La coquette à l’heure de l’après-iftar: Annaba ou le Ramadhan by night

La coquette à l’heure de l’après-iftar: Annaba ou le Ramadhan by night

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Le shour en bord de mer, balades et discussions interminables tout le long de la corniche caractérisent les soirées des Annabis.

Jadis vécu dans la pure tradition, le mois du jeûne s’offre une petite escapade dans le monde du modernisme, avec les veillées ramadhanesques loin du carcan d’antan où, «essahra» à la maison était la tradition des familles annabies. Depuis quelques années les coutumes et traditions du mois de Ramadhan ont quelque peu évolué, pour ne pas dire changé à la faveur de nouvelles habitudes adoptées par les jeûneurs. C’est le cas de le dire pour Annaba où, en dépit de la conservation jalouse des rites et traditions du mois de Ramadhan, il y a tout de même ces inhabituels comportements intrus au «processus» ramadhanesque, le shour en bord de mer entre autres.

Le bord de mer, un restaurant grandeur nature.

Ainsi, au niveau de la plage Saint-Cloud ou Chapuis ou Aïn Achir, des familles entières avec leurs enfants, des couples et des groupes d’amis se réunissent tous les soirs pratiquement, autour de tables du shour improvisées. Le Front de mer attire de plus en plus de monde. Des jeunes, des moins jeunes et des enfants investissent, en effet, les lieux, une heure environ après le ftour. Les adultes sont chargés de glacières et de couffins de pique-nique où les mets sont gardés au chaud ou au froid. Pendant que ces derniers préparent la table dans une ambiance joyeuse, les enfants jouent au ballon ou sur le sable. Une fois les mets et les couverts disposés sur les tables, les adultes prennent place en papotant gaiement tout en admirant le va-et-vient des vagues. Vu que l’éclairage public n’éclaire pas suffisamment la plage, certains allument des bougies, les mettant dans des verres pour abriter les flammes du vent. Une ambiance très intime et chaleureuse enveloppe les jeûneurs, à peine perturbée par les cris excités des enfants. Au moment du shour, le cliquètement des couverts et les brouhahas ajoutent une note d’intimité. Une fois rassasiés, des groupes se constituent pour débarrasser les lieux avant de prendre un bon café chaud, et enfin reprendre le chemin du retour à la maison. En cours de route, on prend soin de ne pas oublier la dernière gorgée d’eau avant le dernier Adhan. Du Vidro jusqu’au cap de Garde, l’ambiance est de tous les instants. Des parties de jeux de société sont organisées, ici et là, par certains, tandis que d’autres se contentent de discuter en sirotant du thé et en fumant le narguilé. A quelques heures du shor, les jeunes, venus en groupe, préparent un barbecue à la plage pour préparer grillades et brochettes. L’odeur alléchante de la viande envahit aussitôt la plage. Assis parfois à même le sable, ils savourent tranquillement leur viande en profitant de la fraîcheur et des derniers moments de la nuit. Les trépidations de la vie nocturne se font sentir dans toutes les rues de Annaba, le centre-ville, notamment.

Après les premières heures du ftour, le majestueux Cours de la révolution, place emblématique de la ville des Jujubes, doté d’un nouveau look, fait le plein juste après la prière des «tarawih». Ses terrasses qui ont changé de décor et de commodités, sont investies par un public à la recherche de détente et de repos après une journée de jeûne. Les autres sites de la Coquette sont, eux aussi, animés. Les commerces activent sous l’oeil vigilant des services de sécurité, dont les éléments se confondent avec la foule, tel un caméléon qui change de couleur selon les circonstances. Leur présence assure la sécurité et la quiétude des veillées du mois de Ramadhan. Un mois qui semble remonter dans le temps pour transporter la ville des Jujubes vers un jadis pas aussi lointain.

Un passé où les veillées ramadhanesques de Annaba étaient renommées, avec les soirées de Aïssaouia et Hadra. Des soirées de psalmodies et de madaïh coraniques, entre autres traditions et rites du mois sacré.

Bien que ces dernières affichent un retour en force au sein de la société annabie, il demeure toutefois, que les nouveautés tentent de se frayer une place au sein de ces comportements des Annabis, comme la chicha. La chicha, a fini par s’incruster dans la société algérienne, à Annaba notamment où elle fait de plus en plus d’émules. En effet, le narguilé gagne chaque jour de nouveaux adeptes parmi les jeunes Annabis. Les fumeurs de la pipe à eau affirment que «c’est une source de plaisir et de détente». A Annaba, les soirées exclusives sont réservées à la «qaâda à la chicha» arrosées de café et de thé à la menthe, accompagnées de fruits secs, amandes et pistaches entre autres. L’usage de la chicha est presque général, mais un peu plus durant le mois sacré. En bord de mer, dans les salons de thé et café et même en bas des immeubles, les groupes de fumeurs du narguilé se partagent le plaisir de fumer la chicha entre amis. Ils se rassemblent autour d’une partie de cartes ou de dominos pour profiter des veillées du mois de Ramadhan, jusqu’au shour.

Le cas est le même dans les autres villes satellites de la métropole Annaba. El Hadjar, El Bouni, Sidi Amar et Berrahal entre autres, où la même ambiance est observée.

Le narguilé pour égayer les soirées ramadhanesques

Si pour certains habitants de ces localités, la Corniche est la destination familiale par excellence, pour d’autres, les adeptes des places et placettes publiques, celles-ci demeurent le point d’atterrissage pour converser du tout et de rien entre amis et copains du quartier. C’est pour dire que l’ambiance ramadhanesque est la même dans toute la wilaya de Annaba, où les veillées se poursuivent dans le calme. Ainsi Annaba by night in Ramadhan, observe des soirées exceptionnelles et spécifiques que l’on ne trouve nulle part ailleurs.