Les éléments de la 2ème sûreté urbaine (hai Sidi El Bachir ex-Plateau) viennent d’arrêter le gérant d’une cafeteria, âgé de 34 ans, pour détention et commercialisation de drogues.
Cette affaire remonte au début de la semaine passée, lorsque les enquêteurs ont découvert que cet individu servait des tasses de café, accompagnées d’un joint de kif traité, le tout pour 50 dinars.
Le mis en cause, ainsi que sept de ses clients, ont été arrêtés et placés sous mandat de dépôt par ordre du procureur de la République. Au-delà de ce fait divers, un véritable phénomène de propagation des drogues, dites douces, est en train de voir le jour, sans occulter le fait que les drogues dites dures ont commencé à faire leur apparition.
Des phénomènes à la fois nouveaux et dangereux, sont en train de faire une entrée dans la société ces dernières années, certes, mais surtout de se banaliser. Cette mode a été importée d’Europe et d’Orient, sans la moindre connaissance des conséquences qu’elle peut engendrer à moyen et long termes, même si la consommation de kif n’est pas nouvelle à Oran, et dans toute la région Ouest.
En effet, après le phénomène de la chicha qui est devenu très fréquent à Oran, bien que les études aient clairement montré que son usage est équivalent à la consommation de plusieurs paquets de cigarettes à la fois, un autre a fait son apparition : la vente de joints dans des cafés. Ce phénomène est devenu banal, au point où de véritables coffee shops ont fait leur apparition, une version pâle et illégale de ceux autorisés en Hollande, par exemple.
Dans le cas de la cafétéria, le plus grave et le plus choquant à la fois, est que la majorité (pour ne pas dire l’ensemble) des clients de cet établissement, censé être de détente, sont au courant de cette pratique.
Comment donc en est-on arrivé à ce stade de la consommation des stupéfiants, alors que les adresses de ces établissements ne circulent pas sous le manteau, mais en toute liberté ? Selon un sociologue que nous avons consulté, nous avons été étonnés d’apprendre que ce genre de commerce devait bien exister, fatalement.
«Tout le monde parle de drogue, les prises se font non plus par kilogrammes, mais par tonnes. Il faut bien que ces quantités réapparaissent un jour sur un circuit. C’est un peu le système des coffee shops adopté aux Pays-Bas qui consiste en la vente de drogue librement dans certains cafés, où des citoyens viennent consommer une quantité précise de stupéfiant en toute légalité».
Le gérant de cette cafétéria s’est inspiré de ce modèle, sans s’inquiéter, car la relation fournisseur consommateur est telle que personne n’a intérêt à dénoncer ce business. «Ceux qui viennent dans ces endroits, viennent pour y consommer. Et rares sont ceux qui s’y attablent par hasard. Cette pratique était courante, intra muros.
On fumait un joint dans sa maison, ou entre copains dans un appartement, à l’abri des regards. Ce n’est plus le cas», dira notre interlocuteur. Selon lui, «Il suffit de demander une cigarette avec votre tasse de café, pour être servi. Le gérant sait qu’il n’a rien à craindre, et les intrus sont vite repérés, à moins d’être infiltré ou dénoncé et pris en flagrant délit, personne ne saura rien. Le paradoxe est que tout le monde sait tout».
La question qui se pose naturellement, est de savoir combien de cafés de ce genre existent.
«Des dizaines», dira notre source, qui précisera : «Ce sont des endroits qui sont situés à l’écart, qui ne sont pas bondés comme les cafés à succès, au point où l’on se demande comment les propriétaires réalisent-ils des bénéfices». Ce café n’est-il donc que la partie visible de l’iceberg ? Le plus grave dans cette histoire de consommation de drogue, reste les collégiens et lycéens que l’on convainc, qu’en fumant un joint, ils sont «branchés».
Tout un vocabulaire a été inventé pour tromper cette jeunesse et lui donner l’illusion d’être dorée : «Zen», «Cool» qui sont venus remplacer les «Broum». La situation est grave.
S. Anissa & H. Djaziri