La campagne présidentielle algérienne s’achève sur des accusations de «terrorisme»

La campagne présidentielle algérienne s’achève sur des accusations de «terrorisme»

Benflis, le principal rival de Bouteflika, avait mis en garde contre la tentation de fraude. Ce qu’a peu apprécié le président sortant.

La campagne pour l’élection présidentielle de jeudi en Algérie s’achève dimanche après des échanges violents, le président sortant Abdelaziz Bouteflika accusant de «terrorisme» son principal rival Ali Benflis, qui n’a cessé de dénoncer les risques de fraude.



Les Algériens sont appelés aux urnes le 17 avril pour élire leur président au cours d’un scrutin a priori sans surprise, Bouteflika apparaissant comme le grand favori malgré ses ennuis de santé qui l’ont empêché de mener lui-même campagne. Ses émissaires se sont chargés de clôturer la campagne, vantant le «miracle» de leur champion qui «a sorti l’Algérie des ténèbres vers la lumière». Benflis devait réunir ses partisans en milieu d’après-midi au stade municipal de Rouiba (est).

Absent de la campagne entamée le 23 mars, Bouteflika y a apporté samedi soir un ton tout à fait inattendu lors d’une audience accordée au chef de diplomatie espagnole, José Manuel Garcia-Margallo. D’une voix faiblement articulée, selon les images diffusées par la télévision, il a accusé Benflis d’avoir appelé à la violence, osant même le terme de «terrorisme». «Qu’un candidat vienne menacer les walis (préfets) et les autorités», disant «de faire attention à leurs familles et à leurs enfants en cas de fraude, cela veut dire quoi», a déclaré Bouteflika devant son hôte. C’est «du terrorisme à travers la télévision», a souligné Bouteflika, observant en français que la campagne avait parfois «manqué d’élégance».

Le président faisait allusion à des propos de Benflis mercredi sur les risques de fraude électorale. «La fraude est haram (illicite). Le faux et usage de faux est haram. Je m’adresse aux walis, aux chefs de daïras (sous-préfets): vous avez de la famille, pensez à la préserver», avait-il dit. «Soyez vigilants», avait également lancé Benflis à l’adresse des électeurs. «Ceux qui se sont habitués à spolier la parole du peuple, à détourner sa volonté, veulent garder leurs vieilles habitudes de la fraude», avait-il insisté.

Quelques heures avant la charge du président contre Benflis, la direction de campagne de Bouteflika l’avait aussi accusé de violences: «Nous prenons acte de la poursuite de comportements violents de la part de parties hostiles au déroulement serein et transparent de la campagne et de l’élection pour la présidentielle, et dénonçons les auteurs de cette violence qui émane de représentants de M. Benflis.» En réaction, Benflis a dénoncé un texte «d’une violence inouïe» et d’«une extrême gravité» contenant des «propos diffamatoires» et des «accusations infondées».

La fraude mine tous les rendez-vous électoraux en Algérie. Un ancien préfet vient d’ailleurs de confesser l’avoir pratiquée par le passé à la demande de sa hiérarchie. Les révélations de cet ancien responsable «ont choqué l’opinion démocratique», s’est révolté dimanche le quotidien El Watan en évoquant un «mal incurable». «Le phénomène a connu une telle amplitude qu’on parle désormais, presque avec une certaine banalisation dans le propos du “parti de la fraude” consacré comme le premier parti en Algérie», a ajouté le journal.

Dès le début de la campagne, Benflis, ancien Premier ministre connaissant les rouages de l’administration, a prévenu que la fraude serait son «principal adversaire» le 17 avril. Pour lui, la fraude fut le «vainqueur» et la démocratie «le perdant» de la présidentielle de 2004 dont il était sorti humilié avec seulement 6% des voix, deuxième derrière Bouteflika qui en avait recueilli 85% dès le premier tour.

Affaibli par un AVC qui a nécessité près de trois mois d’hospitalisation en France l’année dernière, Bouteflika, 77 ans dont 15 à la tête de l’Algérie, suit une rééducation pour récupérer toutes ses facultés d’élocution et sa mobilité.