La fièvre du cinquantenaire de l’indépendance gagne la toile,L’Histoire racontée par les TIC

La fièvre du cinquantenaire de l’indépendance gagne la toile,L’Histoire racontée par les TIC

Le 19 Mars, une journée mémorable pour les Algériens

L’interprétation de l’histoire du pays du un million et demi de martyrs s’avère souvent erronée et diffère d’une personne à l’autre.

L’histoire est la mémoire du monde. Un peuple qui n’a pas d’histoire n’a pas d’avenir. Les Algériens, eux, sont fiers de leur histoire. Il existe même un amour passionnel pour elle.

Malheureusement, quand l’amour prend le dessus, l’objectivité en prend un sacré coup. L’interpré-tation de l’histoire du pays du un million et demi de martyrs s’avère souvent erronée et diffère d’une personne à l’autre. Les jeunes générations se retrouvent donc devant un dilemme: quelle version croire? En cette année 2012, qui coïncide avec le cinquantième anniversaire de l’Indépendance, l’Histoire passionne de plus en plus les jeunes et ils se retrouvent donc encore face à ce dilemme. Alors, ils ont trouvé une alternative qui n’est autre que la Toile. En effet, les Algériens, particulièrement les jeunes, ont investi le Net pour rendre hommage à leurs martyrs mais surtout pour connaître et comprendre l’histoire de leur très cher pays l’Algérie. «Grace au Net, j’arrive enfin à m’intéresser et à comprendre l’histoire de mon pays», nous confie Imad, un jeune étudiant. «Je ne vous cache pas que l’histoire telle qu’on nous l’a enseignée à l’école, m’a toujours ennuyé mais Facebook me la montre autrement…», ajoute-t-il avec un clin d’oeil avant de nous raconter le concours de circonstances qui l’a mené à être un passionné de la Guerre d’Algérie. «Un jour, un ami publie sur son mur Facebook une vidéo qui parle de la Guerre d’Algérie, moi inculte et adepte de la critique, je laisse un commentaire critique», relate-t-il. «Un ami à lui, qui est très branché en histoire, me répond avec des arguments très convaincants.

Et en voyant la vidéo après les avoirs lus, je me suis rendu compte que ce qu’il disait était vrai, mais surtout que notre histoire était très intéressante», poursuit-il. «C’est ainsi qu’est née ma passion pour l’Histoire de l’Algérie. Et je peux vous dire que je suis en train de l’exprimer librement grâce à un petit clic», assure-t-il. Le témoignage d’Imad n’est pas un cas isolé. Un petit tour sur les réseaux sociaux que sont Twitter et Facebook et on est agréablement surpris par la place consacrée à l’histoire. Groupe, blogs, forums, vidéos… rendant hommage aux chouhada et aux moudjahidine sont créés pratiquement chaque jour. Des photos exclusives, des vidéos postées sur YouTube… sont vues par des jeunes de divers niveaux intellectuels et milieux sociaux dans le seul souci, qui est celui d’apprendre l’histoire de leur pays.

L’Histoire aux jeunes

Le Net est donc en train d’avoir un nouveau rôle qui est de rapprocher et réconcilier les jeunes avec leur histoire. Néanmoins, la question que l’on se pose est: par quelle magie réussit-il là où les enseignants ont échoué à savoir inculquer aux jeunes générations l’amour de l’histoire? Pour Mehdi, jeune médecin, la réponse est toute simple. «L’Internet fait désormais partie de notre réalité quotidienne contrairement aux livres, et avoir accès à l’Histoire sur nos écrans d’ordinateurs la rapproche de notre réalité», atteste-t-il. «Il ne faut pas se voiler la face, l’Algérien est fâché avec les livres qui étaient jusque-là le seul moyen de connaître l’Histoire. Mais depuis qu’elle s’est invitée sur la Toile, les jeunes se sont mis à s’y intéresser», argumente t-il. Son ami Sofiane, qui partage tout à fait son avis, l’interrompt pour nous parler de son expérience personnelle. «Yves Courrière, le grand journaliste et écrivain français qui a écrit des chefs-d’oeuvre sur la Guerre d’Algérie, eh bien, ce n’est que grâce à Internet que j’ai pu le découvrir», raconte-t-il. «Vous imaginez! Je découvre Yves Courrière à 30 ans, vu qu’on ne nous l’a jamais enseigné et encore moins donné comme référence littéraire… Slamète Facebook (à la bonne grâce de Facebook) que j’ai eu vent de ces chefs-d’oeuvre littéraires», rétorque t-il avant de poursuivre son anecdote. «Sur Facebook un ami a publié des sonores où sont compilés les livres de Y. Courrière. 14h de pur bonheur où l’on comprend mieux notre grande révolution. Ça change de la langue de bois que l’on nous enseigne à l’école», souligne-t-il. «Grace à ces sonores, j’ai apprécié encore plus la grandeur de notre révolution et celle de nos martyrs. Je me suis donc empressé d’aller acheter les 4 tomes de «La guerre d’Algérie» de Yves Courrière. Je peux vous assurer que cela a fait naître en moi l’amour de la lecture et celle de la patrie», témoigne-t-il.

