La coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) qui s’est tenue mardi 22 février a décidé d’organiser une nouvelle marche pacifique à Alger le 26 février prochain.
L’itinéraire de cette nouvelle manifestation est fixé de la Place du Martyrs vers la Place du 1er mai. Si la décision a été prise à la majorité, des composantes de la Coordination ont décidé de se désolidariser de cette initiative en refusant d’y prendre part. Notre journaliste raconte les coulisses de ce conclave houleux.
Minerve autour du cou, un pied dans le plâtre, se soutenant sur des béquilles, un homme se meut lentement. Il lui a fallu du temps pour parvenir au premier étage de cette bâtisse qui abrite la maison des syndicats, à Dar El Beida, dans la banlieue est d’Alger.
Cet homme qui prend place parmi les membres de la coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) est la preuve tangible, s’il en fallait, de ce qu’à été la répression policière du samedi 19 février. Lui, c’est Tahar Besbes, le député du RCD qui a été pris à partie par les forces anti-émeute le blessant gravement.
« Je ne voulais pas rester immobilisé pendant que l’histoire est en marche », dit-il lorsqu’il prend la parole dans cette réunion houleuse et à l’issue franchement incertaine.
La sérénité des rendez-vous passés est fêlée. Dés l’entame, une partie des membres de la coordination, regroupée autour de la ligue Algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), hâtait à mettre sur la table une proposition de scinder la coordination en deux commissions
L’une devant regrouper les associations de la société civile et l’autre les partis politiques. En somme la séparation du « civil » du « politique ».
Autour de cette proposition, on retrouve, outre la ligue Algérienne pour la défense des droits de l’homme, à l’exception de son président d’honneur, Me Ali Yahia Abdenour, les syndicats, comme le SNAPAP, le CLA, le SATEF, le CNES, section d’Oran, le collectif Algérie pacifique et l’association SOS disparus de Mme Dutour. Mustapha Bouchachi, porte-parole de la Coordination n’a pas assisté à cette réunion.
N’étant dupes de rien, le reste des membres de la coordination, partis politiques et associations et autres collectifs, ont vite compris la manœuvre. Il faut dire qu’ils voyaient les choses venir, dés dimanche dernier, lorsque la réunion d’évaluation de la marche du 19 février a été ajournée à mardi, décision unilatérale de la ligue et du SNAPAP.
Dés Lundi, les représentants des partis politiques et des associations membres de la coordination savaient que la ligue a réuni un certain nombre de syndicats et de collectifs pour peaufiner une stratégie de division de la coordination en deux pôles ou, à défaut, la faire imploser.
Les débats s’enclenchèrent donc sous vive tension. Les partisans du maintien de la coordination dans sa configuration initiale, c’est-à dire sans la scinder en deux pôles, ont vite fait comprendre à ceux qui seront leurs adversaires du jour que la question de l’organisation de la coordination a été tranchée dés le début et que cette proposition de créer deux commissions est une manœuvre visant à affaiblir la dynamique.
Les amabilités ayant été engagées sans préliminaires, les reproches ont fusé à l’endroit de ceux qui ont décidé d’ajourner la réunion pour ne pas avoir à dénoncer la répression de la marche et les agressions dont on fait l’objet 11 manifestants.
Par moment, les tensions étaient tellement vives que la réunion risquait de ne pas aller à son terme. Et, comme à chaque fois que la réunion coince, il y a ce vétéran des luttes militantes, Me Ali Yahia Abdenour, pour débloquer la situation.
C’est lui, prenant la parole, qui apaisa les tensions. Mais il n’a pas fait que cela. Il a proposé de maintenir la dynamique et de remarcher sur Alger non seulement le samedi 26 février mais tous les samedi.
Sa proposition a été fortement appuyée. Ses collègues de la ligue qui étaient partis sur une autre perspective ne purent que constater les dégâts. Ils ont eu beau revenir à la charge, rien n’est fait. La décision de remarcher le samedi et tous les samedi recueille la majorité.
Les représentants du RCD, du PLD, du MDS, du CNLP, de Tarwa Fathma NSoumer, de la coordination des étudiant du centre, du mouvement citoyen de Kabylie, du congrès mondial Amazigh, de l’association nationale des familles des disparus et d’autres associations soutiennent l’idée de marcher
D’autorité, Malaoui du SNAPAP demande à lever séance, après avoir déclaré que son syndicat ne marchera pas. Souveraine, l’assemblée lui rappelle que la coordination ne lui appartient pas. Fodhil Boumala intervient et fait rappeler que c’est la majorité qui décide et que même si un membre de la coordination n’adhère pas à une action, il a l’obligation morale d’être au moins solidaire.
Mais rien n’y fait. Ce qui devait arriver arriva. La coordination se scinde en deux : d’un coté ceux regroupés autour de la ligue qui ont bataillé pour l’observation d’une halte en attendant la séparation du civil du politique et de l’autre, plus nombreux, qui ont tranché pour l’appel à des marches chaque samedi à compter du samedi 26 février, non seulement à Alger mais partout ailleurs.
Et c’est Ali Yahia Abdenour à qui est revenu l’honneur de faire le compte rendu des décisions prises à la presse. Il a informé que la majorité a décidé de renouveler la marche le samedi 26 février et tous les samedi.
Il a souligné que pour la marche aura un itinéraire inversé par rapport aux deux précédentes, à savoir de la Place des Martyrs vers la Place du 1er mai.
Dans un coin de la salle, Malaoui du Snapap informait, pour sa part, que la coordination est désormais scindée en deux. C’est dans cette ambiance que la réunion a pris fin après plus de 6 heures de palabres.