Lors d’ une virée à l’hôpital Mustapha-Pacha, en compagnie de quelques médecins, nous avons pu constater l’état de dégradation de la plupart des services.
Nous avons commencé notre virée par le service de médecine interne qui a été récemment rénové. Si, à l’intérieur, il est plus ou moins propre, une montagne de détritus nous accueille à l’entrée. Il est 15h, le service est quasiment vide. Le surveillant est absent, son bureau est fermé. «Son téléphone est le seul qui fonctionne dans le service», nous signale-t-on. «L’absentéisme est un problème récurent», note un médecin. «L’hôpital marche bien avec le nouveau directeur, il veut vraiment changer les choses, mais on le bloque. En tant que médecins, nous ne voulons pas être complices d’un pareil système de santé», souligne un médecin. Nous nous rendons ensuite dans le service des urgences. Des sacs de sable et de ciment sont posés devant la porte du service.
A l’intérieur, c’est l’anarchie totale. Des malades allongés sur des brancards dans le couloir, attendent leur transfert dans les salles. De l’autre côté de ce service, nous constatons la présence d’égouts à ciel ouvert juste sous la fenêtre d’une salle de ce service. Sans oublier les moustiques, rats et toutes sortes de bestioles qui n’ont pas à se trouver dans une structure hospitalière. A cause de cela, «on craint de se faire soigner dans un hôpital algérien», nous lance un médecin.
Nous poursuivons notre périple et nous atterrissons au service de gynécologie. Des rats, des moustiques, le bâtiment est en état de dégradation très avancée, l’ascenseur est bloqué, le stérilisateur… rouillé et une odeur infecte et répugnante se dégage d’une salle. Dans les salles réservées aux femmes enceintes, on trouve des matelas par terre, faute de places pour tout le monde. Le décor est loin de refléter ce que devrait être un service de gynécologie.
En face de la salle où une dizaine de femmes sont allongées…, des ordures débordent des poubelles ! Juste à côte, «un chantier» est lancé pour rénover une partie du service. «Venez voir dans quelles conditions les femmes algériennes accouchent, dans quelles conditions nos bébés naissent», nous dit un médecin. «Vous voyez l’état des hôpitaux du Nord du pays, donc vous pouvez imaginer un peu à quoi ressemble un hôpital dans le Sud», a-t-il ajouté. «On nous accuse souvent de ne pas faire notre travail, alors que le moindre moyen pour accomplir notre mission n’existe pas. Donnez-nous des moyens dignes d’un hôpital ensuite vous jugerez. Il m’est arrivé de travailler avec des gants de taille 8, alors que je porte la taille 6. Parfois, en pleine opération chirurgicale, on voit des moustiques au dessus du champ. Alors qu’un bloc opératoire doit être désinfecté», témoigne un autre médecin. Ce dernier nous a raconté qu’un malade, le pied en sang, a été contraint de se déplacer seul entre deux services sur une distance de plus de cent mètres.
B. M.