La cellule de communication de l’UFL sur le terrain des GSI, L’intransigeance mauritanienne devant le terrorisme

La cellule de communication de l’UFL sur le terrain des GSI, L’intransigeance mauritanienne devant le terrorisme

“Ce n’est pas de la Mauritanie que viendra la menace contre la sécurité et l’intégrité territoriale du Mali.” Responsables politiques et militaires répondent ainsi, d’une seule voix, à la campagne médiatique qui cible ce pays qui a, bien avant la crise malienne, alerté les pays voisins quant au risque d’escalade terroriste.

Sans citer les auteurs de la campagne d’intox, les responsables mauritaniens ont tenu à démentir les informations ayant fait état de repli dans son territoire de terroristes et de rebelles après leur forfait au Mali. Le démenti sera par la preuve sur le terrain, à travers le dispositif militaire mis en place le long de la frontière où les groupes spéciaux d’intervention ont pris position.

Devant la délégation de la cellule de communication de l’UFL, les responsables mauritaniens ont joué franc et la transparence en répondant à toutes les questions. Bel exercice qui semble ficeler et obéir à une nouvelle stratégie sécuritaire impliquant même le segment de la communication dans ce pays, où l’ouverture volontariste des médias est totale et sans restriction.

Depuis le début de la crise malienne, la Mauritanie fait face à une double pression induite par la menace terroriste et le poids des 67 000 réfugiés (le plus grand nombre dans tous les pays du Sahel).

Est venue se greffer à ce risque l’offensive de certains médias, selon les responsables, qui, sous prétexte de liberté d’expression, n’ont pas jugé utile de s’astreindre à un code moral et éthique dans le traitement de l’information sécuritaire.

Concernant la presse mauritanienne, celle électronique particulièrement, le gouvernement semble lui accorder des circonstances atténuantes, dans la mesure où elle est à ses débuts et, reconnaît le ministre de la Communication, Mohamed Yahia Ould Hourma, que l’ouverture médiatique, à l’instar de l’Algérie des années 1990, a connu une entame anarchique. Cela dit, a insisté le ministre, il n’est pas question de revenir en arrière. Le gouvernement a décidé d’ouvrir le champ médiatique, volontairement, en connaissance de cause des risques de “dérives”. Mais ce n’est pas si grave, a-t-il estimé. Malgré quelques apprentis-sorciers, rappelle le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, Mohamed Ould Ahmed Salem Ould Mohamed Rare.

C’est un peu comme laisser le temps aux journalistes de se réapproprier le métier. Il est revenu également sur le passé récent, avec les attentats qu’a connus le pays au même titre que l’Algérie et le Mali, tout en considérant que la Mauritanie a vite réagi en prenant les mesures adéquates. Elles sont d’ordre sécuritaire en premier lieu, mais également social. Le patron de la police a précisé qu’après les alertes et l’attaque de la Mauritanie, l’armée a fait l’objet d’un audit avant d’adopter des mesures adaptées à la nature de la menace. Et même cette stratégie a eu des résultats, il n’en demeure pas moins que, reconnaît le responsable, que si la menace existe dans les pays voisins, “elle existe aussi chez nous”. Et vu le caractère international et transnational du terrorisme, la riposte, a-t-il indiqué, doit être internationale.

Et pour répondre aux rumeurs, le ministre détaille la procédure d’accès des réfugiés maliens en Mauritanie. Il n’y a d’abord que trois points d’entrée, contrôlés par l’armée et la gendarmerie. Ces points sont installés à proximité de la ligne frontalière séparant les deux pays. À quelques mètres de là est installée la ceinture sécuritaire de l’armée. Les réfugiés sont fouillés, identifiés et inscrits sur une liste qui sera transmise au camp. Donc, aucune arme ni une personne armée n’a accès au territoire, encore moins au camp des réfugiés.

La ceinture est composée de 6 groupes spéciaux d’intervention (GSI), une force d’élite formée expressément pour la lutte contre le terrorisme. “Aucun rebelle, aucune personne ne peut agresser le Mali à partir d’ici”, souligne le ministre. Cette stratégie reste néanmoins insuffisante sans une coopération sécuritaire, militaire, en renseignement et une coordination entre les pays de la région qui sont autant de cibles pour les groupes terroristes.

De son côté, le ministère des Affaires religieuses a eu à prendre des initiatives dans le cadre de ce combat à travers des campagnes de sensibilisation mais aussi en direction des terroristes détenus dans les prisons. Pour ce faire, il a fait appel aux ulémas et imams du pays qui ont eu des entretiens avec les détenus qui ont au bout du compte reconnu avoir fauté et dévié de la voie de l’Islam originel avant de se repentir et de prêter serment de ne plus revenir sur ce faux chemin. Un seul cas de récidive a été enregistré. Cette commission a eu des effets positifs, a estimé un imam. Par ailleurs, interrogé en marge de la rencontre au ministère du Culte sur le sort du Mauritanien porte-parole d’Anser Edine qui s’est rendu aux autorités, un membre de la Ligue des ulémas du Sahel a indiqué que celui-ci doit être d’abord soumis à la procédure judiciaire avant de pouvoir bénéficier du dialogue avec la commission restreinte.

