La France renonce à renverser le colonel Kadhafi, 69 ans, au pouvoir depuis septembre 1969. Moins de 4 mois après le début de l’intervention de l’Otan en Libye, la France estime que l’heure du règlement politique du conflit est arrivée. Paris a ouvert la porte dimanche 10 juillet à la fin de l’intervention alliée dès la mise en place d’un dialogue entre le régime et les rebelles du Conseil national de transition (CNT). Seif El Islam confirme que Tripoli et Paris négocient directement la fin du conflit.
«Nous avons arrêté la main qui avait frappé. Il va falloir se mettre maintenant autour d’une table», a déclaré dimanche le ministre de la Défense Gérard Longuet sur BFM-TV. «On s’arrête de bombarder dès que les Libyens parlent entre eux et que les militaires de tous bords rentrent dans leur caserne. Ils peuvent parler entre eux puisqu’on apporte la démonstration qu’il n’y pas de solution de force».
Kadhafi dans son palais avec un autre titre
« Même si Kadhafi n’est pas parti ? », lui a demandé un journaliste. « Il sera dans une autre pièce de son palais avec un autre titre », a répondu Gérard Longuet.
Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, a précisé le même sur France Info que le début de ces négociations ne pouvaient se faire qu’avec «un cessez-le-feu qui en soit véritablement un, sous contrôle des Nations unies».
Il souhaite que les pourparlers concernent le CNT, mais aussi «les acteurs libyens, en particulier ceux qui à Tripoli ont compris que Kadhafi n’avait pas d’avenir. Il faudra ensuite engager la feuille de route d’un processus démocratique».
Pour le chef de la diplomatie française, «la difficulté aujourd’hui est de savoir comment provoquer la mise à l’écart de Kadhafi de toute responsabilité politique et militaire».
Washington opposé au compromis français
Le département d’Etat américain n’a pas tardé à réagir à cette prise de position française, affirmant dans un communiqué qu’il n’était pas question d’envisager un compromis. « Ce sont les Libyens qui décideront eux-mêmes la manière dont la transition doit s’accomplir, mais nous restons fermes dans notre conviction que Kadhafi ne peut pas rester au pouvoir », a affirmé le département d’Etat américain.
Le communiqué ajoute que les Etats-Unis entendent poursuivre leurs efforts, dans le cadre de l’Otan, pour protéger les civils contre les attaques. La diplomatie américaine estime que l’Alliance participe à faire peser une pression décisive sur le colonel Kadhafi.
Paris et Tripoli négocient
Saif al Islam, fils du colonel Kadhafi, a indiqué au journal algérien El Khabar que Paris et Tripoli négocient directement la fin de la guerre. «La vérité est que nous négocions avec la France et non avec les rebelles», affirme-t-il. «Notre émissaire auprès de Nicolas Sarkozy a indiqué que le président français lui a dit ‘nous avons créé le conseil (des rebelles) et sans notre soutien, notre argent et nos armes, le conseil n’aurait jamais existé’». Dès lors, «la France a dit ‘lorsque nous serons parvenus à un accord avec Tripoli, nous obligerons le conseil à cesser le feu’».
Selon Saif al Islam, Paris aurait indiqué aux rebelles que le gouvernement de transition devait «s’engager sur plusieurs contrats». «Ils veulent parler des contrats au sujet des avions Rafale ainsi que d’autres contrats de la société Total», assure le fils de Kadhafi.
Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a lancé le 27 juin dernier un mandat d’arrêt international contre Kadhafi pour l’assassinat d’opposants et le recours à une violence systématique contre les populations civiles.
La fin du conflit comme cadeau pour le 14 juillet
Hors usure du matériel, l’opération en Libye a coûté 27 millions d’euros en salaires et près de 70 millions d’euros en munitions, soit « pas loin de 100 millions, ce qui représente 15% du budget annuel des opérations extérieures ».
Les alliés cherchent une issue à cette intervention qui dure depuis le 18 mars dernier. Selon le Canard enchaîné du mercredi 6 juillet, le président aurait dit son souhait de voir une résolution du conflit avant le jeudi 14 juillet. Un objectif que les militaires jugent irréalisable en un temps si court.