La déclaration confuse de la diplomatie algérienne

La déclaration confuse de la diplomatie algérienne

Les  derniers  échecs  de  la  diplomatie  algérienne  dans  le  dossier  de  coopération  avec  l’Union Européenne (UE) que le gouvernement algérien considère comme l’un des dossiers prioritaires dans sa politique régionale et internationale sont à déplorer.

Le premier semestre 2015 a été un semestre chaotique dans l’action diplomatique que s’est livrée la diplomatie  algérienne.  Un  ministère  qui  n’est  pas  au  fait    des  dossiers,  pourra- t-il  assumer  sa responsabilité dans cette mauvaise gestion ? La neuvième session du conseil d’association UE-Algérie qui s’est tenu à Bruxelles (Belgique) les 3 et 4 Juin 2015 a eu pour objectif de donner au processus une nouvelle avancée. Le ministère des affaires étrangères a publié  le 18 Juin 2015 sur son site un texte intitulé ‘’la déclaration de l’Algérie’’, une déclaration comportant 49 points .Une analyse approfondie des trois principaux points (les points 44 ,45 et 49) de cette déclaration mérite d’être mentionnée.

Le point 44 ‘’L’actualité dramatique récente de migrants en Méditerranée interpelle les consciences humaines et appelle à la convergence des efforts autour d’une approche globale souvent développée par l’Algérie. En effet, l’Algérie, qui est passée de pays de transit à celui de destination, plaide en faveur d’une stratégie migratoire incluant à la fois les aspects de sécurité liés à la lutte contre les réseaux criminels de la traite humaine, la promotion d’une meilleure circulation des personnes, le respect de la dignité humaine et la coopération au développement avec les pays d’origine. Elle estime également que le règlement des crises dans la région et la lutte contre la pauvreté sont des facteurs d’atténuation de ce phénomène.’’

Concernant la notion de ‘’pays de transit et de destination’’ qui indiquée dans la déclaration, une nuance doit être apportée. Selon le dernier profil d’opérations en Algérie de 2015 établi par le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), l’Algérie demeure un pays de transit et de destination.

LG Algérie

Le budget a connu une augmentation constante depuis 2009  pour répondre à l’augmentation des flux migratoires mixtes utilisant l’Algérie comme pays de transit et de destination. En l’absence de système national d’asile, plus de 4 500 demandeurs d’asile se sont adressés au HCR entre 2009 et 2013 à la recherche d’une protection. En ce qui concerne la situation prolongée des réfugiés sahraouis, l’aide humanitaire   continue   d’être   nécessaire,   les   opportunités   économiques   pour   des   mesures d’autosuffisance étant limitées. En 2015, les besoins globaux des réfugiés et des demandeurs d’asile en Algérie sont estimés à 33,2 millions de dollars E.-U.

Le  11 Mai 2015, les  présidents des parlements de l’Union Pour la Méditerranée (UPM) dont l’Algérie fait partie, réunis au Portugal, dans une déclaration finale ont appelé à reconnaître le concept de migration mixte  et envisager de façon différenciée réfugiés, migrants économiques, personnes qui cherchent asile, migrants forcés et autres.’’

Le concept de migrations mixtes fait référence à des mouvements de population complexes composés de personnes qui empruntent les mêmes itinéraires et ont recours aux   mêmes moyens de transport mais qui se déplacent pour des motifs différents. Les principales caractéristiques des flux migratoires mixtes reposent sur   la multiplicité des facteurs à l’origine du mouvement et les divers besoins et profils des personnes concernées. Ces mouvements mixtes peuvent comprendre des migrants, dont certains peuvent avoir des besoins particuliers, des réfugiés, des enfants non accompagnés et séparés, ou encore des victimes de traite.

Le point 45‘’Elle renouvelle son appel en faveur du renforcement des droits légitimes des migrants légalement établis sur le territoire de l’UE et encourage cette dernière à ratifier la Convention des Nations Unies sur les Droits des Travailleurs Migrants et des Membres de leurs Familles.’’

Rappelons que l’Algérie a adhéré en 2005 à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille de l’Organisation des Nations Unies (ONU) de 1990 entrée en vigueur le 1 Juillet 2003.

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille du  conseil  des  droits  de l’homme  de  l’ONU a  étudié le  dernier rapport  présenté  par le gouvernement Algérien en 2010. Les observations finales du conseil des droits de l’homme et du parlement européen sont préoccupantes :

Le Comité demande à l’Algérie d’examiner   la possibilité d’adhérer à la Convention no 143 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), de 1975, intitulée ‘’Convention sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l’égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants  ‘’qui est entrée en vigueur le 09 décembre 1978.

