Le nécessaire peut se transformer en strict minimum quand les produits alimentaires ne doublent pas mais, plutôt, quadruplent leurs prix en quelques semaines. Pour preuve, les Algériens s’approvisionnent en 500 g de pomme de terre, tellement son kilo est cher…
On entend souvent parler des bienfaits de la pluie sur les terres agricoles, sur les quantités, la qualité et surtout sur les prix de ces produits. En Algérie, ni la richesse du climat, ni l’étendue des terres agricoles n’ont pu, maintenant après un demi-siècle d’indépendance, rendre le couffin des algériens moins miséreux. Sans exagération aucune, les citoyens en ont assez de cette prolongation des flambées sans recul. Les ménages peuvent se passer des bananes et des yaourts, comme l’estiment et préconisent nos gouvernants, mais quand la pomme de terre est vendue à 120 ou 130 Da et que la tomate fraîche est à 160 Da, l’on se demande si ces algériens devraient dorénavant se passer des légumes aussi et se contenter des pâtes… Une tournée dans les marchés algérois donne le tournis aux consommateurs. La hausse des produits alimentaires n’étant pas minime, elle est cette fois-ci plus qu’une source de colère des clients qui «font attention et achètent le strict minimum du nécessaire». «Les prix sont fous» lance une vieille femme qui venait de voir que la tomate est à 140 Da. Les prix des fruits et légumes ont effectivement placé la barre très haut et n’affichent aucune clémence depuis des mois déjà. Si la hausse est légère pour certains légumes, pour d’autres elle est énorme. Ainsi, beaucoup de légumes enregistrent une hausse de 10 à 20% tandis que d’autres sont revus à une hausse de 80 à
100%. Par coutume, les deux départements de l’Agriculture et du Commerce, censés expliquer ces hausses prolongées et souvent incompréhensibles, voire injustifiées, évoquent soit la spéculation «anonyme» soit ils jouent l’apaisement, imputant les augmentations à d’autres conditions climatiques ou d’autres facteurs qui bien entendu ne relèvent pas de leur ministères. C’est alors l’occasion de signaler que le ministre du Commerce est aux abonnés absents depuis que les commerçants ont commencé à justifier la hausse des prix par rapport aux fortes pluies et neige qui se sont abattues durant le mois de février dernier… S’exprimant récemment à propos de la hausse vertigineuse de la pomme de terre, l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) a imputé la responsabilité à ce qu’il a appelé «la mafia de la pomme de terre», le porte-parole de l’UGCAA, Hadj Tahar Boulenouar a tenu, récemment, à rassurer que les prix de la pomme de terre «reculeront de 40% dès la fin du mois d’avril en cours». Mais maintenant que nous savons que le mois d’avril a connu également des intempéries, devrait-t-on s’attendre à ce que les conséquences des pluies sur les prix des produits alimentaires perdurent également encore ? D’un point de vue professionnel, les prix ne dépendent pas en vérité des bulletins météorologiques mais d’une gestion qui prédit les risques et ayant les clés du secours. Autrement dit, les intempéries ne peuvent rester l’argument standard qui justifie les flambées. De plus, même si la hausse est fatale pour certains prix, elle est inévitable quand elle est liée aux marchés internationaux, la stabilité des prix des produits alimentaires devrait s’installer dans les mœurs du moment que ces produits ne sont pas importés comme c’est le cas des fruits et légumes. D’où vient la nécessité d’appliquer les lois et de mobiliser les contrôleurs dans les espaces de vente. Des lieux où l’anarchie est aussi importante que la spéculation, au grand dam des citoyens qui, frappés par la cherté de la vie qui affaiblit leur pouvoir d’achat, accordent peu d’attention, sinon rien du tout, à ce qui se passe sur la scène politique qui est à pied- d’œuvre pour les prochaines élections législatives. C’est parce que, peut-être, les algériens ont du mal à dégréer les discours et que leurs estomacs ont besoin d’autre chose, malheureusement.
Par Yasmine Ayadi