avait en effet mis en avant le risque que la mesure ne s’étende à l’importation du fil et des tissus. « Cela va inciter les autres à aller de l’avant, ceux qui ont l’habitude d’importer les fils, ceux qui importent les tissus, on va les fermer ces usines. Je n’hésiterai pas à appeler les travailleurs à descendre dans la rue pour exprimer leur désapprobation. Je le ferai sans état d’âme pour défendre nos usines », avait-il déclaré à la Chaîne III.

Le gouvernement avait fait valoir qu’il n’était pas favorable à la levée de l’interdiction mais n’a pas essayé de faire revenir le Parlement sur son amendement fripe. Ce sont quelques sénateurs qui se sont fait l’écho des inquiétudes des travailleurs et ont dénoncé l’amendement « fripe ».

Ils ont fait valoir la « menace » que le rétablissement de l’importation de la fripe fait peser sur l’industrie du textile que le gouvernement souhaite relancer. D’autres ont fait valoir des considérations de santé publique. Pourtant, il était totalement improbable que le Conseil de la Nation bloque l’ensemble de la LFC à cause d’un seul article. Le Conseil de la Nation ne discute pas d’un texte, article par article.

La Constitution précise qu’il « délibère sur le texte voté par l’Assemblée Populaire Nationale et l’adopte à la majorité des trois quart (3/4) de ses membres » . Selon des sources au Conseil de la Nation, les tractations qui ont eu lieu se sont conclues par la promesse que l’article 7 bis autorisant la fripe serait retiré dans la prochaine loi de finances en… 2012. En attendant, la LFC 2011 est bien passée au Sénat avec fripes et bagages.

Salem Ferdi

Les travailleurs du textile menacent de se rassembler devant l’APN

Des centaines de travailleurs du secteur du textile et du cuir se sont rassemblés, hier, devant le siège de la centrale syndicale UGTA à Alger. Les protestataires se sont insurgés contre la reprise de l’importation de la friperie, mesure introduite dans le projet de loi de finances complémentaire 2011 par les membres de l’APN.

Les prestataires en avaient gros sur le coeur, et ce n’est pas uniquement l’histoire de la friperie qui les angoisse, mais aussi la situation du secteur. Les 20.000 travailleurs du secteur du textile et des cuirs perçoivent des salaires de misère qui varie, selon les unités, de 8.000 à 13.000 dinars, salaire de base, selon plusieurs travailleurs.

Et certains ne perçoivent leur salaire qu’après 3 à 4 mois, comme c’est le cas de l’unité de Bab Ezzouar. Ils disent également souffrir de la marginalisation dans l’octroi des marchés. « On se fait concurrencer par le privé qui paye moins de charges que nous, qui déclare un travailleur sur trois, ce qui lui permet de soumissionner et décrocher les marchés étant le moins-disant », nous explique un parmi les protestataires.

Autre tracasserie à laquelle font face les travailleurs du textile, le travail sur la base de contrats à durée déterminée. « J’ai 10 ans de travail à l’unité de Bab-El-Oued et je travaille toujours sur la base d’un contrat », nous dit un travailleur. Et d’ajouter que « sur 85 travailleurs activant à l’unité de Bab-El-Oued, 27 seulement sont permanents ».

Les protestataires vivent avec la peur d’être renvoyés à tout moment et l’angoisse de voir leur usine fermer. « Il y a des unités qui ne produisent pas et il y en a d’autres qui produisent mais qui ne trouvent pas acquéreurs à leurs produits, en raison de la concurrence déloyale imposée à la fois par les importateurs de la friperie et par les importations massives de produits de moindre qualité et à bas prix qui inondent notre marché », explique un travailleur de l’unité de Laghouat.

Le secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs du textile et du cuir, Amar Takjout, s’est focalisé sur la nécessité du retrait de la mesure visant la reprise de l’importation des friperies. « Il y a beaucoup de contradictions : les pouvoirs publics parlent, d’un côté, d’un plan de relance du secteur, et de l’autre, les députés votent en faveur de la levée de l’interdiction d’importation de la friperie !».

Takjout a affirmé, par ailleurs, que d’autres revendications sont exprimées, à savoir la mise en oeuvre du plan de relance du secteur ainsi que l’augmentation des salaires des travailleurs. Dans le cas où les revendications ne seraient pas satisfaites, affirme le SG de la fédération, l’ensemble des travailleurs du secteur se rassembleront devant l’Assemblée populaire nationale (APN).

Le SG de la centrale syndicale Sidi Saïd a reçu les protestataires en début d’aprèsmidi, dans une grande salle, pour affirmer l’engagement et le soutien de l’UGTA aux revendications des travailleurs, notamment celle relative au retrait immédiat de la mesure de réintroduction de l’importation de la friperie et la mise en oeuvre du plan de relance du secteur.

M. Aziza