Table de débat

Pour Sihem par contre, jeune maman au foyer qui est très au fait de tout ce qui se dit dans les réseaux sociaux, le secret de «la colonisation» du Net par l’Histoire est incontestablement la liberté d’expression. «Je vous parle en connaissance de cause je fais partie de ces personnes qui contribuent à faire pénétrer l’Histoire sur la Toile et je peux vous dire que c’est parce que les gens arrivent à s’exprimer librement qu’ils apprécient ces moments d’histoire», garantit-elle. «Les débats de fond qui ont lieu entre des personnes qui ne se connaissent pas en sont la meilleure preuve», estime t-elle. «Je vous donne un exemple juste après la diffusion sur France 2 du documentaire La Guerre d’Algérie, la déchirure, les dz-bloggeurs se sont empressés de «refaire» le débat qui a eu lieu sur la même chaîne française et de commenter le reportage. Chacun allait de son idée et les discussions ont continué toute la nuit, même des jours après», explique-t-elle non sans nous raconter une anecdote concernant ce reportage de France 2.

«Vous savez, Internet n’est pas la seule technologie qui contribue à faire connaître l’Histoire, les téléphones portables jouent aussi leur rôle. Le soir de la diffusion du reportage, j’ai reçu beaucoup de textos me demandant de zapper sur France 2. Et je n’étais pas la seule. Beaucoup d’amis m’ont raconté avoir vécu la même expérience», précise t-elle. Pour revenir au reportage de France 2 et, en dehors de son contenu, Sihem dit avoir été ébahie par la puissance des progrès technologiques. «Vous avez vu les belles images en couleur du reportage, eh bien croyez-le ou non, c’était des images noir et blanc qui ont été colorisées grace à une nouvelle technique qui s’appelle la coloration d’images», signale t-elle pour démontrer l’impact du progrès sur l’Histoire. Smaïl, chômeur, parle pour sa part d’accessibilité. «Internet permet de faire pénétrer directement l’Histoire à l’intérieur de nos foyers. Ce qui permet une accessibilité à tous», affirme-t-il.

«Mais pas seulement, cela permet aussi aux gens d’avoir accès à une grande documentation grâce à un petit clic. Cela sans oublier que grâce au Net on peut parler à des historiens ou avoir accès à leurs sites web ou blog et ainsi avoir leurs avis et version des faits. Ce qui est impossible sans Internet», estime-t-il. «Sur le Net les gens peuvent aussi contribuer et donner leur version en toute liberté. C’est donc une façon pour eux de récupérer leur histoire et leur identité», croit-il savoir.

Défendre l’identité

Liberté d’expression, zone de débats libres, accessibilité aux informations…, et moyen de contribution sont donc les raisons qui ont fait que l’Histoire est en train de se frayer un chemin dans le quotidien des internautes algériens. Toutefois, les blogueurs algériens ne se contentent pas d’apprendre leur histoire sur le Net mais ils la défendent.

«Touche pas à l’histoire de mon bled», lancent certains d’entre eux. Juste après le reportage de France 2 La Guerre d’Algérie, la déchirure, les internautes algériens ont riposté à ce qu’ils ont appelé «une campagne de désinformation menée par une partie étrangère». Des groupes sur Facebook ont été créés juste après le reportage pour remercier Benjamin Stora d’avoir défendu l’Algérie lors du débat qui a suivi la diffusion du reportage. D’autres groupes ont par contre, été en colère contre David Pujadas, le «modérateur» du débat, et ses invités, qui ont voulu détourner l’histoire de l’Algérie. Et ce n’est pas les seules ripostes des dz-blogeurs pour défendre leur histoire et la mémoire de leurs martyrs. C’est donc d’une manière hautement symbolique qu’ils sont en train de marquer leur présence sur la Toile pour protéger leur patrie tout en revendiquant leur algérianité et leur amour pour le pays et leurs martyrs. «Un peuple qui n’enseigne pas son Histoire est un peuple qui perd son identité», cette phrase lourde de sens sort de la bouche du défunt président français François Mitterrand.

Mais heureusement que cette phrase n’est pas applicable au peuple algérien à la veille du cinquantenaire de son Indépendance. Bien au contraire, les Algériens sont en train d’utiliser les TIC à bon escient pour se souvenir de ceux qui se sont sacrifiés pour que l’on vive libre. L’histoire de l’Algérie est en marche sur le Net…