Un test de la nature de l’État algérien
La première expérience de grande distribution en Algérie demeure mitigée. Elle enregistre en fait un grand retard. En dépit d’un climat des affaires contraignant, les premiers hypermarchés se sont ouverts, drainant une large masse de clients. Dans la foulée, un complexe commercial parmi les plus grands au Maghreb connaît un succès rapide : il attire des millions de visiteurs par an. Indispensables dans le paysage économique algérien, ces ensembles commerciaux sont néanmoins rarissimes dans le pays. En effet, les investisseurs dans ce domaine sont en butte au problème du foncier, ce qui freine la constitution de chaînes d’hypermarchés et de centre commerciaux. Les franchisés, eux, éprouvent des difficultés pour accéder aux locaux. Et quand, ils y accèdent, les loyers et autres charges sont exorbitants.
Le cas du centre commercial et de loisirs de Bab Ezzouar est édifiant. En bouleversant les règles du jeu fixées au départ, elles ont suscité le mécontentement des locataires. Le partenariat de gagnant-gagnant s’est transformé en relation déséquilibrée, en faveur des exploitants. Ce qui suscite des interrogations sur les avantages d’un tel type d’investissement.
À cet égard, l’expérience des IDE en Algérie montre qu’il existe deux types d’investisseurs étrangers. “Des investisseurs occidentaux respectueux de la réglementation, de l’environnement local, satisfaits de leur partenariat gagnant-gagnant avec les Algériens, d’autres investisseurs méprisant l’Algérie et les Algériens qui en fin de course, éprouvent par cette attitude, d’énormes difficultés à réussir en Algérie”, avertit un banquier.
En ce sens, le centre commercial et de loisirs de Bab Ezzouar, au regard de son importance pour une métropole comme Alger, constitue un test de l’apport positif ou négatif des investissements étrangers. L’absence d’un document essentiel à son activité suscite des interrogations sur le rôle de contrôle et de facilitation des pouvoirs publics. Un poids, deux mesures, quand on sait la difficulté pour un investisseur local d’acquérir du foncier à Alger, ou ouvrir un espace commercial dans la capitale ?
En fait, l’aventure commerciale à Bab Ezzouar semble tourner au vinaigre. Il ne reste aux pouvoirs publics qu’à rétablir la loi, à contribuer au rééquilibrage des rapports entre exploitant et locataires, si on veut que ce genre de complexe commercial puisse jouer dans la vie économique du pays un tremplin à l’émergence d’une véritable grande distribution, assurant et la disponibilité et la qualité des produits et/ou des prestations. En somme, un véritable moyen de lutter contre l’informel et la contrefaçon. Dans le scénario inverse, cette situation ferait accréditer l’idée que l’Algérie est loin d’être un État de droit, voire une république au service de puissants relais qui roulent pour l’unique raison d’accumuler une masse d’argent le plus rapidement possible, quels que soient les moyens légaux ou illégaux utilisés, au détriment de véritables investisseurs et de millions de clients.
K. r.