«The Way of the Knife: The C.I.A., a Secret Army, and a War at the Ends of the Earth».
C’est le titre d’un livre écrit par un journaliste du New-York Times, Mark Mazzetti, que l’on peut traduire par «Le chemin de couteau : la CIA, une armée secrète, et une guerre aux extrémités de la terre» et qui relate et analyse une dizaine d’années d’intervention militaire secrète, illégale par définition, des Etats-Unis.
Plus que par le passé, dit le journaliste du New-York Times, la Central Intelligence Agency est devenue «une agence paramilitaire» au service de la Maison Blanche qui lui donne le droit de tuer. Ian Fleming, le créateur de James Bond, lui-même agent secret britannique, avait accordé à son héros le «permis de tuer». Sans aucun doute, l’auteur de «Espions, faites vos jeux», publié en 1952, révélait une réalité des services secrets, même si personne ne se faisait d’illusion sur leurs pratiques criminelles.
Mais ce que rapporte Mark Mazzetti dans son livre, à propos des agissements de la CIA en «Afghanistan, en Irak et dans les endroits les plus difficiles d’accès pour une armée», comme actuellement au Mali, dépasse l’entendement. Alors que la loi américaine interdit à la CIA, dont la fonction «exclusive» est le renseignement, d’utiliser ces méthodes, celle-ci s’est appuyée sur les Navy Seal (Sea, Air And Land, mer, air et terre), une force spéciale, pour contourner la loi et commettre des crimes. L’exécution d’Oussama Ben Laden, en mai 2011, à Abbottabad, au Pakistan en est un des nombreux exemples que nous pourrions citer. Sans avoir averti au préalable le président des Etats-Unis, Barack Obama, lequel, préparant sa réélection à la Maison Blanche, donne l’autorisation à cette mission secrète de liquider le chef d’Al-Qaïda recherché depuis les attentats du 11 septembre 2001. Comme d’autres dont nous n’avons pas percé tous les arcanes, l’opération Ben Laden n’a pas encore révélé tous ses secrets.

Le livre de Mark Mazzetti ne traite pas de cette affaire, mais, plus particulièrement, de celle d’un homme, nommé Mohammad, partisan des Talibans, habitant le Waziristan, situé dans les zones montagneuses pakistanaises, à la frontière avec l’Afghanistan, fiché comme opposant dangereux au régime du général Pervez Musharraf et signalé à la CIA comme étant un chef de la rébellion tribale, tué, en juin 2004, en même temps que plusieurs autres personnes membres de sa tribu, dont deux garçons, par un missile tiré d’un drone «Predator».
Immédiatement, l’armée pakistanaise prend «la responsabilité de l’attaque, affirmant que c’est elle qui avait mené cette opération, alors que l’on savait qu’un drone avait survolé, vingt-quatre heures avant, la zone tribale du Waziristan, dans l’objectif de commettre cet assassinat ciblé.
L’auteur de «The Way of the Knife: The C.I.A., a Secret Army, and a War at the Ends of the Earth » découvre qu’un accord secret avait été conclu entre l’ISI (Inter-Services Intelligence) pakistanais, avec l’approbation de Musharraf, pour éliminer «Mohammad en échange d’une autorisation d’accès des drones américains sur le territoire du Pakistan». Depuis cette opération, dit Mark Mazzetti, des centaines d’autres de même type ont été conduites au Pakistan à l’aide de drones tuant des milliers de personnes, des Pakistanais ou des Arabes, dont l’écrasante majorité sont des civils n’ayant aucun lien avec le «terrorisme».
Georges W Busch et, après lui, Barack Obama ont fait du Pakistan leur terrain d’expérience pour les assassinats ciblés que l’actuel président américain utilise au Sahel.
Des membres du Congrès américain, aussi bien des républicains que des démocrates, exigent de Barack Obama, depuis quelques mois, qu’il fasse toute la lumière sur ces opérations illicites, de s’expliquer sur l’utilisation des drones et du rôle que joue désormais la CIA, celle-ci n’étant plus seulement une agence de renseignement.
La question se pose de savoir si le gouvernement malien, dont la légitimité est contestée par les Américains, eux-mêmes, a donné son accord à l’intervention de ces drones, ciblant des membres d’Al Qaïda au Maghreb islamique, du Mujao et d’Ansar Eddine.
Brahim Younessi