Rappelons que dans le rapport demandé par l’OIT en date du 28   février   2015, l’Algérie n’a pas ratifié   la Convention no 143 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), de1975.

Le gouvernement algérien peut-il raisonnablement prétendre dresser une évaluation de  la situation des travailleurs migrants en Algérie  depuis la parution du rapport  publié par l’OIT,tout en rappelant l’UE à ratifier  la Convention des Nations Unies sur les Droits des Travailleurs Migrants et des Membres de leurs Familles ?Une aberration politique de la part du ministère des affaires étrangères.  Le comble de l’audace politique semble avoir été atteint.

Le gouvernement algérien parle d’encouragement alors que sa politique migratoire a attiré l’attention de la direction générale des politiques externes du Parlement Européen en 2014 : du côté de l’Algérie la migration est   une nécessité pour réduire   la charge des demandeurs d’emploi sur le marché du travail. La faiblesse des emplois qualifiés principalement ne saurait se régler à court  terme pour absorber les diplômés de l’enseignement supérieur. De façon   générale, la permanence du taux de chômage très élevés des jeunes ne permet pas de les incorporer à court terme sur le marché du travail, alors même que leur inactivité est un élément  structurel de la contestation sociale, d’autant plus aigu après les révoltes arabes de 2011. La mobilité est dès lors une condition de la transition économique et politique. Elle donne la possibilité d’une adaptation des qualifications des travailleurs qui peuvent ensuite chercher à se réinvestir dans leur pays d’origine.

Le point 49 ’’ L’Algérie a toujours plaidé pour le renforcement des processus euromaghrébin, euro- africain,  euro-arabe  et  euro-méditerranéen,  en  tant  que  foras  de  concertation  et  de  coopération favorisant la prospérité partagée et le rapprochement des peuples dans l’intérêt des régions respectives voisines. Elle considère, également, que le Dialogue 5+5 constitue un cadre complémentaire de ces processus. Elle souhaite, à cet égard, que le partenaire européen apporte sa contribution à la réalisation

des objectifs de la Stratégie sur l’eau en Méditerranée occidentale adoptée à Alger le 31 mars 2015.’’

Le resserrement compris entre la Sicile et la Tunisie  divise  la mer méditerranée en deux bassins : la Méditerranée occidentale, avec son annexe la mer Tyrrhénienne, et la Méditerranée orientale, avec ses dépendances (mer Ionienne, mer Adriatique et mer Égée).

16 pays Méditerranéens et la Communauté Européenne ont adopté en 1975  le Plan d’action pour la

Méditerranée (PAM), il s’agit du  premier plan jamais adopté dans le cadre du Programme des mers

régionales sous le patronage du PNUE.Soulignons que l’Algérie s’est engagée dans le domaine de l’eau en ratifiant en 1981  la convention de Barcelone de 1976 pour la réduction de la pollution de la Méditerranée et la protection du milieu marin du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE).Parmi   les   sept   protocoles   relatifs   aux   aspects   spécifiques   de   la   conservation   de l’environnement méditerranéen complétant le cadre juridique du Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM)  figure notamment : le Protocole  prévention et situations critiques  (pollution par les navires et situations critiques), le Protocole’’ aires spécialement protégées et diversité biologique’’, le Protocole

« déchets dangereux et le Protocole « gestion intégrée des zones côtières’’.

Or, dans le cinquième rapport national de Décembre 2014 sur la mise en œuvre de la convention sur la diversité biologique au niveau national établi par le Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement il est à noter : la pollution par les hydrocarbures qui n’a de cesse d’être alarmante à  travers  tous  ses  segments  d’activité :  le  transport  et  le  chargement  notamment.  Les  unités industrielles installées sur le littoral comme par exemple les raffineries sont des sources de pollution du milieu marin par les hydrocarbures ayant des effets directs ou indirects sur la biodiversité des fonds meubles.

La performance économique de l’Algérie dépend essentiellement de l’exploitation de ses ressources naturelles .La pression   exercée par les activités productives sur le capital naturel menace à la fois l’équilibre des écosystèmes  qui se traduit par  la pollution, la perte de biodiversité, le bien être humain (santé, sécurité, revenus, migrations), la durabilité économique et enfin, impacte de manière négative les dépenses publiques, en raison  du coût environnemental lié. Appelons les députés à se prononcer sur  l’évaluation des incidences environnementales des projets publics et privés. Le parlement ne peut- il pas légiférer  conformément à l’article 133 de la Constitution qui indique :’’Art. 133 : Les membres du Parlement peuvent interpeller le Gouvernement sur une question d’actualité. Les commissions du Parlement peuvent entendre les membres du Gouvernement.’’ ?