La cimenterie de Meftah (Blida) ne polluera plus

La cimenterie de Meftah (Blida) ne polluera plus

La cimenterie de Meftah s’est dotée de technolgies propres. L’Etat a engagé un vaste programme de dépollution des entreprises évalué à 8 milliards de dinars.

La poussière est en suspension dans l’air, créant un film quasi opaque sur ce mastodonte d’architecture : la cimenterie de Meftah est là et ouvre ses portes sur la délégation composée du ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, Cherif Rahmani, de ses cadres et de journalistes.

Aujourd’hui, on fête en grande pompe la mise en place d’un dispositif de dépollution. «Une dépollution qui devrait changer la vie des habitants de Meftah et des ouvriers de la cimenterie», rapporte le ministre en visite.

Entrée en production en septembre 1975, la cimenterie utilisait une technologie par voie sèche qui laissait dégager beaucoup de poussières dans l’atmosphère. Les champs avoisinants sont blanchis par des dépôts toujours renouvelés. La région souffre du manque d’air provoqué par la cimenterie.

L’air emprisonné à Meftah n’a nulle part où s’échapper. La montagne fait barrage à toute forme de molécule. La Mitidja, énorme étendue plate coincée entre les collines du Sahel et la montagne de Chréa, peut s’avérer être un réceptacle hermétique.

En cette journée de septembre où le vent frais s’acoquine aux durs rayons du soleil, la cimenterie, du coup, arbore un visage accueillant (ou est-ce à la faveur de la délégation ?).

«Il faut voir quand il y a des bourrasques et de la pluie. On n’y voit rien, on n’y respire que du ciment», raconte une bande d’ouvriers. Aujourd’hui la poussière se fera sage et ne s’emportera que sous les coups de pied des passants.

Une cheminée crache une légère fumée. Un autre ouvrier viendra expliquer que cette cheminée n’est plus vraiment en activité, voilà une qui dispose d’un filtre moderne. Il s’agit d’une cheminée en aluminium, rien à voir avec sa voisine faite de béton, toute en longueur comme une longue-vue posée à la verticale.

La cimenterie fait peau neuve et dispose donc aujourd’hui d’un large programme de dépollution industrielle. «La cimenterie de Meftah bénéficie d’un dispositif moderne de filtres à manche avec un objectif de qualité de 10 mg/Nm3 d’air. La norme environnementale est de 30 mg/Nm3 d’air.

Les cimenteries ne sont donc pas appelées uniquement à améliorer la qualité du ciment et à baisser leurs prix de revient, mais aussi à remédier aux problèmes de pollution causés par les rejets des poussières qu’elles dégagent à tous les niveaux de fabrication du ciment», explique le ministre Cherif Rahmani.

Munie d’un casque, d’un gilet fluorescent et de lunettes de protection, la délégation s’en va affronter l’imposante machine à faire du ciment.

La question sécuritaire est prise au sérieux à la cimenterie. Le groupe français Lafarge, leader mondial dans le secteur du béton, granulat, ciment et plâtre, est actuellement en charge de la cimenterie de Meftah, a évoqué toutes les avancées faites à la cimenterie de Meftah dont le projet de modification de l’atelier cru et de dépoussiérage du four.

«De nombreux aménagements ont été entrepris, dont la reconfiguration et la modification des circuits des gaz chauds du four ainsi que la conversion de l’électro filtre Walter et la remise en état de l’électro filtre Imiza», a expliqué le représentant de Lafarge, lors de sa communication.

«Cela va beaucoup mieux»

«Ce sont de très bons gestionnaires», intervient Mohamed en aparté. De ce côté de la cimenterie, les sacs de ciment sont «scellés» et descendent sur un tapis roulant pour atterrir auprès de deux ouvriers qui les placent dans de grands chariots. «C’est vrai que la cimenterie a arrêté de fonctionner durant un mois et c’est très difficile de la mettre en route.

Ils auraient dû procéder à des formations durant ce mois d’arrêt, de façon à ce que nous sachions comment travailler avec ces nouveaux outils. Encore aujourd’hui la cimenterie ne fonctionne pas 24h/24 ni sept jours sur sept

. Il y a toujours quelques pannes et quelques problèmes à résoudre. Mais depuis, chacun des ouvriers a bénéficié d’une formation dans le cadre de son secteur d’activité. Nous sommes allés à Oran, à M’sila. On a été formés même au Maroc», explique Mohamed, âgé de 32 ans, marié et père de deux enfants.

Cela fait 12 ans qu’il travaille à la cimenterie et avoue qu’il ne souffre d’aucun mal. Mais ses parents, ses enfants et son épouse qui habitent à côté sont, soit asthmatiques soit allergiques. S’il est vrai que les ouvriers sont enchantés de travailler dans un climat nettement moins poussiéreux, beaucoup continuent à se plaindre.

Les salaires avoisinent les 17 500 DA, la médecine du travail est inexistante depuis 4 ans et actuellement à l’infirmerie, le médecin est absent. «Auparavant,il y avait tous les six mois une visite médicale», ajoute Mohamed. Le casque enfoncé sur la tête, les lèvres ternes mais des yeux noisette surmontés de larges sourcils noirs renvoient une humeur pétillante.

Actuellement, la cimenterie emploie quelque 572 salariés qui travaillent quotidiennement pour une production de 3 500 tonnes de ciment par heure. Un autre groupe d’ouvriers se plaint du salaire, des risques sur la santé d’un travail d’une telle pénibilité.

«On nous donnait 2 litres de lait par jour, et aujourd’hui on ne nous donne plus rien», s’esclaffe un ouvrier qui semble être là depuis longtemps. Actuellement, seules deux cimenteries sont dotées de technologies propres : celles de Djelfa et de Mascara.

Huit font l’objet d’une mise à niveau comme celle de Meftah et d’Alger, Raïs Hamidou. Six autres sont en cours de réalisation jusqu’à l’horizon 2014. Le mastodonte d’architecture refermera ses portes au départ de la délégation soulevant derrière elle un nuage de poussière.

Zineb Amina Maiche