Passés les entretiens avec les responsables politiques et militaires à Nouakchott, la délégation prend le chemin du profond Sud, Bassikounou, à l’extrême sud-est du pays, la frontière avec le Mali. Périple et épreuve de terrain sur plus de 1 400 km pour atteindre le point le plus loin du pays. Et premières remarques de changements induits par la dégradation de la situation au Mali, les check-points, ces barrages fixes qui jalonnent les accès à partir de la sortie de la capitale Nouakchott jusqu’aux limites de la plus grande ville du Sud, Bassikounou. Arrêt obligatoire pour tous les véhicules, contrôle…

La délégation fait escale à Ayoun Latrouss (littéralement yeux de bouc), Aleg et Nema avant d’atterrir à Bassikounou, ville limitrophe de la frontière avec le Mali.

Depuis 2012, la crise malienne a provoqué un exode massif de réfugiés dans la région. Ils sont cantonnés à M’barae, le plus grand camp de réfugiés maliens dans toute la région du Sahel avec 67 000 personnes issues en majorité de la région de Tombouctou-Léré. Sans grillage, le camp est cependant ceinturé par un service de sécurité. Les entrées en sorties sont gérées par des éléments de la gendarmerie.

Plus loin, encore au Sud, la frontière malienne. La zone est inhabitée. Aucun réfugié. Très proche de ligne de séparation, a pris position le GSI 1, le groupe spécial d’intervention, créé après les premières attaques terroristes contre la Mauritanie, en 2008. Bataillon mobile, équipé de véhicule avec des éléments désormais rompus au combat contre le terrorisme. Le lieutenant colonel Ould Abdi raconte l’historique du 1er GSI qu’il dirige, ses premières missions dans l’Adrar mauritanien, un no man’s land qui fait face à la wilaya d’Adrar algérienne. Après, il est passé au Centre avant d’être appelé au contrôle et surveillance de cette zone sud-est frontalière. Cela participe de la nouvelle stratégie qui a vu la création d’une nouvelle région militaire et la constitution de six autres GSI pour assurer la sécurité de cette longue frontière avec un Mali complètement déstabilisé avec deux tiers de son territoire passés sous le contrôle des groupes terroristes. Pour gérer le flux de réfugiés, les militaires, qui ont bouclé la ligne, ont laissé un point de passage, le seul dans la zone, que les Maliens fuyant la guerre peuvent emprunter pour trouver refuge. Le 1er GSI dispose, dit son commandant, de la composante humaine et matérielle qui lui permet de mener à bien sa mission. Le Groupe à eu à intervenir au-delà de la frontière, a-t-il révélé, dans le cadre de la lutte antiterroriste suivant l’accord bilatéral signé avec le Mali.

Le rôle du GSI, détaille l’officier, consiste en la reconnaissance, le contrôle des points suspects, la recherche des groupes terroristes et narcotrafiquants, l’ouverture des zones difficiles avant l’intervention des autres unités, la sécurisation des compagnies étrangères qui activent dans la région, l’assistance aux citoyens des zones frontalières en matière sanitaire et alimentaire. Le lieutenant-colonel a estimé les résultats enregistrés sur le terrain, considérables. “Nous avons réussi à éloigner la menace terroriste du pays”, dit-il.

Le long de la ligne séparant les deux pays, une multitude de véhicules équipées de mitrailleuses pointées vers la source de la menace forment une impressionnante ceinture sécuritaire. Tout est visible en ce terrain ouvert et dégagé. Raison pour laquelle les terroristes ne se sont aventurés qu’une seule fois et subi d’énormes pertes après la riposte.

Au point de passage, arrive un pick-up. Il est occupé par six personnes et est bien chargé. Arrêt obligatoire. Fouille et contrôle identitaire des passagers, le chargement passe au “scanner” des soldats. Un passager, un vieux est malade. Il est vite pris en charge et transporté par une ambulance prévue à cet effet. Le véhicule est autorisé à rentrer par un détour qui contourne la zone militaire.

Cela dit, le GSI a gardé sa position en raison de la présence de la délégation de l’UFL. Car, a expliqué l’officier, le Groupe est mobile, change de position pour les besoins de surveillance tout en étant prêt à intervenir au moindre signe de menace.

En 2011, la zone était sous la responsabilité du 2e GSI dont les positions étaient cependant plus éloignées de la frontière. L’évolution de la situation et les développements de la crise malienne ont fait qu’il soit remplacé pour le 1er GSI, plus expérimenté en position avancée avec un grand écart par rapport au camp des réfugiés et de la grande ville du Sud, Bassikounou.

Retour enfin à Nouakchott comme une épreuve laborieuse avec toutefois une image qui reflète une volonté politique d’endiguer le terrorisme en y mettant tous les moyens.

D. B