La grève des boulangers, premier test pour le gouvernement algérien sur le dossier des subventions

La grève des boulangers, premier test pour le gouvernement algérien sur le dossier des subventions
la-greve-des-boulangers-premier-test-pour-le-gouvernement-algerien-sur-le-dossier-des-subventions.jpg

Supprimer les subventions des produits de première nécessité ? « C’est nécessaire mais on ne le fera pas », semble répondre le gouvernement algérien, dont les hésitations sont exprimées par la position du ministre du Commerce, Mustapha Benbada, concernant la libération du prix du pain.

Après avoir lancé le débat sur les subventions des produits de large consommation, le gouvernement algérien a de nouveau fait marche arrière, lundi, face à la première épreuve sérieuse, la menace de grève des boulangers. Le ministre du Commerce, M. Mustapha Benbada, a déclaré que l’Etat maintiendra les subventions en vue de préserver le pouvoir d’achat du citoyen, en précisant que la révision des subventions doit se faire « de manière rationnelle ».



Le ministre du Commerce, dont les propos sont cités par l’APS, a répété les critiques traditionnelles du gouvernement envers le système de subvention, affirmant qu’il est « très couteux » mais « pas équitable ». Pour lui, l’Algérie « sera obligée d’aller dans le sens de la rationalisation de ses moyens par la mise en place d’un système de subvention qui s’adressera exclusivement aux nécessiteux ». Ceci s’imposerait notamment, a-t-il dit, « si l’Etat n’avait plus les moyens de poursuivre la politique actuelle de subvention, qui ne fait pas de distinction entre riches et pauvres ».

M. Benbabda a ainsi repris les arguments du patron du Forum des chefs d’entreprises, M. Rédha Hamiani. Celui-ci avait vivement critiqué un système de subvention qui profite, selon lui, « aux riches et aux pauvres, sans distinction ». Les subventions concernent les produits de large consommation, comme la semoule et le lait, mais aussi d’autres produits qui coûtent extrêmement cher à l’Etat, comme l’eau, l’électricité et le carburant.

LG Algérie

Cette appréciation est également partagée par le FMI, qui a recommandé à l’Algérie de faire preuve de « plus de prudence pour bien cibler les subventions en direction des populations les plus vulnérables », car « les subventions dites implicites s’avèrent trop coûteuses ». Selon une étude du PNUD, l’Algérie consacre 10,59 milliards de dollars (800 milliards de dinars) à la subvention des produits énergétiques, dont 2,13 milliards de dollars à l’électricité et 8,46 milliards de dollars aux carburants.

Le gouvernement entre la pression des boulangers et la peur de la rue

Le maintien des prix à un niveau très bas a provoqué un dérèglement économique, que le gouvernement doit affronter dès mardi. Les boulangers lancent, en effet, une grève pour demander une révision de leur marge bénéficiaire, alors que le prix de la baguette, huit dinars (dix cents de dollar ou huit centimes d’euro) n’a pas changé depuis 17 ans. M. Benbada a, d’ailleurs, reconnu que le prix du pain « n’a pas bougé depuis 1996 » et que cela constituait « un réel problème qu’il faudra traiter ».

Après plusieurs mois de contestation, les boulangers ont décidé de se lancer dans la grève pour appuyer leur revendication d’une révision de leur marge bénéficiaire, devenue insignifiante au regard de l’inflation. Mais le gouvernement est prisonnier de sa propre politique. Il ne peut pas augmenter le prix du pain car il craint la réaction de la rue et il ne peut pas non plus écraser davantage le prix des intrants, car les céréales, dont les importations atteignent les trois milliards de dollars annuellement, sont déjà fortement subventionnées.

Le ministre du Commerce a rejeté l’idée de baisser le prix de la farine proposée par les boulangers, la qualifiant de « très dangereuse » car elle risque d’ « augmenter le gaspillage ». Il a toutefois critiqué la décision des boulangers de recourir à la grève. « La grève n’est pas la bonne solution, car la porte du dialogue est ouverte », a-t-il dit. Il a rappelé qu’un groupe de travail « neutre » examine le dossier et devrait rendre ses conclusions mercredi sur la délicate question de « la structure de prix de la baguette de pain ». A partir de ces conclusions, le ministère du commerce doit « dégager une solution », a promis M. Benbada.