Les voyants sont au rouge. La protestation touche des secteurs névralgiques du pays.
Chaque jour qui passe apporte son lot de contestations. Certaines de ces revendications, fondées, trouvent leur justification dans ce marasme généralisé. D’autres par contre sont injustifiées, insensées et donc irréalisables. Cela n’empêche pas le vent de la colère de secouer particulièrement, les principaux secteurs stratégiques de l’Etat que sont la santé, l’université et la justice.
Ils ne sont pas les seuls à connaître une ébullition, mais pratiquement tous les secteurs sont gagnés par cette fièvre de la protestation en ce début de printemps 2011. Du jamais-vu dans l’histoire récente du pays. Hier encore, les médecins résidents sont montés au créneau. La cause? Ils sont revenus bredouilles du ministère de la Santé, de la Population et de la Recherche scientifique. «Nous sommes venus au ministère (à Alger) pour siéger au niveau des commissions mixtes. Finalement, on nous a appris qu’aucune commission n’a été installée», a déclaré le Dr Mohamed Sahnoune, porte-parole du Collectif national des médecins résidents algériens, au sortir du siège du ministère. Ils étaient une vingtaine de délégués, venus des différentes wilayas du pays, à s’y être rendus. «Notre venue s’inscrit dans le cadre des résolutions prises lors de notre dernière réunion avec le ministre Djamel Ould Abbès», a-t-il indiqué. La délégation des résidents avait été reçue, mardi dernier, au ministère en question. Au cours de cette réunion, les deux parties ont décidé la mise en place de trois commissions mixtes (ministère-résidents) pour prendre en charge les doléances des grévistes.
Or, dans l’intervalle, ces commissions n’ont pas été installées «C’est du mépris», a dénoncé le Dr Sahnoune. Le département de Ould Abbès fait face à un autre foyer de protestation, celui des paramédicaux. «Nous considérons que les réponses apportées par le ministre à nos doléances sont insuffisantes», a déclaré Lounès Gachi, secrétaire général du Syndicat algérien des paramédicaux (SAP), joint hier par téléphone.
«Les points liés au statut, au régime indemnitaire et à la réintégration à leurs postes de travail des syndicalistes suspendus n’ont pas été satisfaits», a-t-il expliqué. M Gachi a, une nouvelle fois, confirmé que «le SAP renouera avec la grève illimitée à partir du 11 avril prochain».
Un autre levier de la contestation: les étudiants. Ils ont décidé de maintenir leur débrayage ouvert, à l’échelle nationale. «Nous avons opté pour le maintien de la grève illimitée», a tranché, hier, Mounir, membre de la Coordination nationale des universités qui s’est réunie à la faculté de Bouzaréah. La protestation estudiantine ne s’arrête par là. «Le 12 avril prochain, nous, nous répondrons présents à l’appel de la Coordination nationale autonome des étudiants, pour une marche nationale à Alger», a persisté Mounir. L’Université algérienne est en ébullition. Cette ébullition risque de provoquer un précédent: l’année blanche. Les observateurs de la scène universitaire n’écartent pas ce scénario. S’il se concrétise, les conséquences seraient terribles sur l’avenir de 1,2 million d’étudiants que compte l’Université algérienne. Les voyants sont au rouge.
Les feux de la colère enflamment un autre secteur, tout aussi stratégique: les douanes. Les employés de la direction régionale des douanes «marchandises» d’Alger sont entrés, hier, en grève illimitée. «Nous avons pris cette décision pour dénoncer la précarité de nos conditions de travail», a expliqué Karim, un employé de cette direction, contacté par nos soins. Cette action protestataire risque d’affecter la circulation de la marchandise, notamment celle importée, au niveau d’Alger et des régions limitrophes.
La vie économique au niveau du centre du pays est sous la menace d’une paralysie. Le spectre de l’immobilisme plane, également, sur la justice. Les greffiers ont entamé, hier, un débrayage illimité, a rapporté le journal électronique Toutsurl’Algérie (TSA). C’est le deuxième débrayage ouvert qu’ils observent en 45 jours. Le secteur de la justice connaît, ainsi, une nouvelle perturbation qui risque de pénaliser les citoyens au plus haut point. L’activité des tribunaux est, ainsi, paralysée. Les audiences sont renvoyées aux calendes grecques. Et le traitement des affaires, déjà lent, sera bloqué pour une durée indéterminée. Les analystes dressent un constat effrayant de cette situation. La justice, selon eux, est dans le flou.
Le torchon brûle entre le ministre de la Justice, garde des Sceaux, et les greffiers. Ces derniers estiment que leurs revendications n’ont pas été satisfaites.
La grogne sociale touche des secteurs très sensibles. En attendant des solutions concrètes aux différents problèmes posés, ce sont les citoyens qui trinquent.
Mohamed Sadek LOUCIF