La diminution constante des prix du pétrole, ponctuée par de très sporadiques et brefs raffermissements, n’en continue pas moins de demeurer une source de préoccupation majeure pour le pays, malgré les « assurances » réitérées chaque fois par le gouvernement quant à la maîtrise de la situation macroéconomique et du maintien de l’aisance financière avec laquelle l’Algérie finance directement son développement économique.
C’est justement tout le problème ! L’économie nationale dans son ensemble, sinon dans sa totalité, est financée majoritairement par les rentrées en devises générées par la vente des hydrocarbures, même si depuis la loi de finances de 2004, l’indice de référence sur lequel se base l’Algérie pour calculer son budget est de 37 dollars. Virtuellement, la plus-value est de plus de 40 dollars par baril quand son prix est actuellement d’un peu plus de 80 dollars. Ce surplus alimente le fonds de régulation des recettes, qui vient à son tour combler les déficits et alimenter les programmes spéciaux du gouvernement. Or, le niveau des dépenses prévues et consignées dans la dernière loi de finances, principalement pour payer les importations de biens, seront de l’ordre de 60 milliards de dollars, au moment où les recettes pétrolières escomptées à fin 2014 sont de… 60 milliards de dollars.
Dans une telle situation, dépenses et rentrées se neutralisent, au grand dam du financement de l’économie, mais surtout le plan de diversification de celle-ci. C’est pourquoi l’Algérie est obligée de redessiner son avenir économique à partir de l’évolution à venir de tout le marché pétrolier, de plus en plus assombri par une transformation des tendances d’achat et de consommation des plus gros consommateurs d’énergie, que sont la Chine et les Etats-Unis, la première étant devenue moins « vorace » et les deuxièmes moins « dépendants ». Dans une note de conjoncture publiée hier par l’Agence internationale de l’énergie, « beaucoup de pays producteurs ont des prix d’équilibre budgétaire bien supérieurs aux prix actuels du pétrole. Même si cela ne rend pas nécessairement la production pétrolière non rentable, cela pourrait avoir des effets négatifs sur la stabilité sociale, et donc affecter indirectement les perspectives de production ». Sur ce point, et pour ce qui est de l’Algérie, elle reprend à son compte les propos de l’ancien ministre des Finances, Karim Djoudi, qui disait qu’« un baril à 110 dollars était nécessaire pour tenir les équilibres budgétaires ».
Mais depuis que les Etats-Unis ont décidé d’exploiter leurs ressources énergétiques schisteuses, leurs fournisseurs, y compris l’Algérie, sont forcés de se trouver d’autres débouchés à leur production, ce qui attise la lutte pour les parts de marchés ailleurs dans le monde. D’autre part, « le développement économique ne stimule plus autant qu’avant la croissance de la demande de pétrole. La Chine, principale source d’augmentation de la demande pétrolière ces dernières années, est entrée dans un stade de développement moins gourmand en pétrole », analyse encore l’AIE. « Résultat, on rentre dans une période de prix relativement plus bas que ce qu’on a connus au cours des trois ou quatre dernières années, des bas prix qui sont là pour durer », poursuit-elle.
Même si le discours des hauts responsables algériens, à leur tête le Premier ministre Sellal, se veut « rassurant », la tenue de la conférence nationale sur le développement économique et social, il y a à peine deux semaines, avec pour objectif un renouveau industriel hors hydrocarbures qui devrait permettre d’atteindre une croissance de 7% jusqu’en 2020, renseigne sur une « reconnaissance » à demi-mots de l’urgence de diversifier les sources de revenus du pays. D’autant plus que même si les prix étaient à des niveaux supérieurs à 100 dollars, il n’en demeure pas moins que l’Algérie a de moins en moins de ressources énergétiques à vendre, car ce qui devait être exporté est consacré à la consommation énergétique domestique, qui grimpe à plus de 10% par an.