La guerre médiatique s’est accentuée à mesure que s’est confirmé le passage obligatoire par la “finale du Caire” pour accéder au Mondial sud-africain.
Habitués à de pareilles campagnes médiatiques, les Algériens n’arrivent tout de même toujours pas à comprendre cette frénésie médiatique qui s’empare des Égyptiens dès qu’on évoque une confrontation avec l’Algérie. Pour l’édition 2010, les choses ont commencé dès l’annonce du tirage au sort du groupe où devaient se retrouver “les frères ennemis”.
Les responsables du football égyptien, relayés par une presse trop égocentrique, ont vite crié à la qualification assurée de leur sélection. Il est vrai que, sur le papier, les Égyptiens étaient donnés pour favoris du groupe. Double champions d’Afrique et disposant d’une équipe homogène et expérimentée, tout, sur le papier, plaidait en leur faveur, sachant qu’en face, la Zambie figurait comme le probable outsider, alors que l’Algérie partait avec l’espoir de décrocher une place africaine.
Ceci pour l’histoire. Mais dès le début des qualifications, les donnes ont complètement changé. Les Égyptiens ont évité de justesse une humiliante défaite au Cairo Stadium — qu’ils abandonneront pour la suite des qualifications — face à des Zambiens hyper-motivés. Le nul concédé à domicile, mais surtout la manière de jouer des coéquipiers d’Abou Trika ont beaucoup surpris. Pendant ce temps-là, les capés de Rabah Saâdane se sont contentés d’un match nul lors de leur premier déplacement au Rwanda. Les Fennecs n’étaient pas partis pour gagner, mais pour ne pas perdre. Ils le regretteront par la suite.
La seconde journée fut celle de la naissance de l’espoir, pour les Algériens, et la confirmation des doutes égyptiens. En les recevant à Blida, les Algériens ont fait fort impression, non seulement en arrachant une belle victoire, mais surtout, en affichant, désormais leurs prétentions. Lesquelles se renforceront davantage avec la victoire ramenée de la jungle zambienne. Du coup, ce fut à l’Égypte de puiser dans toutes ses forces pour faire en sorte de gagner tous les matches qui lui restent dans l’espoir d’un faux pas de l’Algérie. Les protégés de Hassane Shehata ont réussi à remonter la pente, même si la manière laissait à désirer.
L’inévitable finale cairote
Revoilà donc, les deux équipes condamnées à jouer une finale au Caire. Et là, tous les charlatans, tous les chauvins, tous les racistes se sont mis de la partie pour prendre le train en marche et attiser les feux de la haine entre deux pays et deux peuples que tout unit. Et ce ne sont pas les appels des présidents des deux fédérations pour que la presse calme le jeu qui vont y changer quelque chose. Hier encore sur les chaînes satellitaires et sur les blogs, le déversement de la haine, l’arrogance, le déni de l’histoire et surtout l’ignorance footballistique régnaient en maîtres absolus.
Les rares personnes sensées qui ont tenté de resituer le match du 14 novembre dans son véritable contexte ont été vite censurées, en direct sur les chaînes satellitaires. C’est vous dire que la guerre des mots, des images, y compris à travers de grossiers montages photos, ou le mensonge par omission, font fureur. Mais à quoi obéit cette guerre médiatique ? Il est vrai que chaque média, chaque blog voudrait voir son équipe se qualifier.
Chacun essaie d’influer sur l’adversaire, en essayant de le démoraliser, et en même temps faire le maximum pour encourager les siens. Si, par le passé, l’Égypte nous damait le pion en matière de guerre médiatique, pas seulement en raison du déséquilibre flagrant en matière de moyens de communication dont disposait chaque pays, mais aussi en raison des lacunes que laissaient transparaître les sélections algériennes, il n’en est pas de même pour la bataille qui se déroule présentement.
D’une part, et hormis l’audiovisuel où les Égyptiens disposent d’une redoutable arme de propagande, la presse écrite et les médias par Internet sont largement en faveur des Algériens.
Une campagne prématurée et contre-productive
Les Égyptiens ont commencé la guerre prématurément, le jour du tirage au sort. Or, cette campagne a beaucoup plus fait du tort à leur sélection qu’à ses adversaires. En faisant croire que face à la “grande” équipe égyptienne, il n’y avait que de “petites sélections”, la presse égyptienne a grandement contribué au relâchement des protégés de Shehata.
En donnant la parole à des “experts”, “douctours”, “ousthadhs” et autres “captains”, inconnus de la scène footballistique internationale ou continentale, qui affirmaient, par exemple, que la sélection algérienne était composée de joueurs évoluant dans des équipes de seconde division française, elle a donné de faux espoirs, non seulement aux millions de supporters égyptiens, mais aussi au staff technique de la sélection égyptienne. Même le chargé de la communication de la Fédération égyptienne est tombé dans le panneau en annonçant à la télévision que deux buts suffisaient à son équipe pour se qualifier, avant de se faire “ramasser” par un expert égyptien.
Personne n’a dit à Shehata que le transfert de Karim Ziani de l’Olympique de Marseille vers Wolfsburg dépassait la valeur marchande de toute la sélection égyptienne réunie. Personne ne lui a parlé des merveilles de Matmour, des citadelles Bouguerra, Antar Yahia ou des capacités de Belhadj. On lui a juste dit que Ziani était “un petit lutin qui courait dans tous les sens”.
Les Allemands et les Français, avant eux, n’y connaissent rien au football, dans ce cas ! Que dire alors de Meguenni, surnommé “le futur Zidane” pas par la presse algérienne, ou encore de Yebda qui n’ont pas encore eu le temps de s’exprimer ? Que dire de cette sélection algérienne qui gagne de plus en plus en maturité, depuis les fameuses rencontres amicales contre le Brésil et l’Argentine ? Que dire de son parcours dans les qualifications ? Rien, la presse égyptienne fait comme si de rien n’était et continue à se remémorer les matches de 1989 et de 1991 où les Égyptiens s’étaient qualifiés, au détriment des Algériens, en Coupe du monde et aux Olympiades.
La presse égyptienne ne montre jamais les images de la victoire des Algériens en Coupe d’Afrique des Nations à Sousse et les larmes du commentateur égyptien qui fustigeait ce “harami” d’Achiou qui avait dribblé toute l’équipe pour aller battre El Hadari. Elle évite, comme on évite la peste, d’évoquer les dernières qualifications pour le Mondial où l’Egypte comptait sur un coup de pouce de l’Algérie, hors course, pour se qualifier et la cuisante défaite subie par les Égyptiens à Annaba qui a ouvert la voie à la sélection sénégalaise d’aller au Mondial.
La propagande égyptienne est contre-productive à plus d’un titre : non seulement elle donne l’illusion aux Égyptiens, joueurs et staff compris, qu’ils sont toujours aussi forts qu’en 2006 et en 2008 et que leur date de péremption n’était pas encore arrivée, malgré l’âge avancé des joueurs et l’incapacité de certains à courir sur le terrain, mais, en plus, elle ne s’intéresse que très superficiellement à l’équipe algérienne qu’elle continue à considérer comme “petite”, et c’est tant mieux pour les Algériens.
Mais, comme une campagne de propagande est censée avoir un objectif, celle des Égyptiens n’en a apparemment pas, ou se trompe carrément d’époque, pour la bonne et simple raison que l’équipe algérienne est composée à 90% de joueurs évoluant en Europe, donc non concernés, ni de près ni de loin, par cette campagne, contrairement aux joueurs égyptiens qui sont pour la majorité issus de clubs égyptiens et très affectés par tout ce qui s’écrit chez eux, au point que bon nombre d’entre eux avaient menacé de boycotter la sélection suite aux écrits de la presse égyptienne, durant leur séjour sud-africain pour la Coupe des confédérations. On l’a vu lors de la dernière coupe du monde des -20 ans où la presse égyptienne n’avait donné aucune chance à l’équipe du Costa Rica qui a pourtant éliminé la sélection égyptienne.